Pour information :
Jeudi 16 Mai 2013
La très longue conférence de Presse du Président de la République François Hollande vient de se terminer, vous trouverez ci-dessous la vidéo intégrale de son intervention telle que présentée par F2, en premier lieu les longs commentaires des présentateurs de Francé 2, à la suite l'intervention liminaire d'ouverture de la Conférence de Presse par le Président de la République, et enfin les réponses du Président aux questions des journalistes :
Nous ne disposons pas du script de l'intégralité de cette conférence de presse pour le moment.______________________________________________________________________________
Toutefois en ce qui concerne l'Intervention liminaire d'ouverture de la Conférence de Presse par le Président de la République, nous disposons de la vidéo et du script, vous les retrouverez ci-dessous
Source -Site Présidence de la République :
.
Source – Site Présidence de la République :
Publié le 16 Mai 2013
Intervention liminaire du
président de la République lors de la conférence de presse
Palais de l’Elysée – Jeudi 16 mai 2013
Mesdames, Messieurs les membres du gouvernement,
Mesdames, Messieurs les journalistes,
Je vous avais donné rendez-vous tous les six mois ; je suis donc à
l’heure pour la deuxième rencontre. Cette conférence de presse me permettra de
revenir sur ce que nous avons fait, depuis un an, mais surtout de tracer les
prochaines étapes de mon action.
Hier, j’étais à Bruxelles. Je présidais la conférence des donateurs
pour le Mali. L’intervention de la France y a été saluée, reconnue. Le mérite
en revient à nos soldats et je veux leur rendre hommage en cet instant. Six
sont morts. Ils ont fait bien plus que libérer un pays de la servitude et du
terrorisme. Ils ont fait aimer la France dans toute l’Afrique et illustrer le
rôle qui est le nôtre, celui d’une grande nation : pouvoir peser sur
l’équilibre du monde.
Hier, j’étais à Bruxelles parce que je voulais partager avec la
Commission européenne, réunie au grand complet – c’était la première fois
depuis 1997 qu’un président de la République française rencontrait le Collège
des commissaires. C’était donc un évènement pour eux, mais aussi pour la
France. Parce que je voulais leur faire partager ma conception de l’Europe.
Je me suis exprimé au nom d’un Etat qui a démontré sa crédibilité
budgétaire, d’un pays qui a amorcé le redressement de sa compétitivité et qui a
entrepris, par la négociation, la réforme du marché du travail. C’est cet
effort que je veux saluer : celui du gouvernement de Jean-Marc AYRAULT, celui
de tous les Français. Il a permis d’obtenir du temps – deux ans – pour
atteindre notre objectif qui est de réduire le déficit public, confirmant ainsi
le bien-fondé de la démarche que j’ai engagée depuis mon élection pour faire
bouger les lignes en Europe.
Les lignes ont bougé depuis un an. Quand je regarde ce qui s’est
produit : la zone euro a été stabilisée, des instruments de solidarité ont été
introduits, l’Union bancaire a été définie. Il y a eu aussi une nouvelle
doctrine de la Banque centrale européenne. La Grèce que l’on pensait, à un
moment, menacée de ne plus pouvoir figurer dans la zone euro, a été sauvée
comme d’autres pays. Les taux d’intérêt, qui paraissaient pour certains pays
insupportables, ont baissé. Je ne parle pas du nôtre qui est à son plus bas
historique : jamais l’Etat n’avait emprunté avec un coût de l’argent aussi
faible.
Ce résultat, que je revendique, n’a été possible que parce que la
France a su jouer le rôle de trait d’union entre l’Europe du Nord et l’Europe
du Sud, dans le cadre de l’indispensable – je dis bien indispensable – couple
franco-allemand, sans lequel l’Europe ne peut pas avancer.
Mais aujourd’hui, ce qui frappe l’Europe, ce n’est plus la crise
financière. Je le redis ici : elle est derrière nous. Cela ne veut pas dire
qu’il n’y ait plus de menaces, mais les causes ont été régulées et jugulées. Ce
qui frappe l’Europe, ce n’est pas la crise financière, c’est la récession :
récession provoquée par des politiques d’austérité ; récession qui touche tous
les pays de la zone euro – certains moins que d’autres, mais je pourrais faire
des comparaisons, y compris avec l’Allemagne, pour ces six derniers mois ;
récession qui menace jusqu’à l’identité même de l’Europe, jusqu’à la confiance
des peuples en leur destin.
La Commission européenne a commencé à comprendre les risques et les
menaces. Elle a décidé d’ajuster, d’adapter le rythme de la consolidation
budgétaire à la conjoncture. C’est un bon signal. Mais, pour moi, ce délai –
deux ans pour la France – ce n’est pas un répit, c’est un rebond, c’est une
opportunité pour une reprise plus rapide en France et en Europe. Car l’enjeu,
je le répète, c’est la croissance, c’est la sortie de la crise, c’est la fin de
la récession.
Notre économie est à l’arrêt depuis 5 ans. Pas depuis 6 mois, pas
depuis 1 an : depuis 2008. Avec plus d’un million deux cent mille demandeurs
d’emploi de plus, je sais que cette situation entraîne des difficultés pour bon
nombre de mes compatriotes, de ceux qui m’ont accordé leur confiance, de ceux
qui espèrent un avenir meilleur pour eux, pour leurs enfants. Je sais ce que
beaucoup éprouvent comme inquiétude, même quand ils ont un emploi, et comme
détresse quand ils n’en ont plus, au point – je le disais – de douter
d’eux-mêmes et surtout de leurs gouvernants – ce qui est une menace pour la
démocratie.
Bien sûr, j’aurais pu vous dire que nous n’en serions pas là, si nos
prédécesseurs avaient fait des choix courageux, notamment sur le plan de la
compétitivité, ces dix dernières années. On me le fait sentir d’ailleurs quand
je vais à l’étranger ! Bien sûr, je pourrais vous dire que cela va plus mal ailleurs.
Et alors ? Je ne cherche aucune défausse, ni sur le passé, ni sur l’extérieur.
C’est la raison pour laquelle Jean-Marc AYRAULT et son gouvernement ont
dû engager des réformes essentielles pour le pays. La première, c’était tout
simplement le sérieux budgétaire. Cela va de soi, et pourtant ! Que s’est-il
passé ces dernières années ? Que de dérèglements, de dérives, de déséquilibres,
de dettes ! Donc, le sérieux. Comment cela se prouve le sérieux ? Par un
indicateur, le niveau de la dépense publique. Quand je regarde ce qu’a été la
dépense publique de l’Etat en 2012, elle a été légèrement inférieure à celle
qui était prévue ; en 2013, la dépense publique de l’Etat sera stable ; et en
2014, elle reculera d’un milliard et demi.
Et on viendrait nous dire que nous n’aurions pas fait d’économies ?
Mais nous n’avons fait pas que cela, mais aussi cela ! Cela ne nous a pas
dispensés, hélas, d’augmenter les prélèvements. Est-ce que vous pensez que
c’est simple, facile, agréable de solliciter, une fois élu, la contribution des
Français ? J’avais pourtant prévenu, parce que ce sérieux budgétaire était
indispensable pour la crédibilité ; laquelle crédibilité me permettait, en
Europe, de parler de la voix qui convenait pour réorienter son cours et sa
direction. Ce que nous avons fait. Cela, c’était la première réforme.
La seconde réforme nous a été présentée avant même que nous nous
installions. Il fallait déjà faire ce que nos prédécesseurs n’avaient pas
engagé ou, plutôt, avait décidé et reporté : le pacte de compétitivité,
l’allègement du coût du travail. Pardon de prendre les choses comme elles
s’appellent puisqu’il s’agit bien de cela : l’allègement du coût du travail
pour être meilleur sur les marchés internationaux. Cela a été le rapport
Gallois. Le pacte de compétitivité a engagé 20 milliards d’euros d’allègements
et beaucoup d’autres mesures pour l’innovation. C’est un engagement important,
là aussi, qui nous permet de dire que nous avons enfin amorcé ce processus pour
renforcer notre industrie, notre appareil de production et faire confiance aux
entreprises.
Troisième réforme, la maîtrise de la finance. C’était une annonce que
j’avais faite dans un cadre dont chacun se souvient. Oui, maîtriser la finance
! La loi bancaire anticipe même sur ce que sera l’Union bancaire européenne.
Nous sommes les premiers en Europe à séparer les activités de dépôt, des
activités spéculatives. Bien sûr, certains trouvent que nous allons trop loin,
d’autres pas assez. Mais nous avons fait en sorte que nos banques puissent être
préservées et, en même temps, ne plus pratiquer ce qui leur avait été parfois
reproché, c’est-à-dire un certain nombre de prises de risques qui pouvaient
s’avérer aventureuses. Nous avons aussi créé une nouvelle banque, la Banque
publique d’investissement qui est maintenant en place. Il était temps.
Enfin, la quatrième réforme que le gouvernement de Jean-Marc AYRAULT a
menée ou plutôt que les partenaires sociaux ont engagée, c’est l’accord sur la
sécurisation de l’emploi, la réforme du marché du travail. Là aussi, c’est
arrivé un 11 janvier, jour même où j’engageais les forces françaises au Mali.
Peut-être cet événement – parce qu’il était effectivement de première
importance – a caché l’ampleur de la portée d’une décision que prenaient les
partenaires sociaux. Pas tous mais en tout cas, les syndicats majoritaires. Une
réforme que l’on jugeait impossible à faire. Elle est là, votée hier par le
Parlement.
Voilà, la première année de mon quinquennat – si je puis dire, l’an I –
a été entièrement consacrée à la défense de notre souveraineté, à la remise en
ordre de notre économie, à la sauvegarde de notre modèle social et à la
réparation des injustices. Mais j’ai bien conscience qu’il y a la récession, il
y a le chômage qui progresse, il y a les résultats qui se font attendre. Et ce
qui importe aux Français, si je puis dire, c’est maintenant. L’an II, celui qui
s’ouvre aujourd’hui, ce doit donc être l’offensive. Je dis bien l’offensive.
L’offensive, c’est d’abord lancer une initiative européenne. L’Europe –
et c’est un paradoxe – est la première puissance économique du monde. Pourtant,
elle est regardée comme un continent malade, en déclin, en doute. Ma
responsabilité, parce que je suis à la tête d’un État fondateur de l’Europe,
d’un État qui a fait ce choix, d’une nation qui est profondément européenne –
même si aujourd’hui elle se détourne de l’orientation actuelle –, mon devoir,
c’est de sortir l’Europe de la langueur qui la saisit et de réduire la
désaffection des peuples qui ne peut que compromettre l’avenir même de l’Union
européenne.
L’initiative que je prends, elle se décline en quatre points et je la
soumets à nos partenaires. Premier point, c’est d’instaurer avec les pays de la
zone euro un gouvernement économique qui se réunirait, tous les mois, autour d’un
véritable Président nommé pour une durée longue et qui serait affecté à cette
seule tâche. Ce gouvernement économique débattrait des principales décisions de
politique économique à prendre par les États membres, harmoniserait la
fiscalité, commencerait à faire acte de convergence sur le plan social par le
haut et engagerait un plan de lutte contre la fraude fiscale.
La deuxième étape de l’initiative que je propose est tournée vers les
générations futures avec un plan pour l’insertion des jeunes. Le cadre
financier européen, le budget européen a déjà prévu six milliards d’euros pour
l’emploi des jeunes. Mobilisons tout de suite, avant même que le cadre
financier ne soit en place pour 2014, une partie de ces fonds pour que nous
puissions venir en soutien de tous les jeunes d’Europe qui, aujourd’hui,
peinent à trouver une formation ou un emploi. Toujours dans cette initiative,
pour préparer l’avenir, l’Europe définirait une stratégie d’investissements,
notamment pour les nouvelles industries et pour les nouveaux systèmes de
communication.
Troisième temps de l’initiative, une Communauté européenne de l’énergie
destinée à coordonner tous les efforts pour les [énergies] renouvelables et
réussir ensemble – alors que l’Europe a des pays qui n’ont pas les mêmes politiques
énergétiques – à assurer la transition énergétique.
Le quatrième temps, c’est une nouvelle étape d’intégration avec une
capacité budgétaire qui serait attribuée à la zone euro et la possibilité,
progressivement, de lever l’emprunt.
L’idée européenne exige le mouvement. Si l’Europe n’avance pas, elle
tombe ou plutôt elle s’efface ; elle s’efface de la carte du monde, elle
s’efface même de l’imaginaire des peuples. Il est donc plus que temps de porter
cette nouvelle ambition. L’Allemagne, plusieurs fois, a dit qu’elle était prête
à une Union politique, à une nouvelle étape d’intégration. La France est
également disposée à donner un contenu à cette Union politique. Deux ans pour y
parvenir. Deux ans, quels que soient les gouvernements qui seront en place. Ce
n’est plus une affaire de sensibilité politique, c’est une affaire d’urgence
européenne.
L’offensive – elle est bien sûr ici, en France –, c’est de mobiliser
toutes les forces pour l’emploi. Il n’y aura pas d’espérance possible dans notre
pays tant que le chômage n’aura pas entamé sa décrue. C’est pourquoi je me suis
engagé personnellement, certains ont dit même hâtivement, pour ne pas dire
imprudemment, sur l’objectif de l’inversion de la courbe du chômage. Je m’y
tiens et c’est la feuille de route du gouvernement. Tout doit être mis en œuvre
pour que les mesures, qui ont déjà été engagées, puissent être amplifiées pour
faire reculer le chômage à la fin de l’année.
Mobilisation de tous les moyens avec les « emplois d’avenir ». Cent mille
! J’ai demandé au ministre du Travail et de l’Emploi d’élargir au secteur privé
et notamment au tourisme et aux services à la personne ces emplois pour que
nous puissions leur donner encore plus d’efficacité. Soixante-quinze mille «
contrats de génération ». Vous savez, le passage de témoin d’un senior pour un
jeune, cette alliance des âges et qui commence depuis le mois de mars à être
mise en place dans les entreprises.
Là aussi, j’ai demandé que l’on puisse étendre le principe même du «
contrat de génération » à la création d’entreprise, à l’installation, y compris
des agriculteurs, parce que c’est la même idée : faire qu’une génération puisse
servir de marchepied à une autre.
Mobilisation aussi de tous les acteurs et d’abord des entreprises. Ce
sont les entreprises qui créent les emplois. C’est le sens du crédit
compétitivité-emploi qui représente 4 % de la masse salariale, jusqu’à 2,5 fois
le SMIC. Et ce sera 6% l’année prochaine. Cela, c’est un moyen d’améliorer les
marges des entreprises pour qu’elles puissent investir, employer, exporter.
Mais d’abord employer.
Et puis, il y a l’accord sur la sécurisation de l’emploi qui permettra
de donner plus de souplesse aux entreprises, plus de sécurité aux salariés et
de signer des accords lorsqu’il y a des menaces sur l’avenir même de sites,
pour qu’il y ait des sauvegardes d’emplois et pour que l’on évite ces plans
sociaux et ces licenciements. L’accord, maintenant qu’il est devenu loi, doit
être appliqué le plus rapidement possible dans les entreprises. Voilà pourquoi
je réédite ici, devant vous, en prenant mes risques mais aussi mes
responsabilités, que la courbe du chômage peut s’inverser d’ici la fin de
l’année.
Mais la bataille, elle ne sera gagnée dans la durée – car je veux dire
la vérité aux Français – elle ne sera gagnée dans la durée que si la croissance
revient, que si nous sortons de cette torpeur, de cette langueur et donc de
cette peur. Alors, comment faire ? L’offensive. L’offensive, c’est de préparer
la France de demain, de lui faire prendre de l’avance, de la mettre en tête
dans les domaines les plus essentiels pour son avenir, de promouvoir un modèle
fondé sur la performance économique mais aussi sur la responsabilité sociale,
environnementale.
C’est ce que la France a su faire dans son histoire et, chaque fois, à
l’initiative du président de la République. A un moment, le rôle du chef de
l’État, c’est de déterminer les grands enjeux, les filières d’avenir, les défis
essentiels pour le pays, ce que va être la France dans dix ans et peut-être
même dans vingt ans et de demander au gouvernement de mobiliser tous les
moyens. Et chaque fois que l’État a agi ainsi, il y a eu de grandes réussites
industrielles, scientifiques, culturelles. C’est en voyant loin que l’on change
la perception du présent et que l’on redonne espoir.
C’est pourquoi, j’ai demandé à Jean-Marc AYRAULT de présenter au mois
de juin un plan d’investissements, pour les dix ans qui viennent, autour de
quatre grandes filières : le numérique, la transition énergétique, la santé et les
grandes infrastructures de transport.
Pour en assurer le financement, il convient de faire preuve de plus
d’imagination que par le passé, car nous sommes confrontés à des disciplines
budgétaires. Alors comment y parvenir ? D’abord en allant chercher les crédits
européens, ceux que nous avons contribués à dégager avec le plan
d’investissements, le plan de croissance de juin dernier, et qui restent
souvent inutilisés, ce qui est un comble.
Deuxième manière de faire, aller chercher les crédits du programme des
investissements d’avenir – ce que le grand emprunt avait produit en 2010 et
c’était une bonne idée ; aller recharger les moyens de ce programme
d’investissements d’avenir, sans pour autant nous lancer dans je ne sais quelle
opération aventureuse d’emprunt.
Il y a ce que nous pouvons également obtenir du relèvement du plafond
du livret A, des fonds de la Caisse des dépôts, de la Banque publique
d’investissements. Et puis, il y a ce que les cessions de participation
publiques peuvent procurer comme ressources supplémentaires. C’est nécessaire
sans qu’il y ait, pour autant, de pertes de contrôle des entreprises
concernées.
Mais tout ne peut pas venir de l’Etat. Pour financer ces
investissements d’avenir, nous devons aussi aller chercher le secteur privé, le
partenariat, des capitaux extérieurs, des fonds d’investissements, parfois même
de l’étranger. Chaque fois que je me déplace, un certain nombre de pays me
disent qu’ils sont prêts à investir en France. Faut-il encore que nous les
orientons et pas simplement qu’ils puissent disposer de leur argent sans que
nous soyons convaincus du bon usage. Nous essayons donc de faire des fonds liés
les uns, les autres, avec nous.
Bien sûr que – quand nous aurons lancé ces programmes, qui sont déjà en
cours pour certains – nous n’allons pas créer de la croissance tout de suite,
même s’il y aura déjà un effet. Il y aura sûrement, encore, une patience à
observer. Mais c’est aussi le moyen de donner confiance aux Français dans
l’avenir car nous sommes un pays qui est capable d’innover, d’inventer, de
trouver en lui-même des sources qu’il n’imagine pas pour la création et pour la
production.
Il convient aussi de mieux orienter l’épargne des Français vers
l’investissement productif. Trois mesures seront prises dans cette direction.
La première, l’assurance-vie sera réformée pour que les fonds puissent être
davantage affectés aux fonds propres des entreprises.
Deuxième mesure, un Plan d’Epargne en Actions pour les PME sera créé
avec des dispositifs incitatifs. Enfin, je l’avais déjà annoncé, l’imposition
des plus-values mobilières sera révisée.
Pourquoi ? Parce que j’estime que lorsque les investisseurs mettent
leur argent dans l’économie productive, celle qui va créer de l’emploi, celle
qui va améliorer la vie, ils prennent un risque. La fiscalité doit en tenir
compte. Et ces règles, celles que j’ai déjà posées, vaudront pendant tout le
quinquennat. Il n’y aura pas de zigzags, il n’y aura pas d’allers et retours,
parce que je considère que la stabilité et la visibilité sont des conditions de
la confiance et donc de la croissance.
Etre à l’offensive, c’est mieux former les jeunes.
A la rentrée 2013, et pour la première fois depuis 2007, les élèves
auront plus de professeurs, en face d’eux, que l’année précédente. Une
véritable formation des maîtres sera rétablie, mettant fin à cette situation
invraisemblable où l’on considérait que le métier d’enseigner était le seul qui
ne s’apprendrait pas.
D’ici la fin du quinquennat, la proportion des élèves qui sortent du
système scolaire sans qualification sera réduite de moitié. Je demande, là
aussi, à être jugé sur ce résultat. Déjà, depuis décembre dernier, près de 9000
« décrocheurs » – ceux qui ont quitté l’école – ont été repris en main.
Dans le même esprit, le projet de loi sur l’enseignement supérieur a
pour ambition de porter 50% d’une classe d’âge au niveau d’un diplôme du
supérieur et de doter nos structures universitaires de davantage de moyens
d’attractivité, d’être mieux reconnues au plan international avec leurs
diplômes. Ceci n’empêche pas de faire venir des étudiants étrangers, parfois
même avec un enseignement de la langue anglaise qui leur est destiné. Mais les
examens se feront en français, pour que nul ne s’inquiète ! Quand on essaye
d’être un pays attractif, on fait en sorte que nos universités soient classées
parmi les meilleures du monde. C’est aussi une condition de notre succès.
L’offensive toujours, pour remettre en mouvement notre pays.
Le mouvement, c’est ce qui doit permettre à chacun de progresser, de
créer, d’aller de l’avant, d’aller plus vite, d’être plus libre. Voilà pourquoi
je suis pour le mouvement. J’ai retrouvé cette belle phrase d’un sculpteur, qui
fait des mobiles, et qui a résumé son travail de la façon suivante : « l’unique
chose stable, c’est le mouvement partout et toujours ». Alors il faut mettre du
mouvement. Comment ?
D’abord, j’ai évoqué le « choc de simplification ».
Plus de simplification, c’est plus d’initiative, plus d'activité, plus
d'emplois. Plus de simplification, c’est plus de temps pour nos concitoyens, et
donc plus de vie. C’est aussi plus de croissance. Cela fait partie des réformes
qui, finalement, ne demandent d’efforts qu’à ceux qui sont dans les
administrations – je veux les saluer – mais qui ne demandent pas aux Français
de contribution supplémentaire et qui peuvent nous permettre, simplement, de
vivre mieux.
Alors j'ai demandé au Premier ministre d’engager un travail en
profondeur sur la révision des règles administratives. Non pour supprimer des
protections ou des droits. Mais pour alléger des procédures, accélérer les
décisions, favoriser l’exécution des projets. Un chiffre m’a été donné et j’ai
pensé que c’était un argument de circonstance. Le volume des textes
applicables, dans notre pays, a triplé en 10 ans ! Triplé ! Si on mesurait
effectivement l’efficacité des gouvernements au nombre de textes pris, je ne
doute pas que, sur ces dix dernières années, l’objectif avait été atteint !
Moi, je préfère que l’on allège. Il aura donc deux lois d'habilitation
qui vont être demandées au Parlement pour permettre au gouvernement d’agir par
ordonnances. L’une d’elle concerne le logement. Cela va permettre de hâter la
construction, de favoriser des procédures, sans altérer les droits en aucune
manière. Il y a 35 000 logements qui sont bloqués par des recours abusifs.
Et puis, une autre législation va être prise dans le domaine des
relations entre l’Administration et les entreprises, parce que nous voulons
favoriser les implantations, aller plus vite, raccourcir les délais. On peut
diviser par trois le temps pour implanter une entreprise, si nous harmonisons
l’ensemble des procédures. Et pour les particuliers, je propose une forme de
révolution. Dans de nombreux domaines, pas tous, le silence de l’administration
vaudra désormais autorisation et non plus rejet. Ce sera effectivement un
changement considérable. Il doit être limité à des domaines. D’autres,
forcément, exigent des délais d’instruction. Eh bien, ces délais sont eux-mêmes
limitatifs, connus à l’avance. Lorsqu’ils ne sont pas respectés, l’autorisation
sera donnée.
Ce mouvement de simplification pour les entreprises, pour les
particuliers, se poursuivra tout au long du quinquennat. C’est une réforme
structurelle comme l’on dit, mais c’est surtout un facteur de croissance.
L’autre réforme qui s’inscrit dans le mouvement, c’est la formation
professionnelle qui complètera d’ailleurs ce qui a été fait sur le marché du
travail. Un chômeur sur cinq – un chômeur sur cinq ! – reçoit une formation
professionnelle. Nous allons changer cela, faire qu’avec une négociation nous puissions
notamment permettre dans les deux/trois premiers mois où le demandeur d’emploi
se présent à Pôle emploi, il puisse y avoir une formation professionnelle qui
puisse lui être dispensée. Nous redéployerons les crédits, également pour les
salariés moins qualifiés, ceux qui sont pourtant dans les entreprises et qui
sont privés de l’accès à la formation.
Je dis que cela complète l’accord sur la sécurisation de l’emploi,
parce que dans cet accord a été créé un compte personnel pour la formation. Il
donnera justement des droits aux salariés. Cette réforme sera discutée avec les
partenaires sociaux, avec les régions, avec Pôle emploi et sera initiée dès la
conférence sociale du mois de juin pour être votée à la fin de l’année.
Enfin, il nous revient d’assurer l’avenir des retraites. La réforme de
2010 n’a pas permis de rétablir l’équilibre. Il y a, aujourd’hui, un déficit
d’une quinzaine de milliards d’euros et il est prévu à vingt milliards d’euros
en 2020. C’est insoutenable. Je refuse, comme président de la République, de
reporter sur les générations à venir le fardeau du financement des retraites.
Les partenaires sociaux ont pris leurs responsabilités pour les régimes
complémentaires. Nous devons continuer, poursuivre avec d’autres règles qui
devront être trouvées.
Trois principes me guident. Premier principe : nous devons rétablir
durablement – je ne dis pas que c’est la dernière réforme, il faut se méfier de
ceux qui vous annoncent que c’est l’ultime, celle qui généralement prévoit la
prochaine – il y aura donc un rétablissement des régimes de répartition tenant
compte de notre démographie, qui d’ailleurs est un atout par rapport à d’autres
pays. Mais dès lors que l’espérance de vie s’allonge, il y a un principe qui
est celui de l’évidence. Dès lors que l’on vit plus longtemps, parfois beaucoup
plus longtemps, on devra travailler aussi un peu plus longtemps.
Le deuxième principe c’est la justice. Tenir compte des carrières
longues. C’est d’ailleurs ce que nous avons fait dès le mois de mai pour
permettre à ceux qui étaient depuis longtemps au travail de pouvoir accéder à
la retraite à 60 ans. Cet esprit doit encore demeurer. Il y a les inégalités.
Inégalités entre régimes, inégalités aussi qui frappent les femmes ou ceux qui
ont des carrières incomplètes. Nous aurons à travailler là-dessus. Justice
parce qu’il n’y a pas de réforme sans justice.
Troisième principe : le dialogue, la concertation. Elle s’ouvrira dès
la Conférence sociale du mois de juin et se poursuivra jusqu’à la fin de l’été.
Mesdames et Messieurs, voilà les réformes qui nous attendent. Elles
sont importantes. Elles ne sont pas demandées comme une contrepartie aux délais
que nous avons pu obtenir. Parce que, en réalité, ces réformes nous voulons les
engager. Je les avais présentées aux Français.
Mais j’ai conscience du moment dans lequel nous sommes et cette
conférence de presse n’est finalement pas simplement à une date anniversaire.
Elle est à un moment où des questions se posent dans notre pays, des questions
légitimes. Elles taraudent même les Français. Quelles sont ces questions ?
Elles s’annoncent finalement assez simplement.
La France peut-elle réussir ? Notre pays n’a-t-il pas passé son tour ?
Sommes-nous encore une grande Nation sur le plan économique, sur le plan
diplomatique, sur le plan politique ? Pouvons-nous encore, dans le monde qui
change – parce que le monde change – c’est une mutation considérable –
pouvons-nous encore préserver notre modèle social et imaginer une transition
énergétique qui nous mette à l’abri de catastrophes naturelles ?
Toutes ces questions que j’entends, je réponds oui !
Oui, la France a les moyens de se hisser au meilleur niveau. Ce qui
exige de muscler notre économie, nos entreprises, de développer à haut niveau
la recherche, de porter une ambition éducative mais aussi de changer. Changer
nos modes de production, nos modes de transports, nos modes de consommation.
Faire cette mutation écologique.
Oui, la France peut garder son modèle social mais en le rénovant, en le
rendant plus efficace, plus juste. En évitant le statu quo qui serait
finalement sans capacité à protéger qui que ce soit. Mais en refusant aussi la
démolition qui serait la pire des manières d’emmener un pays vers son avenir.
Oui, la France a toutes les raisons de faire confiance à sa jeunesse
parce qu’elle et le premier pays en Europe en termes de démographie, de
jeunesse. C’est un atout considérable qui nous donne non seulement une place en
Europe mais une confiance en nous-mêmes, à condition de donner à cette jeunesse
toute sa place, de lui montrer que le progrès est possible et qu’il peut même
être une perspective pour tous, y compris pour ceux qui sont dans les quartiers
et qui s’interrogent également sur le lien qu’ils ont avec la Nation.
Oui, la France peut aussi continuer à porter la promesse de l’égalité :
Que ce n’est pas une nostalgie, que cela reste une ambition. C’est vrai pour le
partage de l’effort, pour la promotion de chacun, pour la récompense du mérite.
C’est vrai aussi pour les droits.
Cela a été le sens de la loi sur le mariage pour les couples de même
sexe. J’ai voulu un grand débat. Certains me conseillaient d’aller vite dès le
lendemain de l’élection. Qui l’aurait compris ? Qui l’aurait admis ? Ce débat a
eu lieu. Longtemps. Au Parlement, je ne sais pas le nombre d’heures : 700 me
dit-on. Il y a 4 000 amendements. Le débat a eu lieu ailleurs qu’au Parlement.
J’en ai eu souvent la vérification, y compris pas loin d’ici. Ce débat était
légitime et toutes les opinions doivent être respectées, toutes les
sensibilités. On m’a dit : c’est un débat qui divise. Mais la France n’a jamais
conçu le rassemblement sur le mode de l’unanimité. En France, nous ne pensons
pas tous pareil. Cela se saurait, y compris dans cette salle. La France est
donc capable d’assumer un certain nombre de grands sujets que l’on appelle de
société.
Cette loi a été adoptée par le Parlement. Le Conseil Constitutionnel va
se prononcer sur sa conformité à la Constitution. Dès qu’il aura fait connaître
sa décision, je promulguerai le texte qui deviendra la loi de la République. Je
suis convaincu que cette loi sera regardée au fur et à mesure du temps pour ce
qu’elle est : un progrès pour l’égalité et pour la liberté. Et celles et ceux
qui n’en veulent pas – et ils en ont bien le droit – pourront toujours attendre
une alternance. Je ne sais pas quand elle viendra. Je ne peux pas pour
l’instant leur donner la réponse. Mais nous verrons bien qui demande ou demandera
l’abrogation de ce texte.
Oui, la France peut aussi avoir confiance dans ses institutions.
L’exemplarité de la République ne doit pas être un simple sursaut suite à un
scandale ou à un slogan. C’est pourquoi, j’irai jusqu’au bout de la transparence
de la vie politique. Le non-cumul des mandats, l’indépendance de la justice,
les nominations dans l’audiovisuel, la protection des sources des journalistes.
Parce que l’autorité de la République est à ce prix.
L’autorité de la République c’est le rempart contre toutes les dérives,
toutes les intolérances, tous les racismes. Si il y a un sujet qui devrait nous
unir, par-delà les sensibilités, c’est bien celui-là : l’autorité de la
République et la lutte contre toutes les violences.
Ce qui s’est passé lundi soir au Trocadéro est une agression. Une
agression à l’égard des biens et des personnes mais aussi une agression contre
notre conception de la vie en commun, contre l’image de la France. Cela appelle
non pas des polémiques mais des politiques qui aillent à la racine du mal.
Je pense aussi à ce qu’il s’est passé ce matin dans une école du 7ème
arrondissement où un désespéré s’est suicidé devant des enfants, une classe de
CP. J’exprime bien sûr l’émotion de toute la Nation par rapport à ce drame. Le
désespéré, les enfants, une école, des personnels qui empêchent peut-être un
autre drame. Tout sera fait pour venir en soutien à ces enfants, à ces
personnels. Nos écoles doivent être protégées des violences. C’est une priorité
du gouvernement. Là-aussi, confiance dans l’école, confiance dans la
République.
Voilà Mesdames et Messieurs ce que je voulais vous dire. La France est
une Nation singulière. C’est plus qu’une grande histoire, c’est un projet. Cela
reste un projet. Celui d’une société capable de se dépasser pour faire mieux
vivre ses enfants qui cultivent l’ambition, peut-être parfois jugée excessive
par nos voisins ou partenaires, de montrer la voix en Europe et dans le monde.
Comme je l’ai dit, y compris avant d’accéder à cette responsabilité, la
France n’est pas le problème. La France c’est la solution. Voilà pourquoi, nous
devons être à l’offensive et nous le serons pour l’An II de ce quinquennat.
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