Le Président de la République s'est rendu hier à Amboise pour célébrer le 100° anniversaire de Michel Debré,
Le Président de la République est arrivé à 10 h 30, dimanche matin, au cimetière d'Amboise, ou repose l'ancien Premier ministre du général de Gaulle, Michel Debré.
Il était accompagné notamment d’Yves Guéna, président de l’Association des amis de Michel Debré, et de Mme. Claude Gref, Secrétaire d’état chargée de la famille, élue de la région
Le Président de la République s’est d’abord recueilli sur la tombe de Michel Debré en présence des membres de la famille Debré, avant de prononcer au Gymnase de la ville un discours très élogieux qui retraçait les racines familiales , les études, la carrière et les actions politiques de celui qui fut notamment l’artisan de la constitution de la V° république aux côtés du Général de Gaulle, dont il fut le Premier Ministre.
Plus qu’une célébration d’anniversaire c’est un hommage solennel que le Président de la République a rendu à Michel Debré : « C'est aussi, c'est d'abord au grand serviteur de l'État que la Nation rend aujourd'hui un hommage solennel » a déclaré Nicolas Sarkozy.
Devant une assistance de quelque 2 000 personnes, composée de militants UMP, et de personnalités de la société civile et institutionnelle, réunie dans le gymnase de la ville, Nicolas Sarkozy a prononcé un long discours « gaullien » très politisé, pour célébrer Michel Debré, entrecoupé de vifs applaudissements
Plus qu’une célébration d’anniversaire c’est un hommage solennel très élogieux que le Président de la République a rendu à Michel Debré :
« C'est aussi, c'est d'abord au grand serviteur de l'État que la Nation rend aujourd'hui un hommage solennel » a déclaré Nicolas Sarkozy au cours de son intervention étoffée à plusieurs reprises de références historiques anciennes allant du Général de Gaulle pour remonter jusqu’à Jeanne d’Arc en passant par Carnot, Gambetta, et Clémenceau, pour illustrer la personnalité et les références morales et politiques de feu Michel Debré.
Nous n’entrerons pas ici dans une critique de ce que fût l’action politique de Michel Debré, nous dirons simplement que s’il est remis à l’honneur aujourd’hui et encensé aujourd’hui pour ses prises de positions et ses œuvres et actions politiques, notamment par les politiques qui se réclament du Général de Gaulle, il fût autrefois très contesté au moment des évènements de l’indépendance de l’Algérie, en effet certains commentateurs actuels prétendent qu’il fut le défenseur de l’Algérie Française, mais ceux qui ont vécu la guerre d’Algérie se souviennent que s’il était pour une certaine forme d’association avec l’Algérie , il n’a jamais soutenue l’Algérie Française et de plus qu’il a combattu ses partisans.
Mais, comme nous le savons, les politiques et les médias pseudo historiens, et pas seulement depuis la période de décolonisation, se plaisent à réviser sans cesse les faits historiques et l’Histoire de la France, au gré des changements politiques.
Pour revenir à l’intervention de Nicolas Sarkozy, elle était consacrée pour l’essentiel, à célébrer les mérites politiques et moraux de feu Michel Debré , mais il faut noter que le Chef de l’Etat a saisi l’occasion pour se placer lui-même dans le discours , - sur le ton de la confidence- , entre deux longs passages consacrés à feu Michel Debré , pour s’adresser implicitement aux Français, en parlant de « la bourrasque de la crise » , dont il a développé la gravité en soulignant « qu’il faut l’affronter, … résister, se battre ….faire preuve de courage, etc…. en annonçant dans cet impromptu qu’il dirait la vérité aux partenaires sociaux le 18 Janvier et qu’il parlera aux Français à la fin du mois, et terminant par un appel à prendre exemple sur ce que fit Michel DEBRÉ dans ces années exaltantes où se construisit réellement la France moderne.
Voici ci-dessous cet impromptu extrait de son intervention :
« Permettez-moi ici une confidence. J'ai souvent réfléchi depuis que nous sommes dans la bourrasque de la crise. Je ne trouve pas d'autre guide à l'action, dans ces temps troublés, que ces deux mots : vérité et courage.
Depuis 2008, j'ai choisi de dire la vérité aux Français sur la gravité de la crise. Je leur ai dit qu'il s'agissait d'une épreuve pour la France qu'il ne fallait ni sous-estimer ni dramatiser à l'excès. C'est une épreuve. En tant que telle il faut l'affronter. Il faut résister, se battre. Il faut faire preuve de courage.
Le courage dont font preuve les Français tous les jours, dans leur travail. Le courage avec lequel ils acceptent les réformes difficiles, comme celle des retraites.
Pour ma part, à l'occasion du sommet sur la crise, je dirai la vérité aux partenaires sociaux le 18 janvier. Je parlerai aux Français à la fin du mois. Je leur dirai que comme en 1958, la crise peut être surmontée, pourvu que nous ayons la volonté collective et le courage de réformer notre pays. Car c'est le courage qui donne la force d'agir. La France est un grand pays. La France a souvent traversé dans son histoire des périodes difficiles. Croyez-moi, comme en 1958, elle saura se relever de cette crise.
Prenons exemple sur ce que fit Michel DEBRÉ dans ces années exaltantes où se construisit réellement la France moderne. »
Fin de l’extrait ../
Le Président Sarkozy a quitté ensuite Amboise pour regagner l'Élysée, où l'attendaient ses conseillers, selon les médias pour une réunion portant sur la crise et... la perte du triple A.
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(Info : Aujourd’hui Lundi, Le Président Français est en visite en Espagne)
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LE DISCOURS D'AMBOISE
Madame la Ministre, Chère Claude GREFF
Monsieur le Ministre, Cher Maurice LEROY,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames et Messieurs,
Nous voici réunis aujourd'hui à l'occasion du 100e anniversaire de la naissance de Michel DEBRÉ, tout prêt d'ici, à Montlouis-sur-Loire, d'un père qui allait marquer d'une empreinte profonde l'histoire de la médecine française en fondant la pédiatrie moderne et d'une mère, elle aussi médecin, qui serait l'une des premières femmes à devenir chef de clinique des Hôpitaux de Paris.
A mi-chemin entre l'Alsace, que son grand-père paternel avait quittée en 1870 pour ne pas perdre la nationalité française, et la région toulousaine d'où sa famille maternelle était partie au moment de l'affaire Dreyfus, il allait s'enraciner dans cette Touraine où il sentait battre le cœur de la France.
La France, elle allait occuper toutes ses pensées.
Comme le général de GAULLE il ne pouvait l'imaginer sans la grandeur et cette grandeur pour lui se confondait avec celle de l'État.
Si les circonstances jouèrent dans sa vie un rôle souvent décisif comme pour chacun d'entre nous, le choix de sa carrière, lui, ne dut rien au hasard et tout au goût profond du service de l'État qui très tôt s'était emparé de lui et ne le quitta jamais.
Nous ne célébrons aujourd'hui pas seulement l'homme de convictions qui mena avec tant de sincérité, d'énergie, de courage, d'obstination les combats qui lui paraissaient justes.
Nous ne célébrons pas seulement l'homme politique qui occupa tant de postes de responsabilité.
C'est aussi, c'est d'abord au grand serviteur de l'État que la Nation rend aujourd'hui un hommage solennel.
Grand serviteur de l'État, c'est une expression qui n'a d'équivalent dans aucune autre langue.
Car l'État occupe dans notre histoire, dans notre destin collectif, dans notre vie publique une place éminente incomparable à celle que bien souvent il occupe ailleurs.
En France, c'est l'État qui a fait la Nation, qui la porte, qui la maintient unie.
En France, lorsque l'État est faible, c'est la Nation tout entière qui se trouve affaiblie.
En France, lorsque l'autorité de l'État est contestée, c'est la cohésion nationale qui est menacée.
Michel DEBRÉ appartient à la longue lignée de ceux qui ont voué leur vie au service de l'État, et qui depuis des siècles le construisent et le reconstruisent contre les assauts, sans cesse répétés, de toutes les féodalités dont le Général de GAULLE disait « qu'elles n'aiment rien moins qu'un État qui fait réellement son métier et qui, par conséquent, les domine ».
Les grands serviteurs de l'État, ce sont eux qui ont fait la France, sa grandeur, sa force, sa liberté.
Ils ont accompli ce miracle, renouvelé de siècle en siècle, parce qu'ils ont choisi de servir une cause plus grande qu'eux-mêmes, parce qu'ils ont choisi de faire toujours passer l'intérêt national avant leur intérêt personnel, parce que pour eux, servir était une exigence intellectuelle et morale. Exigence si étrangère à tant de ceux qu'ils ont côtoyés, qu'ils furent souvent incompris.
Incompris, Michel DEBRÉ le fut par ceux qui ont toujours regardé le goût de servir et l'exigence morale en politique comme une forme de naïveté -- parce qu'ils ne croyaient qu'au cynisme. Il en souffrit. Sans jamais que cette souffrance le conduisit à renoncer.
Il appartenait à cette catégorie d'hommes qu'une sourde colère contre les forces du renoncement maintient en permanence dans l'action même quand celle-ci paraît désespérée.
Enfant, il avait déjà choisi ses héros préférés parmi les personnages de l'Histoire qui avaient incarné la résistance nationale dans les moments les plus désespérés : Jeanne d'Arc, Carnot, Gambetta,
Clémenceau... Comment dès lors aurait-il pu ne pas devenir gaulliste quand le général de GAULLE, à son tour, allait incarner ce que MALRAUX appelait : « la force du non dans l'Histoire » ?
A la fin de ses études de droit et de sciences politiques, il choisit le Conseil d'État où il allait trouver, dira-t-il un jour, une « conception de l'État à la fois nationale, tolérante et démocratique ».
En 1939, il était officier de cavalerie. Fait prisonnier en juin 1940, il réussit à s'évader trois mois plus tard. En février 1943 il s'engagea dans la Résistance. Dès l'été il fut chargé d'établir la liste des préfets qui pourraient remplacer ceux de Vichy à l'heure de la Libération. En août 1944, à 32 ans, il était nommé Commissaire de la République à Angers.
Chargé par le général de GAULLE de préparer la réforme de l'administration, il créa en 1945 l'École Nationale d'Administration et la Fondation Nationale des Sciences Politiques.
Ce n'était que la première pierre de l'œuvre réformatrice incomparable à laquelle ce réformateur dans l'âme allait se consacrer sans relâche durant tout le temps où il exercerait des responsabilités publiques. Cet homme d'ordre était sans cesse porté vers le mouvement, la modernisation, le progrès. Il savait d'instinct que, dans un monde qui se transforme, l'immobilisme est mortel et que si les principes devaient rester constants, les institutions, les lois et les moyens devaient changer.
Épouser son temps, prendre à bras le corps les défis de son époque, telle était pour lui la condition de la survie de la France.
Il avait vécu comme une terrible souffrance la défaite de 40 et l'effondrement de la IIIe République.
Il avait eu le sentiment de revivre la même histoire avec le naufrage de la IVe République.
Relever l'État que le régime des partis abaissait. Le réformer pour lui rendre son autorité, son prestige, son efficacité, telle fut dès lors son obsession.
Dès 1947, il dénonçait : « la mort de l'État républicain ». Son constat était accablant : « notre État, disait-il, est incohérent, il est ruineux, il est inefficace ».
« Dans le même bureau on dit aujourd'hui au citoyen le contraire de ce qu'on lui disait hier ; on nie ici ce qu'on affirme à côté. »
« Le ministère des Finances, pensant au Budget, réclame des économies ; les autres ministères se croient déshonorés s'ils n'épuisent pas leurs crédits et si, d'une année sur l'autre, ils n'obtiennent pas d’augmentation.»
« C'est le mécanisme intérieur de l'État qui nous ruine. Les méthodes de travail sont souvent dispendieuses et les méthodes de gestion dévastatrices. »
« L'administration française ne manque pas de contrôles. On peut même dire que le contrôle est une de nos satisfactions nationales. Malheureusement on contrôle davantage la manière dont un service dépense que la dépense elle-même. »
Cela était pour lui d'autant plus une souffrance qu'il regardait l'État non comme une structure inerte mais comme « un être vivant, l'expression d'une communauté vivante comme une personne, vivante comme une famille ».
Mais ce constat qui pourrait valoir pour bien d'autres époques, et cette souffrance qu'il éprouva devant cette faillite ne lui firent pas baisser les bras.
Au contraire.
« Notre décadence, écrivait-il, à l'aube d'une carrière politique qui allait laisser une empreinte si profonde dans nos institutions, notre décadence ne nous est pas imposée par la fatalité. Elle n'est pas écrite sur le livre du Destin. C'est nous qui, chaque jour, l'écrivons. »
Et il allait contribuer à l'écrire.
Une question le hantait : « Que faire pour que la République soit capable d'assumer la France ? »
A la IIIe République, il reprochait d'avoir été malthusienne, d'avoir eu peur du marché mondial, d'avoir ignoré l'importance de la production et du commerce, de s'être résignée à la dénatalité, d'avoir fait preuve de lâcheté face à Hitler, de s'être réfugiée dans le pacifisme.
A la IVe République, il reprocha d'avoir brisé le rêve du gaullisme et de la Résistance en livrant l'État aux partis.
Il en voulait au régime de ne pas entreprendre les efforts nécessaires pour, disait-il, « hisser la Patrie au premier rang et l'y faire demeurer » parce qu'il mesurait le risque de devenir ainsi « le serviteur des autres, sans liberté, sans sécurité, sans prospérité ».
Bien plus tard, il résumera ainsi l'état d'esprit qui était le sien alors qu'il s'engageait dans la vie politique : « jeune bourgeois hostile aussi bien au conservatisme qu'à la lutte des classes, deux faces d'une même fausse médaille, je veux qu'un constant effort de travail, de recherche scientifique et technique, de modernisation agricole, d'élan industriel, de conquête de nouvelles énergies soit accompagné d'une inlassable volonté de solidarité collective et d'une inlassable ardeur de promotions individuelles ».
Il avait tout compris mais il ne voyait personne d'autre que le Général de GAULLE pour éviter que la France manquât son rendez-vous avec l'Histoire et s'engageât sur la pente du déclin.
En juillet 1946, il se rendit pour la première fois à Colombey pour convaincre le Général de GAULLE qui s'était retiré du pouvoir de revenir dans le jeu politique. Mais le Général qui ne voulait pas subir la loi des partis refusa.
Jusqu'en 1958, Michel DEBRE ne cessera de revenir à la charge et de tout faire pour que l'Homme du 18 juin s'impose à nouveau comme le seul recours.
En 1957, à l'heure où la IVe sombrait, il écrivait encore à ceux qu'il appelait « les princes qui nous gouvernent » : « A force d'attendre, il sera trop tard. »
Entre temps, il était devenu en 1948 sénateur d'Indre-et-Loire sous l'étiquette du RPF ce grand rassemblement populaire que le Général a voulu dresser contre le régime des partis. De retour sur sa terre natale que pendant dix ans il parcourut en tous sens, et qu'Alfred de VIGNY appelait « le jardin de la France », il allait à la rencontre de tous.
Bien plus tard, « C'est avec gratitude, dira-t-il, que j'évoque les visages de ces hommes à qui j'ai parlé en toute franchise et que j'ai écoutés avec intérêt ». Il dira aussi : « partout je rencontrais l'histoire ». Charles Martel, Charles VII, Jeanne d'Arc, François 1er... Il y rencontrait aussi la littérature : Rabelais, Balzac, Ronsard, Beaumarchais, Vigny...
En 1951, il était élu Conseiller Général du canton de Vouvray.
En 1966, il sera élu maire d'Amboise.
De cette ville à laquelle il se dévouera corps et âme il dira : « l'hospitalité comme l'esprit de résistance ont forgé son existence et sa loyauté, comme la douceur du climat et les mille et une ressources de la nature sur nos bords de Loire ont dessiné son caractère, ardent et serein. Amboise appartient à l'avenir tout comme le passé lui appartient... »
Par deux fois, il échoua à devenir député d'Indre-et-Loire. Ce double échec le conduisit à se présenter à la Réunion où il fut élu en 1963 dans la première circonscription de l'Ile. Il mettra toute son énergie et toute son intelligence dans l'accomplissement de ce mandat qui lui tenait profondément à cœur. Et le souvenir qu'il a laissé aux Réunionnais auxquels il a tant apporté montre que malgré des polémiques et parfois des incompréhensions cet homme exigeant qui voyait si loin et si grand avait su tisser avec ces Français d'Outre-mer des liens profonds d'estime et d'affection.
Mais son grand amour c'était la France, et la grande année de sa vie ce fut cette année 1958 où le Général de GAULLE revint au pouvoir.
D'abord Garde des Sceaux, le 8 janvier 1959 il était nommé Premier ministre. Il allait le rester jusqu'en 1962.
Ministre des Finances en 1966, ministre des Affaires étrangères en 1968, ministre d'État, ministre de la Défense en 1969, jusqu'en 1973. Il occupa tous les postes, toutes les fonctions, toutes les responsabilités, des plus humbles aux plus éminentes. Et il marqua chacune d'une empreinte profonde. Ce qu'il a accompli en fait l'un des plus grands réformateurs de notre histoire.
Au ministère de la Justice, il élabora la Constitution de la Ve République qui permet encore aujourd'hui à la France d'être gouvernée même quand elle traverse les épreuves les plus difficiles. Il bouleversa de fond en comble l'organisation de la Justice, créa l'École Nationale de la Magistrature, redessina la carte judiciaire.
A la tête du gouvernement, alors que la France devait faire face au drame algérien, il mit en œuvre le plan Rueff de redressement financier.
En 1958, le franc était attaqué, le déficit budgétaire paraissait insoutenable. Il fallait rétablir la confiance. Michel DEBRÉ fit alors le seul choix possible, celui de la vérité et du courage.
Permettez-moi ici une confidence. J'ai souvent réfléchi depuis que nous sommes dans la bourrasque de la crise. Je ne trouve pas d'autre guide à l'action, dans ces temps troublés, que ces deux mots : vérité et courage.
Depuis 2008, j'ai choisi de dire la vérité aux Français sur la gravité de la crise. Je leur ai dit qu'il s'agissait d'une épreuve pour la France qu'il ne fallait ni sous-estimer ni dramatiser à l'excès. C'est une épreuve. En tant que telle il faut l'affronter. Il faut résister, se battre. Il faut faire preuve de courage.
Le courage dont font preuve les Français tous les jours, dans leur travail. Le courage avec lequel ils acceptent les réformes difficiles, comme celle des retraites.
Pour ma part, à l'occasion du sommet sur la crise, je dirai la vérité aux partenaires sociaux le 18 janvier. Je parlerai aux Français à la fin du mois. Je leur dirai que comme en 1958, la crise peut être surmontée, pourvu que nous ayons la volonté collective et le courage de réformer notre pays. Car c'est le courage qui donne la force d'agir. La France est un grand pays. La France a souvent traversé dans son histoire des périodes difficiles. Croyez-moi, comme en 1958, elle saura se relever de cette crise.
Prenons exemple sur ce que fit Michel DEBRÉ dans ces années exaltantes où se construisit réellement la France moderne.
Il mit en œuvre le Traité de Rome. Il modernisa la fiscalité, l'agriculture, l'énergie, la recherche, lança un grand plan d'équipement pour la métropole et l'Outre-mer, mit fin à la guerre scolaire avec la loi sur la liberté de l'enseignement et la loi sur l'aide à l'enseignement privé, organisa l'enseignement professionnel agricole, développa l'enseignement technique, réorganisa les études médicales, créa les Centres Hospitaliers Universitaires, mit en œuvre une politique ambitieuse d'aménagement du Territoire.
C'est pendant qu'il était à Matignon que fut introduit le nouveau Franc, instauré l'impôt unique sur le revenu, généralisée la TVA, lancé le programme nucléaire et le programme spatial, créé l'aéroport d'Orly...
Au ministère de l'Économie et des Finances, il créa l'Institut National de la Consommation, introduisit la rationalisation des choix budgétaires, restructura le secteur des banques et des assurances, fonda la BNP, inventa les groupements d'intérêt économique, lança le marché hypothécaire, créa la Commission des Opérations de bourse, les Instituts régionaux d'administration, la Fondation de France.
Il institua les OPA et les dations, regroupa tous les services fiscaux dans la Direction Générale des Impôts...
A la Défense nationale, il créa le GIAT et l'Aérospatiale, lança le programme Ariane, rédigea le premier livre blanc sur la politique de défense.
Dans sa vie politique, il y aura une blessure, celle de l'Algérie. Il aurait voulu qu'elle restât associée à la France.
Mais cela n'entama en rien sa fidélité. Il dira « Ce n'est pas l'Algérie qui a fait mon « gaullisme » ; ce n'est pas l'évolution de la guerre d'Algérie qui l'a défait. Gaulliste de raison je le suis devenu en 1941 ; voyant l'état de la France sous la IVe République, je le suis demeuré. Le cœur a transformé une conversion raisonnable en un attachement indéfectible... »
Du cœur, il en mit à l'ouvrage, il en mit dans ses engagements.
C'est à cause de ce cœur qu'il mettait dans tout ce à quoi il croyait qu'il souffrit tant de l'affaire algérienne. C'est à cause de ce cœur qu'il mettait dans tout ce qu'il entreprenait qu'il fut si malheureux chaque fois qu'il se trouvât écarté des responsabilités. Non parce qu'il aimait le pouvoir pour le pouvoir mais parce qu'il ne pouvait supporter l'idée de ne plus être utile à son pays alors qu'il y avait toujours tant à faire à ses yeux pour qu'il ne sombrât pas à nouveau dans la facilité et dans l'impuissance.
Malheureux il le sera aussi de ne pas être assez écouté quand il pointera avant tout le monde les risques que faisait courir le désordre monétaire international ou la dénatalité, quand il défendra la nécessité d'une politique familiale ambitieuse ou quand il plaidera pour une Europe des Nations contre ce qu'il appelait l'Europe supranationale.
Son échec à l'élection présidentielle de 1981 le remplira d'une profonde tristesse non de ne pas avoir été élu car il ne l'avait sans doute jamais espéré, mais de ne pas avoir pu faire comprendre et partager cette idée de la France qu'il avait la hantise de voir mourir.
En 1988, cet homme si attaché à la culture et à la langue française fut élu à l'Académie française. Cette élection lui procura sa dernière grande joie parce que l'Académie était à ses yeux l'une de ces institutions qui s'inscrivent dans la longue durée de l'Histoire de notre pays et qui sont au cœur de son identité.
Et sans doute avait-il le sentiment qu'à travers elle l'idée si élevée qu'il se faisait de la France continuerait à vivre pour les siècles des siècles.
Avant que tout doucement la maladie ne l'affaiblisse et ne l'emporte peut-être n'avait-il pas retrouvé l'espoir que la jeunesse française puisse encore comprendre le message si exigeant mais si profond qu'il lui avait adressé un jour, avec son cœur. Mais peut-être que si...
« Jeunesse française, tu fais partie de la jeunesse du monde et ton destin est lié à celui de l'humanité. Mais tu as la responsabilité, et toi seule, de la France de demain. Ce que tu ne feras pas pour ta liberté, nul ne le fera. Ce que tu ne feras pas pour ton pays, garant de ta liberté, nul ne le fera ».
Michel DEBRÉ, grand serviteur de l'État, trop peu honoré, la France aujourd'hui se souvient qu'elle te doit beaucoup et elle te dit merci d'avoir tant fait pour elle.
Vive la République que tu as si bien servie
Vive la France que tu as si bien aimée.
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