18 avril 2012

François Hollande à Lille a réuni 15 000 partisans dont des "voisins" Belges

Éditorial de lucienne magalie pons

 Nous publierons le reportage vidéo dans un autre Éditorial

Nous vous invitions à prendre connaissance ci-dessous du  discours de François Hollande,  suivi d'une Revue de Presse

- Le texte du discours étant très long nous l'avons reproduit en petits caractères, en vue de faciliter la lecture, il convient de copier coller et ensuite de choisir une autre taille 14 ou 16' par exemple.

Le discours de François Hollande
Mes chers amis !
Merci d’être venus aussi nombreux, ce soir, à Lille, cette ville qui compte tant de personnalités exceptionnelles. Plus exceptionnel encore que d’autres, Pierre Mauroy qui fut maire de Lille pendant plus de 30 ans et qui fut aussi et surtout en 1981 le premier Premier ministre de François Mitterrand. Le Premier ministre de l’alternance, le Premier ministre du changement, le Premier ministre de l’union de la Gauche ! Merci, Pierre Mauroy. J’exprime ici notre gratitude. Je sais qu’il m’entend et qu’il sera encore présent à nos côtés. Je remercie Martine Aubry de m’accueillir comme maire de Lille, une ville qu’elle a continué de transformer et de tourner vers l’avenir. Je salue Martine Aubry, première Secrétaire du Parti socialiste. Un parti que je connais bien et que j’ai dirigé pendant plus de dix ans. J’en sais, je l’ai rappelé ici, les grandeurs, les vicissitudes.
Mais sans le Parti socialiste, il n’y a pas de changement possible aujourd’hui en France ! Ces militants ici rassemblés, ces sympathisants, ces électeurs, tout ce qui a fait qu’aujourd’hui l’alternance est possible ! Je remercie Martine Aubry d’avoir permis le rassemblement au lendemain des primaires citoyennes, d’avoir engagé le mouvement avec celles et ceux qui avaient été candidats dans ces primaires et qui sont ici avec nous pour gagner aujourd’hui ! Rassemblement de toutes les personnalités qui ont fait la fierté de notre engagement, et l’honneur de nos gouvernements : Lionel Jospin, Laurent Fabius et tant de ministres qui ont servi sous les présidences de François Mitterrand ou sous le gouvernement de Lionel Jospin. Et ce rassemblement, nous l’avons élargi aux Radicaux de Gauche – Jean-Michel Baylet –, à ceux de culture communiste – Robert Hue –, et à toutes celles et à tous ceux qui veulent aujourd’hui permettre l’alternance, la réussite, le changement. Ce rassemblement, il est notre force. Rassembler les Socialistes, rassembler la Gauche, rassembler les Français. Il n’y a pas d’autre leçon que j’ai apprise de François Mitterrand, la leçon de la victoire !
Certains, je les entends, voudraient que la Gauche se divise, se désunisse, se désarticule. Je leur dis calmement : ils n’y parviendront pas ! Il n’y aura pas la Gauche contre la Gauche ! La Gauche de la protestation contre la Gauche du gouvernement, la Gauche des cortèges contre la Gauche des ministères, la Gauche de l’idéal contre la Gauche du réel. Non, je m’y refuse ! Il n’y a pas deux Gauche, il y a une Gauche qui veut gagner, qui veut diriger, qui veut rassembler les Français.
Je veux l’union. Les citoyens la veulent. Les électeurs la réclament. Nous la ferons, cette union ! Mais mon devoir, candidat du Parti socialiste, soutenu par les forces de Gauche qui ont bien compris l’utilité de ma candidature pour gagner, mon devoir c’est de réussir. Ce n’est pas de témoigner pour attendre. Mais attendre quoi ? Attendre encore cinq ans ? Non, c’est tout de suite que nous devons gagner !
Je ne prépare rien d’autre que la victoire et ensuite, la transformation de notre pays. Je veux agir. Je ne veux pas simplement protester, résister, contester. Non, je veux réformer notre pays, le faire avancer, lui trouver une nouvelle fois la capacité de chercher des conquêtes en lui-même, de valoriser ses atouts, de défendre ses valeurs. Il y a urgence ! C’est là, dans cinq jours, que nous allons décider de notre destin : destin pour la France, destin pour l’Europe. Cinq jours pour que les Français comprennent bien le message que je porte ici à Lille : c’est le premier tour qui va emporter tout, le mouvement qui va se lever, la conquête qui va s’annoncer !
Chaque fois que je traverse les foules, j’entends les mêmes messages, les mêmes paroles. « Courage ! », me dit-on. Mais le courage, je l’aurai jusqu’au bout pour vous porter à la victoire ! « Tenez bon », me dit-on. Mais je ne lâcherai rien, parce que je n’ai qu’un devoir : vous faire gagner, vous faire réussir, vous emmener ! Mais j’ai besoin aussi qu’une levée en masse se fasse, dès le premier tour de l’élection présidentielle. N’attendez pas ! Faites-le tout de suite. Engagez le processus. Il sera irréversible, irrépressible, irrésistible.
Je salue aussi d’autres Socialistes que les Socialistes français parce que nous appartenons à un grand mouvement qui ne se limite pas à nos frontières : un grand mouvement européen, international. Merci Thierry Giet d’être là au nom des Socialistes belges. Merci à toi Elio di Rupo, mon ami. Nous avons, Elio et moi, siégé pendant tant d’années dans des réunions du Parti socialiste européen où nous préparions des décisions prises par d’autres ! Eh bien aujourd’hui, tu es au Conseil européen et je veux te retrouver le plus vite possible autour de la table du Conseil européen !
Une fois encore, et c’est dimanche, la France va rencontrer son destin. L’enjeu, c’est notre pays. C’est de poursuivre la longue marche de l’histoire. Cette histoire que vous connaissez bien, que vous avez faite ici dans le nord. Cette histoire, c’est le combat engagé de ceux qui vivent de leur travail et dont le seul patrimoine s’appelle la sécurité sociale. C’est le combat de ceux qui attendent tant de la promesse républicaine pour leurs enfants, cette promesse que nous avons reçue de nos grands-parents ou de nos parents, qui voulaient que nous vivions mieux qu’eux. Cette promesse que nous devons honorer pour nos propres enfants, petits-enfants, qui doivent vivre mieux que nous parce que cela s’appelle le progrès ! Cela s’appelle l’humanité ! C’est le rêve français, celui que nous partageons depuis que la République est là : ce rêve de vivre mieux, ce rêve d’avancer, de ne jamais rien céder malgré les épreuves et l’adversité.
Je ne laisserai jamais dire que la valeur travail appartiendrait à la Droite quand le chômage frappe 4 millions de nos concitoyens, quand la précarité s’étend et touche notamment les plus jeunes, quand ceux qui travaillent dur au service des autres – les infirmières, les aides-soignantes, les enseignants, les assistantes sociales – ne reçoivent pas des dirigeants de notre pays la considération qui leur est due, quand des rémunérations indécentes sont versées à des patrons qui n’ont pas mérité par leur seul travail de recevoir ces sommes. Eh bien la Droite n’est pas qualifiée pour nous faire la leçon ! Elle ajoute d’ailleurs le cynisme à l’échec. Non ! C’est la Gauche qui doit promouvoir le travail, la dignité qui s’y attache et l’emploi indispensable tant attendu, ici dans cette région comme partout en France.
Nous poursuivons depuis tant de décennies le combat pour la justice, l’égalité humaine. Nous n’acceptons pas la misère, la pauvreté. Elles n’ont pas disparu. Je relisais Victor Hugo, un de ses discours qu’il avait prononcé à la Chambre des députés, au milieu du XIXe siècle, discours qui s’appelle « les caves de Lille », où il décrivait les conditions de vie des enfants, des familles, ici même dans cette ville, dans cette région. Eh bien, un siècle et demi après, la France n’est pas encore débarrassée de la pauvreté, de la misère, de l’injustice. Eh bien c’est notre combat ! Comme cela a été le combat, au lendemain de la Seconde guerre mondiale, de ceux qui s’étaient levés dans la Résistance et qui nous ont laissé un programme accompli, encore inachevé, et remis en cause depuis cinq ans !
Nous avons ce devoir de reprendre la marche. Il ne s’agit pas, pour ceux qui sont dans cette situation de pauvreté et de précarité, d’assistés. Non ! Beaucoup de ceux-là travaillent. Mais trop peu pour atteindre un niveau de vie suffisant. Et je pense aussi aux jeunes condamnés à l’intermittence, à l’intérim, à la précarité. Et je sais aussi ce qu’est la condition des femmes qui en plus, souvent, affrontent la vie familiale parfois seules. Alors devant cette situation, nous, nous avons dans cette élection le devoir de rappeler le combat pour la dignité du travail, le droit de faire de son travail une émancipation et aussi l’affirmation de sa condition.
Le combat de 2012, c’est de ne pas accepter qu’en France un ouvrier ait une espérance de vie inférieure de plus de huit ans à celle d’un cadre. Et c’est pourquoi je rétablirai la retraite à 60 ans pour ceux dont les carrières ont été longues, dures, pénibles, difficiles.
Le combat de 2012, c’est de préserver le principe du repos dominical, c’est-à-dire de permettre aux travailleurs de consacrer un jour de leur semaine à leur famille, au sport, à la culture, à la liberté. Et j’y veillerai !
Le combat de 2012, c’est de lutter contre le travail précaire, contre la multiplication de ces contrats qui ne contractualisent rien, contre l’abus indécent des stages non rémunérés, des intérims, contre ce travail qui n’est pas de l’emploi.
Le combat de 2012, c’est de lutter contre la souffrance au travail, partout, y compris dans les entreprises publiques.
Le combat de 2012, c’est de lutter contre les discriminations à l’embauche.
Le combat de 2012, c’est de donner toute leur place aux personnes handicapées qui doivent aussi s’accomplir par le travail.
Le combat de 2012, c’est de rémunérer le travail à son prix et de valoriser l’intervention de l’ouvrier, de l’artisan, du technicien qui avec leurs mains fabriquent la richesse de la Nation et doivent comprendre, doivent savoir que si nous sommes demain aux responsabilités, ils seront considérés, respectés et valorisés.
Le combat de 2012, c’est de lutter pour l’égalité professionnelle des femmes avec les hommes. Même travail, même salaire ! Même diplôme, même rémunération !
Le combat de 2012, c’est de rendre au dialogue social toute sa place, toute sa légitimité. Et c’est la raison pour laquelle j’inscrirai avec le Parlement dans la Constitution la reconnaissance de la démocratie sociale qui est indispensable si l’on veut que l’intérêt général puisse être servi, au-delà de la démocratie politique, par des forces sociales organisées, patronales comme syndicales. Et moi, je respecte les syndicats ! Attaquer les syndicats c’est, en définitive, atteindre les travailleurs qui leur ont donné mandat de les défendre.
Le combat de 2012, c’est de permettre à des salariés ou plutôt à leurs représentants d’être élus dans les conseils d’administration des grandes entreprises pour pouvoir dire leur mot et avoir l’information indispensable. Cela s’appelle, tout simplement, la démocratie.
Voilà notre combat ! Il n’est pas épuisé ! Nous ne sommes pas les héritiers de thèses qui auraient été dépassées. Nous n’avons pas accompli notre devoir. Tant de génération se sont mobilisées pour de grandes causes – et la nôtre a également une belle mission : permettre à la génération qui arrive de vivre mieux. Permettre le progrès. Permettre l’égalité. Permettre la justice. Mais aussi, parce que nous sommes dans une crise, parce que notre pays a été affaibli, parce que l’Europe a mis trop de temps pour se mettre en ordre, parce que le monde est touché par la spéculation et par la finance, nous avons aussi la mission de redresser la France, de redresser la production, la croissance, l’activité, l’industrie. L’industrie ! Ici, c’est une part de votre histoire, de votre identité. Tant de travailleurs se sont dévoués, nés ici ou venus d’ailleurs. Polonais, Belges, Italiens, Marocains, Algériens, Africains sont venus ici travailler dans les usines. Vous savez ce qu’est une grande industrie : le labeur, l’investissement productif, la belle tâche qui est de façonner des produits avec des technologies sans cesse nouvelles. Moi, je ne veux pas d’une France sans usines, ni d’usines sans ouvriers. Je ne veux pas d’une France sans bureaux d’études, sans laboratoires de recherche. Je ne veux pas d’une France qui achèterait davantage de produits qu’elle n’en vendrait aux autres pays. Je ne veux pas d’une France dépendante, d’une France soumise ! Je ne veux pas non plus, dans la mondialisation, d’une France reléguée comme une puissance secondaire, spectatrice. Je n’accepte pas la perspective d’une France condamnée à assembler ce qui serait fabriqué à l’autre bout de la planète !
Non ! La crise est venue de cet oubli de l’économie réelle, de cette place disproportionnée des services, de la finance, de ce qui ne crée pas toujours la valeur nécessaire pour créer de l’emploi et de l’activité. Ceux qui ont laissé cette finance s’installer, ceux qui ont libéralisé sans règles la mondialisation, ceux qui ont mis partout en Europe une concurrence sans projet de croissance, ceux-là ont manqué à leur devoir. Et ceux-là, c’est la Droite coalisée en Europe et c’est la Droite au pouvoir en France ! Partout où je me déplace, je mesure cette véritable saignée des emplois industriels : 400 000 ont été rayés de la carte depuis cinq ans, près de 800 000 en dix ans. Rien que ces trois dernières années, 900 usines ont fermé. Et derrière ces chiffres, qu’y a-t-il ? Des ateliers qui ferment, des hommes et des femmes dont le savoir-faire était reconnu jetés en dehors de leurs usines, des brevets qui s’en vont et une région qui peut craindre pour son avenir. Eh bien non, nous arrivons ! Nous serons là et nous redonnerons une perspective industrielle à la France !
Mais il nous faut bien plus que changer de président – c’est nécessaire. C’est le passage obligé. C’est le préalable. C’est la condition. Nous ne pouvons pas imaginer une politique différente avec le même président. Lui-même essaie de faire comprendre qu’il n’aurait pas été, jusque-là, président. D’une certaine façon, c’est un peu vrai ! Mais comment pourrait-il, pour les cinq prochaines années, faire différemment de ce qu’il a déjà fait depuis cinq ans – ou plutôt de ce qu’il a défait ? Nous devons changer de président, sûrement ! Changer de politique, assurément ! Mais changer de logique. Et c’est ce que je propose.
Changer de logique, c’est en finir avec les aides de l’Etat aux entreprises sans contrepartie.
Changer de logique, c’est créer par exemple un contrat de relocalisation qui permettra d’apporter un soutien public pour des engagements précis en faveur de l’emploi, de la présence sur le territoire, de l’investissement, de la formation des salariés, du respect des délais de paiement avec les sous-traitants. Voilà ce qui permettra de réinstaller des entreprises sur le territoire. Et nous le ferons avec les régions ici, avec les régions Nord-Pas-de-Calais et Daniel Percheron.
Changer de logique, c’est en terminer avec un chômage qui frappe les plus jeunes et qui écarte les plus anciens. Et c’est ma proposition de contrat de génération, qui permettra à un employeur qui garde un sénior le temps qu’il puisse accéder à l’entraide et qui embauche un jeune – mais avec un contrat à durée indéterminée –, de ne plus payer de cotisations sociales sur les deux emplois.
Changer de logique, c’est en finir avec un système où les grands groupes paient moins d’impôt sur les sociétés en proportion que les petites et moyennes entreprises. Et c’est pourquoi j’introduirai une modulation de l’impôt sur les sociétés : 15 % sur les plus petites, 30 % sur les moyennes et 35 % pour les plus grandes. Et je modulerai aussi cet impôt sur les sociétés, qui sera plus haut si le bénéfice est distribué aux actionnaires mais plus bas s’il est réinvesti dans l’entreprise.
Changer de logique, c’est mobiliser l’épargne, l’épargne populaire – mais pour l’emploi, pour l’emploi et pour l’industrie. C’est le sens du livret d’épargne que je propose, dont l’ensemble des dépôts sera affecté aux décisions d’investissement des PME qui les attendent.
Changer de logique, c’est faciliter l’accès à la commande publique, justement, de ces petites et moyennes entreprises.
Changer de logique, c’est en finir avec un système bancaire où l’argent sert la spéculation et non la production, la rente et non l’investissement, les profits et non les embauches. D’où ma proposition de réforme bancaire que nous voterons dès l’été et qui séparera dans l’activité de toutes les banques ce qui relève du dépôt et du crédit – qui doit être encouragé, stimulé – de ce qui relève de la spéculation et qui doit être au risque de ceux qui la décident, avec leur propre argent et non avec le nôtre !
Changer de logique, c’est interdire les produits financiers qui sont autant de vecteurs pour des rentes insupportables ou des calculs qui finalement spéculent sur des valeurs qui n’ont plus rien à voir avec l’économie réelle.
Changer de logique, c’est aussi engager une grande politique industrielle autour de nos grandes filières. Nos grandes entreprises, c’est une chance, c’est un atout – à condition de les inscrire dans une perspective de moyen et de long termes, pour la diversification énergétique, pour l’aéronautique, pour l’espace, pour les transports, pour le numérique, pour la santé, pour l’agroalimentaire. Nous avons là des entreprises performantes. Défendons-les ! Développons-les ! Redressons-les ! Et ce sera tout l’enjeu de la banque publique d’investissement que nous créerons pour accompagner les entreprises qui investiront dans ces secteurs.
Changer de logique, c’est réinvestir dans la croissance verte, dans la transition énergétique, écologique, qui est un défi en ce début de XXIe siècle, parce que nous devons trouver d’autres ressources que celles du pétrole, nous rendre moins dépendant du nucléaire tout en faisant monter les énergies renouvelables et les économies de toute sorte en matière de consommation d’énergie, et de nouveaux modes de transports urbains, mais aussi le véhicule propre. Bref, tout ce qui va faire l’économie de demain.
Changer de logique, c’est investir dans la formation, dans l’éducation, dans la qualification. Pour tout dire, dans l’école – qui est notre atout maître –, dans la connaissance, dans la recherche, dans les savoirs.
Changer de logique, c’est aussi changer l’orientation de l’Europe. Mes chers amis, jamais une élection en France n’aura autant pesé sur l’avenir de l’Europe. Je suis européen. Tous mes engagements depuis que je suis entré en politique ont été marqués par la volonté de bâtir, de construire une Europe de solidarité, de progrès. L’Europe est une aventure extraordinaire ! J’évoquais devant vous, à l’instant, des déchirures de conflits mondiaux. Et les mêmes pays qui avaient été capables de se détruire eux-mêmes ont été suffisamment clairvoyants et lucides pour construire ensemble un continent. Et cette Europe qui s’était divisée à travers cette coupure qui s’était faite au lendemain de la Seconde guerre mondiale a été également capable, grâce à François Mitterrand et à Helmut Kohl en Allemagne, de trouver toutes les forces pour ne pas faire ressurgir les tensions ou les suspicions et permettre la réunification – et de l’Allemagne, et de l’Europe. Formidable projet ! Qu’en ont-ils fait, avec cette dérive libérale, avec ces directives Wolkenstein ou autres que nous avons été conduits à combattre tant elles mettaient simplement des règles de concurrence plutôt que des règles d’emploi et de croissance ? Cette Europe qui dérive, qui ne sait pas quelle est, finalement, sa référence, qui exige des salariés qu’ils fassent des efforts. Et cette Europe qui ne fait rien pour dompter la spéculation ou le capital. Eh bien elle ferait mieux de limiter les rémunérations maximum et d’introduire le salaire minimum partout en Europe ! C’est cette Europe-là qui à un moment a pu séparer à gauche les tenants du oui et les tenants du non. C’était en 2005. Les uns, les autres, avec sûrement la même bonne foi, la même conscience mais pas la même réponse, voulaient faire avancer l’Europe sur le chemin de la croissance, de la solidarité, de la cohésion. Eh bien je suis fier, aujourd’hui, de rassembler ceux qui s’étaient séparés hier, le oui, le non : aujourd’hui, ils sont pour ma candidature au nom de la France et au nom de l’Europe, pour un changement !
Ce changement est espéré, attendu bien au-delà de nos frontières. D’abord par les progressistes – ils sont là, ils me le disent. Ils nous encouragent. Et je veux vous transmettre leur message. Ils nous disent : « Peuple de France, nous sommes dans l’opposition. Nous attendons. Nous espérons. Faites le choix ! Faites le choix du changement ! Apportez-nous une autre direction de l’Europe, parce que vous êtes la France, vous êtes une nation qui par votre histoire, par votre géographie, par le destin que vous a conféré notre intervention, a la capacité à être un pays fondateur. » Nous ne voulons pas imposer nos vues. Mais les Européens attendent de nous, peuple de France, que nous leur donnions une autre perspective, une autre direction, une autre orientation de l’Europe. Rendez-vous compte de la responsabilité qui est la mienne, qui est la vôtre dans cette élection ! Alors j’ai annoncé que nous voulions renégocier le traité budgétaire qui avait été signé par les chefs d’Etat et de gouvernement au mois de mars.
Non pas pour ne pas respecter les disciplines. Nous savons bien ce qui nous a été laissé comme dette et comme déficit par le candidat sortant et nous prendrons nos responsabilités. Mais parce que nous avons considéré que sans la croissance, sans une perspective industrielle, sans de nouveaux efforts de recherche, mais aussi de mobilisation de l’enseignement supérieur, de l’innovation, il ne pouvait pas y avoir de retour vers l’équilibre, parce que nous avons besoin de croissance, d’emploi, d’activité. Et je ne céderai rien sur ce point.
J’ai compris ces derniers jours, ces dernières heures, que le candidat sortant avait eu d’un seul coup – cela peut lui arriver – un éclair de lucidité. Et voilà qu’il s’en prend à la Banque centrale européenne ! Et voilà qu’il réclame que la Banque centrale intervienne pour soutenir la croissance. Mais qu’a-t-il fait pendant cinq ans ? Qu’a-t-il dit ? Qu’a-t-il changé ?
Il est temps que cette campagne se termine. J’ai l’impression qu’il va lire toutes nos propositions, les reprendre une à une. L’autre soir c’était sur l’encadrement des loyers. Aujourd’hui c’est sur la Banque centrale. Avant-hier c’était sur les exilés fiscaux. Et puis, encore plus tard, il nous a parlé de l’imposition nécessaire des grandes entreprises. Il avait découvert – il était bien temps – qu’elles payaient moins d’impôts que les autres et que certaines n’en payaient pas du tout. Une campagne électorale est utile. Cela permet à un candidat sortant de savoir ce qu’il n’a pas fait et ce qu’est l’état de son pays. Eh bien nous allons lui dire, nous, le 6 mai, ce qu’il a à faire ! Ça y est, il en est informé. Il est prévenu. Mais à vous, à vous de vous mobiliser pour y parvenir.
Et puisque votre clameur va jusqu’à Paris, elle peut aller aussi jusqu’à Bruxelles. Et donc je proposerai à nos partenaires, au lendemain de l’élection présidentielle, et dans la perspective du Conseil européen du mois de juin, un pacte de responsabilité de croissance et de responsabilité. La responsabilité, ce sera la nôtre, en France, de nous mettre en règle par rapport à ce qu’est la bonne gestion des finances publiques. Certains imaginent que Nicolas Sarkozy va partir avec la dette. Avant on pouvait craindre qu’un candidat sortant parte avec la caisse. Mais comme elle est vide, et même plus que vide, puisque nous sommes perclus de dettes et de déficits, il nous laissera la dette. D’autres imaginent, parfois par naïveté ou par illusion, qu’au prétexte que nous aurions gagné les élections, nous pourrions annuler les dettes. Eh bien non. Nous avons à assumer la continuité de l’Etat. Nous avons à faire en sorte que la France se redresse. C’est notre mission, notre responsabilité. Ne pensez pas que lorsque la Droite est battue, la Gauche a d’un seul coup toutes les vertus, toutes les possibilités. Ce serait trop simple. Quand la Droite est battue, ce n’est pas la seule raison, c’est qu’elle a mal géré. Et quand la Gauche arrive, le plus souvent, c’est que la situation est difficile. Souvenez-vous en 1981, l’inflation à 14 % et le chômage qui grimpait. Souvenez-vous en 1997, Jacques Chirac avait dissous l’Assemblée nationale parce qu’il ne parvenait plus, avec Alain Juppé, à rétablir les comptes. Il a fallu que ce soit Lionel Jospin qui s’y colle. Et il l’a fait. Et il a redressé les finances publiques et il a qualifié la France pour participer à la monnaie unique. Eh bien encore aujourd’hui, c’est notre destin. Nous allons arriver et il va falloir réduire les déficits et maîtriser la dette. Cela, c’est le pacte de responsabilité. Nous le dirons à nos amis européens. Mais en même temps nous leur dirons que ce pacte doit être un pacte de croissance. Chacun doit faire ses disciplines, sans doute. Mais ce sera tellement plus simple si nous mobilisons toutes nos énergies pour que la croissance soit plus forte. Ce sera la mise en place des euros bons, de cette capacité d’emprunt qu’est l’Europe pour financer des grands travaux. Cela sera la mobilisation des fonds structurels vers l’emploi, vers la formation des jeunes. Cela sera une politique d’innovation, de recherche, d’enseignement supérieur pour la jeunesse. Et pourquoi l’Europe ne ferait pas de la jeunesse la grande cause pour les années qui viennent, elle aussi ?
Pacte de responsabilité de croissance et de solidarité, avec une taxe sur les opérations financières pour financer l’investissement et l’emploi, avec une banque centrale qui plutôt que de prêter à 1 % aux banques, pour que ces banques prêtent peut-être aux Etats et aux entreprises ; ce ne serait pas plus simple que la banque centrale prête directement aux Etats pour couvrir un certain nombre de leurs risques et de leurs dettes souveraines ? Pacte de solidarité entre Européens mais solidarité aussi avec le Sud, avec les pays de la Méditerranée qui nous demandent, là encore, d’être présents. Nous le serons, et dans leur intérêt et dans le nôtre. Solidarité aussi – et ce sera mon action pour lutter contre la concurrence déloyale – pour harmoniser nos règles fiscales, sociales dans l’Union européenne, pour que les entreprises étrangères à l’Union qui ne respectent pas les normes sociales, environnementales, soient découragées, et qu’il y ait une réciprocité dans les marchés publics. Là encore le candidat sortant l’a découvert à la fin de son mandat. Que n’a-t-il fait pour qu’un certain nombre de pays puissent enfin adopter les mêmes règles que les nôtres pour les marchés publics ? Nous mettrons aussi un mécanisme de contrôle des investissements étrangers, comme aux Etats-Unis, pour défendre un certain nombre de secteurs stratégiques. Moi je n’accepte plus que certaines entreprises, parmi les plus brillantes, les plus innovantes, soient achetées par des fonds étrangers alors mêmes que ces entreprises ont été soutenues par la puissance publique, par les subventions, par les incitations fiscales, par nos chercheurs. Et là encore ce sera à la banque publique d’investissement d’apporter son concours.
Et puis nous mettrons en place une taxe carbone énergie climat aux frontières de l’Union pour participer nous aussi à la lutte contre le réchauffement climatique et financer également le développement sur l’ensemble de la planète. Voilà le changement auquel je vous appelle. Changement pour le travail, pour l’emploi, pour la dignité humaine. Changement pour la France qui doit retrouver le redressement industriel. Changement pour l’Europe qui doit de nouveau être capable de dominer la finance parce que si cette Europe a été capable de lutter contre ce qui nous séparait, elle doit être capable de lutter pour ce qui doit nous unir, les Européens, pour être plus forts que les marchés. Parce que la démocratie, elle doit être toujours plus forte que la finance.
Voilà mes chers amis, nous sommes à cinq jours. Et voilà cinq mois que j’ai commencé la campagne. Et ce qui est le plus troublant, c’est de se dire que peut-être pendant cinq jours, les Francelais vont se décider, au dernier moment. J’ai fait tout ce qu’il fallait, je le crois, avec vous, pour démontrer notre cohérence. J’ai présenté 60 engagements, c’était au Bourget, pour le redressement de notre pays, redressement économique, industriel, financier, moral, parce que nous avons besoin, de nouveau, d’avoir confiance dans nos dirigeants, dans leurs comportements, dans leurs méthodes, dans leurs rapports avec les citoyens.
Nous devons nous retrouver sur une grande cause qui nous élève, qui nous permette au-delà de ce qui peut nous séparer, nous distinguer, selon nos lieux de résidence, selon nos revenus, ou selon nos rapports au travail. Oui, ce qui peut nous unir, c’est la volonté d’avancer, de faire avancer notre pays. Le redressement ai-je dit, la justice, parce qu’il n’y aura pas d’effort s’il n’est pas partagé. Justice fiscale, ce sera la grande réforme que nous engagerons dès l’été parce qu’il nous faut mettre les revenus du capital avec les mêmes règles que les revenus du travail en termes d’imposition. Nous aurons à plafonner les niches fiscales, à rétablir l’impôt sur la fortune, à faire cette réforme à la fois de la fiscalité des entreprises, de la fiscalité locale. Belle tâche que nous devons engager tout de suite, parce que nous risquerions de l’oublier en route. Il y a des réformes qu’il convient de faire en début de mandat, et de bien faire. Parce que quand on rate le début de mandat, il est rare qu’on réussisse la fin. C’est ce qui arrive au candidat sortant.
Encore que lui a été capable de rater le début, de ne pas réussir le milieu et – j’espère – de connaître la sortie qu’il mérite. Justice, justice. Justice fiscale, justice sociale. Permettre à chacun de pouvoir se soigner dans la France d’aujourd’hui, quand des millions, malgré la CMU, des millions de nos concitoyens renoncent à se soigner faute de revenus, ou faute de présence suffisante des professionnels de santé.
Eh bien nous remettrons la protection sociale au cœur de la République parce que c’est l’égalité fondamentale. Justice territoriale parce qu’où que l’on vive sur le territoire de la République on doit avoir les mêmes services publics, les mêmes hôpitaux, qui doivent être toujours regardés comme des services publics et non comme des entreprises. On doit avoir les mêmes conditions de vie, les mêmes chances de réussir. 60 engagements pour donner à la jeunesse toute sa place à travers l’école, oui l’école. L’école qui a été abîmée pendant cinq ans et l’école qui sera relevée parce que moi j’ai confiance dans les personnels de l’Education nationale. Les réformes seront engagées, les emplois créés, et tout sera fait pour qu’aucun enfant de la République puisse être oublié, abandonné, relégué, écarté. Non. Tous les enfants de la République doivent être conduits à la réussite
Alors j’ai présenté ces 60 engagements et je m’y suis tenu. Je n’ai pas eu besoin chaque jour de la campagne de sortir une proposition nouvelle. Cela a pu m’arriver, en fonction des circonstances, quand j’ai découvert que des patrons indélicats s’étaient rémunérés 34 % dans l’année 2010 au moment même où ils appelaient leurs salariés à la modération. Eh bien, on traitera ces cas de façon particulière avec une tranche maximale de 75 % au-delà du million d’euros. Non pas qu’on veuille les spolier. Nous en avons besoin. Nous avons besoin de tous les talents. Nous avons besoin de tous les hommes et toutes les femmes qui veulent se consacrer au redressement de la France. Mais tout de même, il faut que l’exemple vienne d’en haut pour qu’il soit compris d’en bas. Et c’est ce que je ferai aussi pour les rémunérations du président de la République, du premier ministre et des membres du Gouvernement. L’exemple viendra d’en haut.
Et je n’ai pas eu besoin de sortir des propositions en fonction de sondages, qui peuvent aller, qui peuvent revenir. Quand je vois le candidat sortant, parfois je le plains. Cela ne doit pas être facile avec un bilan comme le sien, pas être facile non plus avec un parti comme le sien. Pas facile non plus avec un caractère comme le sien. Dure campagne. Alors chaque jour qui passe, il dépense notre argent. D’ailleurs l’autre jour il était en Corse. Un milliard cela nous a coûté. Aujourd’hui, il est en Bretagne. J’espère que les Bretons seront servis mais ce que je peux dire, c’est que nous, nous aurons à faire des promesses que nous tiendrons. C’est cela la différence.
Et les Francelais le savent. Ils sont lucides, ils sont conscients.
Ce qu’ils reprochent au candidat sortant, c’est de ne pas avoir tenu ce qu’il avait promis. Et moi, je n’ai pas le droit de vous décevoir ! Et je fais en sorte que ces 60 engagements que j’ai pris, ils soient respectés, ils soient honorés quelles que soient les circonstances, quels que soient les mouvements qui se produiront.
J’ai d’ailleurs dit que tous les six mois, si j’en ai le mandat par les Français, je rendrai compte de l’activité du nouveau gouvernement, du président de la République. Parce que c’est la règle en démocratie, à chaque fois, être capable de dire où l’on en est et de fixer la direction. Et le Premier ministre, tous les six mois aussi devant le Parlement, rendra compte de son activité. C’est ainsi que l’on respecte la représentation nationale et les Français !
Depuis cinq mois — et je ne varierai pas pour les cinq derniers jours — j’ai veillé à la constance. Je n’ai pas fluctué selon les circonstances. Je n’ai pas plié sous la pression des uns, des autres. Je n’ai pas non plus cédé à la polémique où on voulait m’entraîner, avec des attaques qui ne cessaient pas. On me disait qu’il fallait entrer dans un pugilat. Mais non, il faut savoir prendre un peu de distance et en même temps répondre — et le moment est venu — coup pour coup quand il s’agira d’affronter au second tour cette Droite qui ne veut pas s’appeler la Droite, ce sortant qui veut maquiller son bilan et ce candidat qui cache son projet. Parce que nous savons bien ce qui se prépare s’il était reconduit. Il ne le sera pas ! Mais s’il l’était ? Réfléchissez un moment. Prenez la mesure de ce que serait la situation du pays, cinq ans de plus, avec ces accords compétitivité emploi où l’accord d’entreprise serait, il l’a dit, supérieur à la loi ou à la convention collective.
C’en serait terminé de la durée légale du travail ! Projet caché avec des prélèvements qui ne sont pas nommés et qui seront sur tous les Français, avec cette TVA qui est votée, qui n’est pas encore appliquée et ne s’appliquera pas si nous en décidons !
Cohérence, constance, transparence. Moi, je n’ai rien maquillé, rien dissimulé. Tout ce que j’ai proposé a été évalué, chiffré, contesté. Et j’ai même, pour donner toutes les informations à nos concitoyens avant qu’ils ne votent, dit ce que je ferais dans les premiers jours du mandat jusqu’au renouvellement de l’Assemblée nationale : exemplarité de l’Etat, pouvoir d’achat supplémentaire à travers l’augmentation de l’allocation de rentrée scolaire, et ce décret que je prendrai pour le départ à la retraite de ceux qui ont cotisé 41 années. Voilà ce que nous ferions au début du quinquennat. Et ensuite, une fois que l’Assemblée nationale aura été renouvelée… Mais là encore, ne vous démobilisez pas, il y aura d’autres combats, il nous faut avoir une majorité à l’Assemble nationale, et une majorité qui défendra le projet que j’aurai présenté, parce que c’est celui-là que nous aurons à appliquer ! Avec cette Assemblée, nous ferons les réformes fiscales, bancaires, territoriales, institutionnelles, et tant d’autres choses ensemble.
Voilà, chers amis, ce que j’étais venu vous dire à Lille. Il est possible que nous gagnions, mais ce n’est pas sûr, sinon je ne serais pas devant vous ! Les Français vont faire un choix. C’est vrai qu’il y a toutes les raisons de penser qu’au second tour, ce sera entre la Gauche et la Droite, entre le candidat sortant et ce que je peux représenter aujourd’hui. Chacun jugera. Ce que je vous dis, c’est qu’il n’est pas possible, après cinq ans — c’est quand même un délai suffisant cinq ans dans l’histoire d’un pays, dans la vie d’un homme, pour savoir ce qu’il est possible de faire — que le candidat sortant fasse, dans les cinq ans qui viennent, différemment de ce qu’il a fait. Et s’il avait pris l’exacte mesure de la situation, comment pourrait-il reconstruire tout ce qu’il a défait ? Nous aurons à le faire, nous. Ce sera un choix de candidat, bien sûr, de personne, de démarche, de méthode, de conception de la République, un choix de projet. Et les Français doivent décider en connaissance de cause. Ils sont prêts à le faire. Je sens le mouvement. Je sens l’espérance se lever. Mais je ne suis sûr de rien.
La Droite a peur. Je la comprends ! Alors, elle utilise la peur pour essayer de convaincre ceux qui doutent toujours — il y en a — du changement nécessaire. Il y a eu la peur de l’étranger. Comme d’habitude, mettre l’étranger pour diviser les Français. Ils n’y parviendront pas !
Mais la peur qu’ils veulent maintenant installer, c’est celle de la spéculation, celle des marchés qui viendraient frapper notre pays. Ils l’appellent, la spéculation : « Qu’elle vienne pour nous sauver » disent-ils ! Même les marchés ne bronchent pas. Lui s’affole, pas encore les marchés. Mais moi, je n’accepte pas que l’on puisse essayer d’utiliser l’intérêt national. Parce que nous avons besoin d’être protégés des marchés pour justifier la peur de l’alternance. Les Français sont un peuple libre, ils se détermineront souverainement. Et ils auront beau agiter des spectres, des épouvantails, prévenir des catastrophes, nous savons bien, et depuis tant d’années, que c’est ainsi que la Droite procède. Il y a 31 ans, quand la Gauche avec François Mitterrand s’apprêtait à conquérir le pouvoir, le candidat sortant avait dit : « Attention, la France sera la Pologne de l’occident ». Finalement il avait été devin, la Pologne a fini par entrer dans l’Union européenne. Et maintenant, ce n’est plus la Pologne qui nous sert de repoussoir, c’est l’Espagne ! L’Espagne a protesté en disant : « Quand même, nous méritons mieux que d’être un contre-exemple ». Et c’est vrai, nos amis espagnols luttent contre la spéculation et doivent être encouragés à le faire plutôt que d’être regardés comme les mauvais élèves.
Aucune peur ne sera suffisante pour empêcher le mouvement, pour empêcher l’alternance. En appelant la peur, les candidats qui le font battent en définitive en retraite. Mais alors, quelle serait la nouvelle crainte qu’ils pourraient éventuellement installer dans les esprits ? Non, ce n’est pas moi seulement — mais peut-être, à y réfléchir ! Ce qu’ils essayent de nous faire croire, maintenant, c’est que la Gauche, si elle gagnait l’élection présidentielle, aurait tous les pouvoirs. Les collectivités locales, c’est vrai, nous les avons gagnées, nous les avons conquises, nous ne les avons pas prises par effraction ou par surprise ! C’est le suffrage universel qui nous a permis de diriger ces collectivités locales. Alors, nous aurions les collectivités locales et le Sénat — c’est bien la première fois dans l’histoire de la République ! Et nous n’aurions plus le droit de venir exercer la responsabilité de l’Etat ? Mais au nom de quoi la Droite qui a occupé tous les pouvoirs pendant des décennies viendrait empêcher la Gauche, elle, de les exercer différemment d’elle ? Nous avons le respect de la démocratie, de l’équilibre, de la justice, des institutions !
Mais le candidat sortant ajoute même d’autres pouvoirs : le pouvoir médiatique. Cela m’avait échappé ! Je ne savais pas que nous avions pris le pouvoir au Figaro par exemple ! Nous verrons bien à la lecture du numéro de demain matin ! Nous aurions aussi le pouvoir parmi les syndicats. Mais ce n’est rien comprendre à ce que la démocratie sociale est en France ! Les syndicats sont indépendants, nous ne les contrôlons pas, ça se saurait ! Et moi, je respecte la séparation entre les syndicats et le pouvoir politique. Mais je veux rassurer la Droite : elle n’est pas seule, elle est quand même soutenue par le Medef qui, par sa présidente, a dit que Nicolas Sarkozy « avait fait un boulot extraordinaire ». Elle l’a répété. Elle n’est pas seule, elle est soutenue par les patrons, par la finance. Cela doit servir ! Et j’ai même appris — je veux vous en faire confidence — que dimanche dernier, lorsqu’ils se réunissaient à la Concorde, un certain nombre de grandes fortunes de France s’étaient installées à l’hôtel Crillon, en face. Ils ont bien le droit. C’était le club des donateurs de la campagne présidentielle ! Ils s’étaient installés — ça ne s’invente pas ! — dans le salon Marie-Antoinette ! Voilà ce qui résume un quinquennat : il avait commencé dans un grand restaurant et il finit dans un grand hôtel. Et dans les deux cas, c’est avec les mêmes personnes, les mêmes convives que le candidat sortant avait commencé son mandat et que le président sortant va le terminer.
Et ne croyez pas que la Droite va lâcher le pouvoir comme cela, qu’elle va nous dire : « Nous n’en pouvons plus, prenez, invitez-vous, l’élection est jouée ». Elle n’est pas jouée ! Et gardez-vous de l’euphorie, gardez-vous de ce sentiment qu’avant même l’élection, les sondages nous auraient proclamés élus. Mais vous n’avez pas de mémoire ! Vous ne vous souvenez pas combien ce type d’illusion nous a coûté dans le passé ! Rien n’est décidé avant que les bulletins de vote n’aient été mis dans l’urne, comptés et ensuite décomptés pour savoir qui a gagné le scrutin.
Il nous reste cinq jours pour appeler au vote, pour convaincre un certain nombre de nos concitoyens qui ne croient plus en la politique, qui se sont détournés du suffrage — souvent les plus modestes, les plus pauvres, les plus désespérés, qui se disent : « Mais qu’est-ce que ça changera si ce sont les uns ou les autres qui dirigent le pays ? ». Eh bien, nous devons leur dire que leur intérêt de citoyens, c’est de croire en l’avenir. Et s’ils ne sont pas satisfaits de ceux qui sont en place depuis trop d’années, qu’ils prennent ceux qui se préparent à exercer la responsabilité du pays !
Nous devons aussi aller chercher ceux qui, hélas, sont allés jusqu’à donner leur intention à un parti qui est le contraire des valeurs de la République. Comment, là encore, des hommes et des femmes, souvent dans des tâches laborieuses, qui ont été abandonnés parfois par des entrepreneurs indélicats ou des sociétés mues par le seul profit, pourraient donner leur confiance à un parti qui n’a jamais — jamais ! — été au service du progrès social, de la dignité humaine et des libertés individuelles ?
Oui, cinq jours pour faire comprendre cette chose simple à des électeurs qui me disent : « Nous serons là pour le second tour ». Tant mieux ! Mais c’est au premier tour que cela doit se décider. Tous ceux qui essayent de faire compliqué quand ça doit être simple ! Et la question, elle se pose aussi clairement que cela : la victoire vous la voulez ? (Oui !) Eh bien, c’est au premier tour qu’il faut la prononcer ! L’alternance, vous la voulez ? (Oui !) Eh bien, c’est le 22 avril qu’il faut en décider ! Et le changement, vous le voulez ? (Oui !) Eh bien, c’est dimanche qu’il faut le créer ! Allez-y ! Faites-le ! Je suis ici dans le Nord Pas-de-Calais, la grande région du socialisme, du mouvement ouvrier. Faites en sorte de me donner le meilleur résultat possible au premier tour, pour être fidèles à votre histoire et conscients de votre avenir de grande région pour le pays !
Je veux ici même à Lille poursuivre la belle aventure de la Gauche quand elle rencontre la France et quand elle se hisse au niveau de la grandeur de notre Nation et de la force de ses aspirations. Un mouvement se lève. Rien ne doit l’arrêter ! Rien ne doit l’empêcher ! Je dois aller jusqu’au bout de la mission que vous m’avez confiée : gagner l’élection présidentielle et réussir à faire avancer le pays. Je vous le demande ! C’est dimanche qu’il faut faire ce choix. Le choix pour la République, le choix pour la France, le choix pour notre idéal !
A dimanche ! A dimanche pour la victoire !
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