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06 janvier 2012

François Fillon ouvre le "Nouveau Monde" organisé par Eric Besson : tout un programme

Éditorial de lucienne magalie pons



Si vous avez le temps de vous plonger  dans le discours fleuve  prononcé par le Premier Ministre François Fillon en ouverture  du colloque « Nouveau Monde » organisé par Eric Besson, Ministre   de l’Economie, des Finances et de l’Industrie, à  Paris, le 5 janvier 2012, munissez vous d’une bouée de sauvetage pour ne pas vous y noyer.

Copié/collé  du discours d’ouverture de François Fillon

Messieurs les Premier Ministres,
Madame la Vice-Premier Ministre,
Mesdames et Messieurs les ministres,
Mesdames et Messieurs,

C’est un plaisir d’ouvrir à nouveau ce colloque, qui est devenu, Cher Eric, un rendez-vous incontournable, un rendez-vous ouvert et stimulant.

Je souhaite la bienvenue à tous ceux qui sont venus de loin pour réfléchir avec nous au monde qui est en train de se dessiner.

L’année dernière, j’évoquais ici le basculement de l’économie mondiale vers l’Est et vers le Sud. Ce n’est pas un hasard si mes derniers déplacements m’ont conduit en Corée du Sud et au Brésil. C’est une évidence désormais, l’Asie, l’Amérique latine mais aussi l’Afrique seront désormais sur le devant de la scène.

En 2011 s’est posée la question de la place de l’Europe dans le monde de demain.

La crise des dettes souveraines lance à l’ensemble de la civilisation occidentale de nouveaux défis : celui de se réformer, de repenser son mode de vie et ses modes de gouvernance pour qu’ils soient soutenables sur le long terme.

Plus largement, cette crise interroge l’avenir du capitalisme dans son fonctionnement actuel : comment maîtriser collectivement ses forces contraires pour ne pas sombrer dans l’égoïsme? Comment prendre en compte les ressources rares ? Comment concilier les logiques du capital et du travail ? Comment éviter le creusement des inégalités ?

Comment, pour nous Français, préserver la protection sociale à laquelle nous tenons ?
Pour répondre à cet impératif, nous avons placé la compétitivité au cœur de notre action.

Au cours de ces dernières décennies, notre modèle social a été fragilisé par une série de décisions incongrues, à commencer par la retraite à 60 ans au début des années 80, au mépris des données démographiques ; le passage aux 35 heures au tournant des années 2000, au mépris des évolutions engendrées par la montée en puissance des pays émergents.

Pendant ce temps, notre principal partenaire commercial, l’Allemagne, engageait des réformes structurelles majeures.
Sous couvert de progrès social, ces décisions ont fragilisé les acquis des décennies précédentes.
Alors que nos exportations croissaient à la fin des années 90 au même rythme que celles de l’Allemagne, c’est à dire plus de 8 % par an, et que les exportations allemandes ont continué à croître sur la période 2001-2007 à un rythme annuel d’environ 7,5 %, les exportations françaises n’ont progressé qu’à hauteur de 2,4 % par an pendant cette période.

Le résultat, c’est qu’en 2009, les exportations françaises ne représentaient plus que 40 % de celles de l’Allemagne, alors qu’elles en représentaient près de 60 % en 2000. Dans le même temps, entre 2000 et 2009, la population active industrielle en France a diminué en France de 535 000 emplois.

Avec le Président de la République, nous n’avons jamais cru à une France sans usines. La France a été et doit rester une terre de production.

C’est pour cela que nous avons fait la réforme de la taxe professionnelle, cet impôt qui pesait sur les investissements des entreprises pour financer les collectivités locales, une réforme qui a été si difficile à faire accepter aux collectivités locales. Qui a été évidemment critiquée par l’opposition mais qui était tout simplement indispensable, et d’ailleurs que, je le note, personne n’envisage de remettre en cause.

C’est pour cela que nous avons triplé le crédit d’impôt recherche, ce qui a permis à la France d’être le premier pays en Europe pour le nombre d’emplois créés par des implantations de centres de Recherche et de Développement d’entreprises étrangères.

C’est pour cela que nous avons décidé de créer le Fonds stratégique d’investissement, qui depuis sa création, investit directement dans 58 entreprises employant 80.000 personnes en France, pour un total de près de 3 milliards d’euros.

A un moment où les investisseurs institutionnels privés se retiraient, ce fonds a permis aussi d’apporter en plus 3,1 milliards d’euros de fonds propres à quelques 1.500 entreprises via ses investissements dans des fonds partenaires.

C’est aussi pour cela que nous avons rendu nos universités autonomes, multiplié les pôles de compétitivité sur notre territoire, et enfin en pleine crise des dettes souveraines, investi 35 milliards d’euros dans l’enseignement supérieur, la formation et la recherche, pour soutenir les secteurs qui porteront demain l’avenir de notre économie française.

Ce programme a déjà permis, à l’heure où nous parlons, d’attribuer un peu plus de 17 milliards d’euros à des projets qui n’ont été sélectionnés que sur un seul critère : leur excellence.

Qu’est-ce que nous disent aujourd’hui tous les rapports sur la compétitivité de la France ?

Que le coût du travail est trop élevé dans notre pays, en particulier parce que les charges qui pèsent sur les salaires sont trop lourdes. Je ne prétends que cela soit le seul problème de notre compétitivité, mais ce problème de coût doit être abordé de front, et il doit l’être dans le cadre d’une réflexion globale sur l’organisation du travail, sur l’optimisation de la dépense publique, sur la réduction des déficits, sur la formation, parce que tout cela se tient.

Quel est la nature de l’enjeu?

A partir de la fin des années 90, la France a vu ses coûts salariaux progresser plus rapidement que ceux de ses voisins. Les coûts salariaux horaires en France, plus faibles d’environ 15 % en 1998, ont progressivement rattrapé ceux de l’Allemagne dans l’industrie manufacturière.

C’est encore plus visible dans le secteur des services aux entreprises. Les coûts salariaux horaires, comparables à la fin des années 1990, étaient en 2008 25 % plus bas en Allemagne qu’en France.

Lors de ses vœux, il y a quelques jours le Président de la République nous a invités à poursuivre notre politique en matière de baisse du coût du travail.

A quatre mois des élections présidentielles, la vérité m’oblige à dire que bien des Gouvernements seraient dans ces circonstances tentés de mettre plutôt le pied sur le frein, plutôt que d’engager une réforme de cette importance.

Mais je veux dire que les circonstances économiques ne nous permettent pas de nous mettre dans une position d’attentisme avant le débat présidentiel.

Et l’honneur de la politique c’est d’agir pour la France jusqu’au terme du quinquennat.
L’honneur de la politique c’est d’ouvrir des débats de fond avec les acteurs économiques et sociaux, sans crainte de livrer ses convictions et de les appliquer.

Nous avons décidé d’engager la réforme du financement de notre système de protection sociale. Ce sera l’un des thèmes du sommet de crise du 18 janvier avec les partenaires sociaux.

Dans le contexte économique que nous connaissons, il n’est plus cohérent, il n’est plus acceptable de faire porter sur le seul travail le poids du financement de toute la protection sociale.

Notre système de financement est né dans une période qui était une période faste, où notre croissance permettait de remplir les caisses. Mais aujourd’hui, la croissance suit un rythme bien inférieur à celui de l’augmentation des dépenses sociales.

Dans notre monde ouvert, où le libre-échange est la règle, est-ce que nous pouvons continuer de faire payer la protection sociale par le seul travail des Français sans mettre à contribution les produits que nous importons ou d’autres sources de financement ?

C’est ainsi qu’est née l’idée de TVA que certains appellent "sociale", quand d’autres préfèrent appeler "anti délocalisation". Je veux dire qu’il n’est pas besoin de se quereller sur des mots. Et d’ailleurs tout ne se limite pas nécessairement à la TVA.

Depuis 10 ans, on débat, à droite comme à gauche, de cette question de l’élargissement du financement de la protection sociale, mais sans jamais oser trancher.
Pourquoi ? Parce que l’on oppose de façon factice le travail et le pouvoir d’achat ; la production et la consommation. Or, au bout du compte, un emploi en moins c’est du pouvoir d’achat en moins et c’est donc de la consommation en moins.

Depuis 2000, alors que nos exportateurs sont en concurrence avec les produits allemands sur pratiquement 90 % des marchés, l’Allemagne a diminué les prélèvements sur le travail de 2,3% du produit intérieur brut par rapport à notre pays.
Oui, nous devons faire évoluer l’assiette sur laquelle évolue, repose le financement d’une partie de notre protection sociale en cherchant à l’élargir et en cherchant à la rendre plus favorable à la compétitivité de nos entreprises sur les marchés internationaux.

Je veux dire qu’à ce stade toutes les options sont ouvertes.

Nous ne devons nous interdire aucun débat, et nous avons besoin d’entendre les arguments des partenaires sociaux.

Mais je veux aussi le dire solennellement devant vous ce matin, notre but est clair : notre fiscalité doit favoriser la création d’emplois productifs sur notre territoire !
Nous allons discuter de tous ces sujets le 18 janvier. Nous déciderons ensuite à la fin du mois de janvier. Et la réforme du financement de la protection sociale sera soumise au Parlement au mois de février.

L’emploi sera évidemment au cœur de ce sommet social du 18 janvier. Il faut dire qu’en période de croissance, la France ne s’est jamais distinguée par des très bons chiffres en la matière, et évidemment en période de crise nous accusons encore plus le coup.

Pas à pas nous approchons de ce que l’on a appelé une flex-sécurité qui est encore à parfaire et qui ne donne pas encore tous les résultats escomptés.

Depuis 2007, nos réformes structurelles cherchent à rendre notre marché du travail plus favorable à la création d’emplois. C’est le sens de la loi de 2008 qui a notamment créé le mécanisme de ruptures conventionnelles. C’est le sens de la réforme de 2009 de notre système de formation professionnelle, et de la réforme des instruments d’accompagnement des mutations économiques, qui a créé le contrat de sécurisation professionnelle.

C’est l’objet de notre politique de maîtrise du coût du travail et d’incitation au retour à l’emploi avec le Revenu de Solidarité Active.

C’est enfin la priorité que nous avons accordée à l’alternance, qui est la voie d’insertion professionnelle durable la plus efficace pour les jeunes.

Ces réformes ont commencé à produire des résultats, même si je suis bien conscient de leurs limites.

Au cœur de la crise de 2008/2009, notre économie a détruit moins d’emplois que nous ne l’avions anticipée, et elle a même créé sans doute plus d’emplois qu’elle ne l’aurait fait par le passé à croissance égale. Mais depuis quelques mois, le ralentissement de l’activité pèse à nouveau sur le marché du travail. Et donc nous avons le devoir de poursuivre et d’amplifier le travail de réforme structurelle qui a été engagé.

La priorité, c’est d’abord de prévenir les suppressions d’emplois !

Nous devons donner les moyens aux partenaires sociaux d’adapter l’organisation du travail dans leurs entreprises aux évolutions de l’environnement extérieur. Cette souplesse est indispensable pour préserver l’emploi dans les périodes difficiles, ou dans les périodes de forte augmentation de la demande comme c’est par exemple le cas aujourd’hui dans le secteur aéronautique.

C’est la raison pour laquelle nous allons mettre sur la table du sommet de crise du 18 janvier la question des accords de compétitivité dans les entreprises.

Le recours à l’activité partielle a été essentiel lorsque nous l’avons mobilisé il y a deux ans avec les partenaires sociaux. Il reste cependant perfectible, à la fois dans les modalités de son déclenchement et dans son financement. Nous devons aussi accélérer le retour à l’emploi et dans les meilleures conditions possibles.

C’est l’objet des contrats aidés, qui cherchent à maintenir un lien direct entre le demandeur d’emploi et l’activité.

Nous devons aller plus loin.

Nous souhaitons enfin renforcer la formation professionnelle des demandeurs d’emploi.
Chaque année, un peu plus de 500.000 demandeurs d’emplois participent à des formations. C’est insuffisant, ce système doit être amélioré, il doit bénéficier à davantage de demandeurs d’emploi et les formations doivent être plus en adéquation avec les besoins du marché.

Mesdames et Messieurs,

Aucune des nations européennes ne peut prétendre pouvoir se sortir seules de la crise actuelle. Le temps est donc venu de poser les fondations d’une Europe plus rigoureuse et en même temps d’une Europe plus solidaire.

Nous devons refonder l'euro, et convaincre nos partenaires et les investisseurs que nous avons bien tiré toutes les leçons de la crise que nous affrontons.

D’abord, en défendant notre monnaie commune, comme nous l’ont fait et comme l’ont fait en particulier sans relâche le Président de la République française et la Chancelière Merkel ces derniers mois.

C’est pour préserver cette stabilité que nous nous sommes battus collectivement ces derniers mois. Nous avons mis ensemble en place, puis renforcé le fonds européen de stabilité financière. Nous avons défini et mis en œuvre des programmes d’assistance pour les Etats les plus en difficulté. A présent, nous devons bâtir sur ce socle.

Dès ce mois-ci, nous allons devoir traduire dans les textes l’accord qui a été trouvé à la fin de l’année dernière sur la mise en place d’un véritable fonds monétaire européen : nous devrons ratifier le traité établissant le "mécanisme européen de stabilité" et la révision correspondante du traité de l’Union européenne pour que ce fonds puisse entrer en service dès le mois de juillet 2012.

Dès le Conseil européen des 1er et 2 mars, nous ferons le point sur l’adéquation de la capacité de prêt prévue à 500 milliards d’euros pour faire face aux échéances de ces prochains mois en matière de refinancement des Etats membres.

Le Fonds monétaire international a également un rôle à jouer pour renforcer notre protection.

Pour la Grèce, le Portugal et l’Irlande, il a déjà fourni près de 80 milliards de dollars. Les européens ont décidé de lui apporter une capacité de frappe supplémentaire d’au moins 200 milliards d’euros, sur la base de prêts bilatéraux des Etats membres de l’UE.
Bref, l'Europe remet en ordre ses finances publiques, elle remet en ordre et son organisation avec un objectif : être plus efficace, plus réactive, plus collective, en un mot remédier aux défauts de sa conception originelle.

Tous nos efforts sont dirigés vers l'euro, auquel nous voulons donner un deuxième souffle à la fois comme moteur du marché intérieur, comme protecteur face aux chocs, mais aussi comme monnaie de réserve pour l'avenir d’un continent européen qui n'a pas dit son dernier mot.

Dans les semaines qui viennent, nous devons réussir à faire au fond tout ce qui aurait dû être fait il y a 10 ans lorsque l’euro a été mis en place. La vérité c’est que nous n’étions pas préparés à affronter la crise de 2011.

Nous nous étions dotés d’une monnaie unique sans créer les institutions politiques et financières nécessaires à sa stabilité et à sa solidité. Eh bien nous allons désormais le faire, nous allons le faire au moins à 17 avec un traité intergouvernemental auquel, je l’espère, participeront un maximum d’Etats membres de l’Union européenne.

Nous voulons franchir une nouvelle étape dans l’intégration de nos politiques économiques qui ne peuvent être conçues indépendamment les unes des autres.
Cela suppose que nous mettions en place une véritable Union budgétaire, une union budgétaire qui assure le respect des disciplines dictées par des règles d’or dans chacun des Etats membres, et des sanctions plus automatiques en cas de dépassement des cibles de déficit public.

Cela suppose aussi et cela fait plusieurs années que je le réclame, une plus grande convergence entre nos politiques sociales et nos politiques fiscales. Je pense en particulier au rapprochement des règles en matière d’imposition sur les sociétés. Je pense aussi à la mise en place d’une taxe sur les transactions financières.

Il est normal que tous les secteurs participent à l’effort collectif, y compris le secteur financier. Depuis 2008, la France a été de toutes les initiatives pour essayer de mieux réguler la finance.

Nous avons pris par souci d’équité plusieurs décisions pour que ce secteur contribue à l’effort de redressement des comptes publics. La taxe sur les bonus versés en 2010 s’inscrivait dans cette logique, comme la contribution pour frais de contrôle mise en place en 2010 pour un montant d’un peu plus de 160 millions d’euros par an.
C’est aussi le sens de la nouvelle taxe sur le risque systémique, qui a rapporté près de 500 millions d’euros l’an dernier et qui incite les banques à réduire les risques qu’elles prennent.

Mais nous voulons aller plus loin.

Et vous le savez la France n’a eu de cesse de porter l’idée d’une taxe sur les transactions financières auprès de ses partenaires. Sous notre impulsion et sous l’impulsion de l’Allemagne la Commission européenne a présenté en septembre dernier une proposition de directive.

Le Président de la République l’a évoqué la semaine dernière : nous sommes déterminés à mettre en place cette taxe en 2012.

Mesdames et Messieurs,

La mise en place du nouveau traité intergouvernemental qui transcrira l’ensemble de ces engagements est soumise à un calendrier très serré. Nous devons boucler dès ce mois-ci la négociation pour pouvoir le signer au plus tard au mois de mars. Il faudra ensuite que les Etats signataires ratifient ce traité pour qu’il puisse entrer en vigueur d’ici la fin de l’année.

Rien ne serait plus stérile dans ce contexte que de se laisser enliser dans des débats doctrinaux : souverainisme ou fédéralisme, tenants de l’Europe communautaire ou tenants de l’Europe intergouvernementale.

Tout cela est très intéressant, mais nous avons à trouver des solutions efficaces et rapides, qui soient considérées comme légitimes par les citoyens dans chacun des Etats membres et par leurs représentants démocratiquement élus.

Et c’est donc en nous appuyant sur la légitimité des élus, c’est à dire des Chefs d’Etat et de Gouvernement, des parlementaires nationaux et européens, et sur l’efficacité de nos institutions - la Commission européenne et la Banque centrale européenne - que nous arriverons à trouver l’équilibre adapté à l’intégration politique et économique que nous appelons de nos vœux.

J’en suis convaincu, l’avenir de l’Europe n’est pas derrière elle !

La croissance des pays émergents ne signifie pas son déclin inéluctable, économique et géopolitique.

Vous ouvrez ce colloque sur "les valeurs" du monde de demain. Je crois que ce n’est pas un hasard.

C’est l’une des leçons de l’année 2011 qui a vu plusieurs régimes autoritaires se faire déborder par des peuples dont le goût de la liberté guidait les pas.

Naturellement, l’Histoire de la liberté n’est pas écrite, et les revers sont toujours possibles. Mais les valeurs de l’Europe, humanistes, universalistes, restent puissantes et leur rayonnement continue de faire vibrer le monde.

L’Europe a des atouts ! Nos sociétés démocratiques et ouvertes s’avèrent finalement plus robustes que les sociétés fermées, ces sociétés verrouillées que les réseaux de communication font un jour ou l’autre vaciller.

En dépit de la crise et de la concurrence internationale, la part de l’Europe dans les échanges commerciaux se maintient à plus de 26%.

L’Europe, c’est le modèle le plus achevé d’intégration régionale au monde. C’est la dynamique d’un marché de 500 millions de consommateurs, qui est le premier marché au monde et la première puissance commerciale mondiale. Ce sont des infrastructures modernes, des entreprises performantes, des pôles d’excellence scientifiques, universitaires, technologiques.

L’Europe c’est une cohésion démocratique et sociale unique au monde.

Eh bien pour toutes ces raisons, j’ai la conviction que l’Union européenne a vocation à rester l’un des espaces les plus prospères et les plus influents du XXIe siècle.

S’il se forme un nouveau monde, qui donne sa juste place à d’autres continents, cela ne signifie pas que le modèle européen soit caduc.

Il est normal que la mondialisation conduise à un mouvement de rattrapage des pays émergents ; et il est logique que ce mouvement produise des tensions.

La mondialisation, c’est l’opportunité pour des millions de personnes de sortir de la pauvreté. Et c’est, a fortiori, un défi pour les nations plus privilégiées dont l’ancienne prospérité est contestée.

Mais cette phase de rattrapage atteindra un jour son terme et les problèmes qui sont aujourd’hui les nôtres seront aussi ceux des nouveaux pays industrialisés.


En attendant, l’Europe doit prendre conscience de ses atouts et elle doit sortir de sa déprime.

La crise nous oblige à "faire mieux avec moins". Nous avons pour nous la qualité de notre capital humain, de nos infrastructures et de nos technologies. Le sommet européen du 30 janvier devra marquer une première étape dans la reconquête de la croissance, parce que l’Europe, ça ne doit pas seulement être la discipline budgétaire, aussi indispensable soit-elle.

L’Europe c’est aussi le niveau pertinent pour donner un nouveau souffle à l’innovation.

A court terme, nous devons utiliser tous les leviers européens pour soutenir l’activité, et pour amortir le choc d’une croissance faible, voire même d’une croissance négative pour les prochains mois.

Cela implique un véritable agenda européen au service de l’emploi et de la compétitivité.

Nous devons cibler les interventions des fonds européens sur ceux qui en ont le plus besoin – à commencer par les demandeurs d’emploi les plus durement frappés par la crise ou les régions les plus fragiles.

Ceci implique aussi de pouvoir mobiliser davantage les fonds structurels pour lutter contre les problèmes de financement des entreprises, et en particulier des petites et moyennes entreprises.

Nous devrons mettre en place dès 2012 certains des instruments envisagés pour le moyen terme, je pense au Fonds européen de capital-risque qui permettrait de renforcer l’activité du Fonds européen d’investissement et de concentrer son action sur les technologies clés.

Nous devons miser sur les dépenses d’avenir : l'innovation, la formation, l'industrie.
Et pour cela, il faut que nous ayons l’audace de simplifier de façon massivement la mise en œuvre des politiques européennes d’innovation et de recherche.

Après trente ans de discussions, il faut que le brevet européen, si crucial pour la compétitivité des entreprises, voie le jour. Et il faut au fond que la crise serve d’accélérateur à cette prise de décisions qui a toujours été une des faiblesses de cette Union européenne. Ca fait d’ailleurs plusieurs mois que je plaide pour que l’Europe crée un Fonds européen des brevets.

Examinons ensemble et rapidement comment mettre en place, au plan européen, des initiatives sur le modèle des "investissements d'avenir".

Il faut mettre aussi en œuvre une stratégie numérique européenne.

Il faut assurer la continuité des politiques de recherche qui engagent des travaux sur des cycles longs, en particulier pour les secteurs à haute intensité technologique et capitalistique, comme la construction aéronautique, le secteur spatial, les nanotechnologies, et le nucléaire de nouvelle génération.

Le renforcement de la compétitivité de l’industrie et des services européens passe aussi par l’approfondissement du marché intérieur : c’est le renforcement de la convergence fiscale pour éviter les transferts injustifiés de bases taxables et pour réduire les distorsions économiques liées à l’hétérogénéité des règles applicables dans les Etats membres ; c’est l’harmonisation des cadres juridiques permettant le développement d’entreprises pouvant véritablement exploiter le potentiel du marché intérieur ; c’est l’amélioration de l’accès des petites et moyennes entreprises aux marchés publics et, c’est la mise en place des outils qui assurent la protection des entreprises européennes face aux réglementations et aux pratiques déloyales de certains pays tiers.

La France porte depuis des années ce thème de la réciprocité dans les échanges internationaux. Pour mon Gouvernement, c’est une question d’efficacité économique, mais aussi une question de principe. Le marché européen est aujourd’hui l’un, sinon le ouvert du monde. C’est une bonne chose pour les consommateurs européens. Mais il est normal qu’en contrepartie, les entreprises européennes puissent disposer d’un même accès aux marchés de nos partenaires.

Le cas le plus caractéristique concerne l’accès aux marchés publics. Les marchés publics c’est près de 15 % du produit intérieur national, dans la plupart des économies, ce qui est considérable.

Or, l’accord qui était en vigueur sur ce sujet depuis 1996 n’était pas satisfaisant, parce que plusieurs pays signataires continuaient de favoriser leurs opérateurs nationaux par différents procédés. Avec François Baroin, Eric Besson, Pierre Lellouche, nous en avons fait un cheval de bataille parce qu’il n’est plus admissible de voir des entreprises européennes perdre systématiquement des marchés dans certains pays et, en même temps, être concurrencées sur leur propre territoire.

Le mois dernier, l’accord sur les marchés publics signé à Genève, et qui prévoit notamment des avancées sur l’accès au marché japonais pour les entreprises du secteur ferroviaire, montre la direction offensive à suivre.

En parallèle, il est légitime que l’Union européenne se dote d’un instrument défensif vis-à-vis des pays qui ne joueraient pas le jeu, comme la Commission européenne s’y est engagée, à l’initiative de plusieurs pays et notamment de la France.

Mesdames et Messieurs,

Dans ces temps incertains où chacun s’accorde sur la nécessité d’un nouvel équilibre mondial, l’occasion est venue pour nos pays de repenser leur rôle et de s’engager avec l’énergie et la conviction des nouveaux débuts.

En réponse aux problèmes que tous nos Etats rencontrent, repoussons ensemble ces prophètes du chaos, ces populistes qui, jouent sur les peurs, qui abaissent l’honneur du politique dont la tâche est de trouver des voies de passage entre le passé et l’avenir, entre nos nations et l’universalité de l’humanité.

En réponse au chômage et aux inégalités, je ne crois pas au protectionnisme, je ne crois pas aux lignes Maginot.

Pour les européens, cela n’a aucun sens : les deux tiers du commerce de l'Union européenne se font entre ses membres !

En revanche, il faut se donner les moyens de redonner davantage de compétitivités à nos entreprises pour que "produire en France" et "produire en Europe" soient une réalité.
Pour nous Français, cela passe par un vrai travail avec les partenaires sociaux pour sortir par le haut de nos handicaps que nous traînons encore sur le coût du travail et sur son organisation.

Je ne crois pas non plus aux retours en arrière, aux stratégies illusoires de dévaluations massives liées aux projets irréalistes de retour aux monnaies d’antan.

Je ne crois pas aux boucs émissaires, à commencer par les agences de notation qui ne sont que des indicateurs parmi d’autres. Et je veux dire qu’au demeurant, nous n’agissons pas pour elles, mais nous agissons pour notre souveraineté économique, financière et sociale.

Je crois, Mesdames et Messieurs, à la responsabilité assumée devant les erreurs du passé, je crois à la légitimité et à la gravité de la politique, et je crois à la force des projets ancrés dans les valeurs de courage et de fraternité.

Voilà le message résolu que je voulais partager avec vous.

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