Dans un ouvrage à paraître ("Justice, le ministère infernal", du journaliste Matthieu Delahousse), Patrick Ouart affirme qu'il "conseille Nicolas Sarkozy" dans le cadre de l'affaire Clearstream, dans laquelle le président est partie civile. "Ses intérêts sont défendus par un duo formé de Thierry Herzog (l'avocat de M. Sarkozy, ndlr) et moi-même. Mais je ne suis pas dans un conflit d'intérêts", soutient M. Ouart.

Pour Me Metzner, "le conseiller justice de l'Elysée se pose en co-défenseur de Nicolas Sarkozy, c'est gravissime comme propos". "Il est payé par qui? Par les Français. Il se commet d'office aux frais de l'Etat", a-t-il dénoncé.

L'avocat s'est également élevé contre les déclarations de M. Guéant défendant l'emploi du mot "coupables" par le président, qui a valu à Nicolas Sarkozy d'être assigné en justice pour atteinte à la présomption d'innocence par Dominique de Villepin. "En général, les coupables figurent parmi ceux qui sont présentés par les juges", avait affirmé Claude Guéant.

L'avocat y voit là une nouvelle atteinte à la présomption d'innocence de son client par le secrétaire général de l'Elysée, qui "sort de son poste".

Bien avant Clearstream, une affaire mêle Imad Lahoud à François Pérol

Me Olivier Metzner dit également s'interroger sur la "proximité" entre Imad Lahoud, falsificateur présumé des listings Clearstream, et "le cercle rapproché" de Nicolas Sarkozy, notamment François Pérol, avec qui il a déjeuné ou dîné à une quinzaine de reprises entre février 2004 et juillet 2005. François Pérol a été directeur adjoint de cabinet de Nicolas Sarkozy à Bercy, puis secrétaire général adjoint de l'Elysée.

Selon le site Mediapart, Imad Lahoud "pourrait avoir bénéficié d'un traitement de faveur", de la Commission des opérations de Bourse (COB) et du Conseil de discipline de la gestion financière (CGDF), dans une affaire d'escroquerie de 42 millions de dollars, grâce aux appuis d'un proche de Nicolas Sarkozy, François Pérol et de sa femme, Nathalie Guggenheim.

En 1997, le mathématicien fonde avec son beau-père, HL Gestion, une société qui gérait les avoirs du Volter Fund Limited, un fonds d'investissement enregistré dans un paradis fiscal, les Iles Vierges britanniques. La société d'Imad Lahoud reçoit plus tard un agrément de la COB, qui lui permet d'exercer des activités financières.

Pourtant, selon Mediapart, la Commission "n'a pas rempli l'une de ses obligations règlementaires avant de donner son agrément". La COB n'a pas vérifié s'il existait une convention entre HL Gestion et une société dépositaire permettant de localiser les fonds. Nathalie Guggenheim, qui deviendra plus tard, l'épouse de François Pérol, travaillait à la COB et elle s'était occupée du dossier HL Gestion, révèle le site internet qui qualifie de "première anomalie", ce manquement.

Le 18 juillet 2000, interrogé sur cette absence de convention par les enquêteurs de la COB, Imad Lahoud affirme que n'ayant pas "de relevés de comptes au nom de Volter Fund", qu'il réclame sans les obtenir, il s'est "vu dans l'obligation de gérer environ 300 millions de francs sans ces outils comptables". Le 11 septembre 2000, un rapport de la COB montre qu'HL Gestion est "dans l'incapacité (…) d'assurer le remboursement des parts des souscripteurs, à en donner une valorisation et à indiquer le volume de ses actifs financiers disponibles ainsi que leur localisation". L'argent de la société d'Imad Lahoud a disparu, soit 42 millions de dollars.

"Deuxième anomalie" selon Mediapart : malgré une enquête sur HL Gestion, la Commission des opérations de Bourse ne signale que des "irrégularités mineures", alors que la société d'Imad Lahoud sera déclarée quelques semaines plus tard, en cessation de paiement.

Malgré les faits dénoncés par le rapport de la COB, le Conseil de discipline de la gestion financière ne lancera aucune enquête. Il revenait notamment au représentant du Trésor au CDGF (à l'époque François Pérol) de saisir le Conseil de discipline de cette absence de déclaration de compte dépositaire, ce qui n'a pas été fait.

La procédure aurait pu être mise en place soit par auto saisine, soit par la COB ou encore par la commissaire du gouvernement, François Pérol. Sa suppléante est également Nathalie Guggenheim, sa compagne.

En 2002, deux juges du pôle financier parisien, Valérie Salméron et Isabelle Prévost-Desprez, lancent des commissions rogatoires internationales (CRI), notamment dans les Iles Vierges britanniques pour retrouver les 42 millions de dollars. Sans succès. En octobre 2003, alors qu'elle dirige seule le dossier depuis quelque mois, Isabelle Prévost-Desprez est nommée au tribunal de Nanterre. C'est le juge Jean-Marie d'Huy qui récupère le dossier avant de se consacrer à une autre affaire : Clearstream.

Selon Mediapart, "ces nouveaux éléments reposent la question des protections dont semble jouir M. Lahoud depuis de nombreuses années". Interrogé par le site internet, François Pérol "par l'intermédiaire de son directeur de communication", affirme que l'enquête " comporte des allégations fausses". De son côté, Nathalie Guggenheim, n'a pas voulu s'exprimer.

"Un haut commis de l'Etat va dîner 15 fois avec un gars soupçonné d'avoir piqué 42 millions de dollars", s'est étonné Me Metzner, s'interrogeant sur un "lien" entre les affaires du fonds Volter et Clearstream.

Les débats au procès Clearstream de dénonciation calomnieuse se poursuivent lundi, avant les plaidoiries des parties civiles.

Sources: Agence France Presse et Nouvel Observateur