En matière de déchéance de la nationalité française, le principe retenu par Nicolas Sarkozy serait qu’un citoyen d’origine étrangère, français depuis moins de dix ans, qui se rendrait coupable d'atteinte à la vie d'un dépositaire de l'autorité de l'État serait déchu de la nationalité française, par contre la polygamie a été écartée du projet.
Monsieur Brice Hortefeux Ministre de l’Intérieur souhaitait pourtant que la polygamie soit également sanctionnée par la déchéance de la nationalité française notamment lorsque le chef ou un membre de la famille polygame se prêtait à des escroqueries d’allocations sociales ou familiales, « indélicatesses » qui restent toujours très difficiles à prouver. Il faudra donc au Ministre de l’Intérieur trouver une autre solution pénale pour punir ou faire cesser ces pratiques frauduleuses, en tenant compte que la polygamie d’un étranger qui s’est marié plusieurs fois selon sa loi nationale ne constitue pas une atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation , même lorsqu’il épouse en arrivant en France une française et obtient par ce mariage au bout d’un certain délai la nationalité Française.
Dans l’état actuel du droit français, la déchéance de la nationalité peut être prononcée à l’encontre d’un français d’origine étrangère en cas d’atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation et d’acte de terrorisme.
Étendre la déchéance de la nationalité à des personnes qui porteraient atteinte à la vie d'un représentant de l'autorité publique se heurte à l'article 1 de la Constitution, principe d'égalité entre les citoyens.
Pour interpréter cette rupture du principe d’égalité constitutionnelle entre les citoyens, on peut dire qu’elle instaurerait au moins deux inégalités, non seulement entre les criminels, mais aussi par rapport aux victimes :
- En ce qui concerne les criminels : tous les criminels ne seraient pas punis de la même façon, un français d’origine étrangère depuis moins de dix ans serait condamné en plus à la déchéance de la nationalité
- En ce qui concerne les victimes : le meurtre d'un policier ou d'un gendarme serait considéré comme différent du meurtre d'une autre personne.
Mais pour en revenir aux criminels, il suffirait d’être français d’origine étrangère depuis 10 ans et un jour pour échapper à la déchéance de la nationalité française, ce qui crée encore une différence entre les français d’origine étrangère : les « français depuis moins de dix ans » et « les français depuis plus de dix ans »
Il y aurait donc pour les français d’origine étrangère depuis moins de dix ans, par rapport aux libertés publiques et aux droits fondamentaux, comme une sorte de mise à l’épreuve ou de mise en garde restrictive très difficile à instaurer dans une loi qui pourrait alors être interprétée comme discriminatoire et de ce fait contestée.
Établir une différence entre « les français de naissance », « les français d’origine étrangère depuis moins de dix ans », et « les français d’origine étrangère depuis plus de dix ans » c’est établir différentes catégories de français, et c’ est tout à fait inconstitutionnel selon nos principes républicains, sauf à ignorer l’article 1 de la constitution et le vider de sa substance , ce qui introduirait une atteinte au principe d’égalité devant la loi entre les français.
Rappel de l’article 1 de la Constitution :
« Art. 1. - La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. Son organisation est décentralisée.
La loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu'aux responsabilités professionnelles et sociales. »
………..
Le projet de loi pourrait donc être rejeté par le Conseil Constitutionnel parce qu'il créerait différentes catégories de français et les sanctionne différemment.
De plus il est à noter que la notion de "Français d'origine étrangère" si elle peut se concevoir dans le langage courant n’a jamais existé légalement en droit français.
Le cas des enfants mineurs risquent de poser de sérieux problèmes, qu’adviendrait-il de ces enfants en cas de déchéance de nationalité de l’un leur parent ? Ces jeunes enfants perdraient-ils dans ce cas eux aussi leur accès à la nationalité française ?
Il faut aussi se questionner sur le sort des français d’origine étrangère, qui n’ont pas gardé leur nationalité d’origine (double nationalité), déchus de la nationalité française ils deviendraient apatrides. Que se passera-t-il pour eux au terme de leur peine de prison, comment les expulser ? ……….Une mesure d’expulsion contredirait la suppression de la "double peine" (sanction pénale et expulsion) votée en en 2003 alors que Nicolas Sarkozy était Ministre de l’Intérieur.
Pour en savoir plus :
PROJET DE LOI - DÉCHÉANCE DE LA NATIONALITÉ - Les obstacles juridiques restent entiers... ou presque
· DÉCHÉANCE DE LA NATIONALITÉ - Les obstacles juridiques Le Point - Il y a 12 heures Les Sages avaient alors admis qu'il était possible de déroger au principe d'égalité pour permettre la déchéance de nationalité des Français d'origine ... |
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DÉCHÉANCE DE NATIONALITÉ - SOS Racisme s'indigne, le syndicat de ... Le Point - Il y a 14 heures ... présidentiel rendu autour des questions de déchéance de la nationalité. ... ont acquis la nationalité française dans le cadre d'une démarche volontaire. ... |
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La déchéance de la nationalité en débat Le Monde - Il y a 18 heures ... l'extension de la déchéance de la nationalité française est regrettable. ... entre citoyens français, le mot déchéance indiquant une privation de droit. ... |
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Sarkozy "inflexible" sur la déchéance de la nationalité nouvelobs.com - Il y a 6 jours Prévue par l'article 25 du code civil pour des personnes ayant acquis la nationalité française, la déchéance de nationalité est actuellement réservée à des ... |
2 commentaires:
Réactions:
- concernant la différenciation des francais d'origine et des francais naturalisés.
Tu dis, justement, que le projet de loi se heurte à l'article premier de notre constitution. Cela semble exacte. D'un autre coté, le conseil constitutionnel a reconnu en 1998 la constitutionnalité de la déchéance de nationalité à l'égard des français naturalisés depuis moins de 10 ans (ou 15 ans, art 25-1 Code civil) pour "des atteintes aux intérêts fondamentaux de la nation" ce qui ne se limite pas au terrorisme (cf chapitre du même nom dans le code pénal). Il peut ainsi sembler possible qu'une infraction contre un dépositaire de l'autorité publique soit vue comme une atteinte aux intérêts... . Le conseil ne pouvant ainsi reconnaitre ce projet de loi comme étant inconstitutionnel. Mais j'espère, comme toi, qu'ils feront application de l'article 1 de notre constitution.
- L'article 25 du code civil précise que la déchéance de nationalité ne peut pas avoir comme effet de rendre l'ex-français apatride (cela ne peut pas être modifié par le parlement du à de nombreuses conventions internationales).
Donc cette loi ne pourra pas engendrer des "apatrides". Plus loin dans le raisonnement, habituellement (selon les pays), l'acquisition d'une nationalité fait perdre l'ancienne. Ainsi, des français naturalisés ne disposent plus d'une double nationalité. Ils ne sont ainsi pas susceptible d'être déchus de leur nationalité française. Même s'il existe des procédures de réintégration rapide de la nationalité, cette procédure ne peut être initiée que par l'intéressé, qui, évidemment, ne le fera pas!
-concernant les enfants:
soit ils ont la nationalité française, auquel cas ils l'a conservent, soit ils ne l'ont pas. Le principe de l'article 121-1 du code pénal prend ici toute son ampleur: "nul n'est responsable que de son propre fait". Les enfants ne sont pas responsables du fait de leur parents.
Donc au final, il existe déjà une inégalité devant la loi (consacrée ou non d'ailleurs), mais cela n'a pas encore vidé l'article 1 de son sens, en espérant que le conseil constitutionnel s'en souvienne.
Au plaisir de te lire.
Yann Ipauna a ajouté un nouveau commentaire sur votre message "La déchéance de la Nationalité Française poserait ..." :
Réactions:
- concernant la différenciation des francais d'origine et des francais naturalisés.
Tu dis, justement, que le projet de loi se heurte à l'article premier de notre constitution. Cela semble exacte. D'un autre coté, le conseil constitutionnel a reconnu en 1998 la constitutionnalité de la déchéance de nationalité à l'égard des français naturalisés depuis moins de 10 ans (ou 15 ans, art 25-1 Code civil) pour "des atteintes aux intérêts fondamentaux de la nation" ce qui ne se limite pas au terrorisme (cf chapitre du même nom dans le code pénal). Il peut ainsi sembler possible qu'une infraction contre un dépositaire de l'autorité publique soit vue comme une atteinte aux intérêts... . Le conseil ne pouvant ainsi reconnaitre ce projet de loi comme étant inconstitutionnel. Mais j'espère, comme toi, qu'ils feront application de l'article 1 de notre constitution.
- L'article 25 du code civil précise que la déchéance de nationalité ne peut pas avoir comme effet de rendre l'ex-français apatride (cela ne peut pas être modifié par le parlement du à de nombreuses conventions internationales).
Donc cette loi ne pourra pas engendrer des "apatrides". Plus loin dans le raisonnement, habituellement (selon les pays), l'acquisition d'une nationalité fait perdre l'ancienne. Ainsi, des français naturalisés ne disposent plus d'une double nationalité. Ils ne sont ainsi pas susceptible d'être déchus de leur nationalité française. Même s'il existe des procédures de réintégration rapide de la nationalité, cette procédure ne peut être initiée que par l'intéressé, qui, évidemment, ne le fera pas!
-concernant les enfants:
soit ils ont la nationalité française, auquel cas ils l'a conservent, soit ils ne l'ont pas. Le principe de l'article 121-1 du code pénal prend ici toute son ampleur: "nul n'est responsable que de son propre fait". Les enfants ne sont pas responsables du fait de leur parents.
Donc au final, il existe déjà une inégalité devant la loi (consacrée ou non d'ailleurs), mais cela n'a pas encore vidé l'article 1 de son sens, en espérant que le conseil constitutionnel s'en souvienne.
Au plaisir de te lire.
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