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07 janvier 2009

La « mort » d’une Justice indépendante en France se dessine à l’horizon




article de lucienne magalie pons

Le Président de la République interviendra cet après-midi devant la Cour de cassation.

Madame Rachida Dati, Garde des Sceaux, relevée de ses couches, devrait assister (selon ce qui a été annoncé) au Conseil des ministres et à l'audience de rentrée de la Cour de cassation.


Selon des affirmations médiatiques persistantes le chef de l'Etat, Nicolas Sarkozy, annoncerait ou évoquerait, dans son intervention, la suppression du juge d'instruction. L'Elysée ces derniers jours s'est refusé à confirmer cette information.


Depuis les années 80, on évoque périodiquement la suppression de ce magistrat, mais même l'affaire d'Outreau n'a pas eu sa peau. Toutefois, il en est sorti une réforme d’après laquelle les juges travailleraient dorénavant collégialement dans des pôles de l'instruction composés de juges qui sont appelés à mener l’enquête policière et doivent faire respecter les droits des parties, œuvrant à charge et à décharge, ce que d’aucun considèrent comme un double rôle incompatible et contradictoire.


Contre ces pôles d’instruction, une cinquantaine de recours ont été déposés devant le Conseil d'État et le 7 décembre, un vice de forme a été « déniché » et beaucoup s’accordent à dire qu’à peine nés ces pôles d’instructions sont déjà obsolètes.


Une commission travaille donc déjà à réformer la procédure pénale


L'idée serait de confier l'ensemble des enquêtes judiciaires aux magistrats du Parquet (les procureurs), sous le contrôle d'un juge du siège, réputé indépendant, et baptisé « juge de l'instruction ». Quant aux droits de la défense, ils seraient renforcés. Les avocats auraient accès au dossier dès l'ouverture d'une enquête préliminaire.

Or les procureurs généraux sont nommés en Conseil des ministres et les procureurs de la République sont soumis aux ordres de la Chancellerie. On ne peut pas supprimer les juges d'instruction sans couper le « cordon ombilical » entre l'exécutif et les judiciaires affirment les opposants à cette réforme.


Des réactions défavorables se sont élevées dans le monde judiciaire, attaché à la séparation des pouvoirs, l’un des principes fondamentaux du fonctionnement de la République, contre cette innovation qui substituerait au juge d’instruction, « un juge de l’instruction »qui superviserait les enquêtes conduites par le Parquet dont la hiérarchisation, souligne-t-il est soumise au pouvoir politique.


Ce nouveau « système » se rapprocherait du système à l'anglo-saxonne où les erreurs judiciaires sont nombreuses.


Monsieur Christophe Regnard, Président de l’Union syndicale des magistrats n’a pas manqué de dénoncer qu’ « En face de difficultés économiques majeures, il est toujours opportun de détourner l'attention de l'opinion publique sur des problèmes de sécurité", et il soutient que cette volonté de suppression du juge d'instruction est assez logique après "la reprise en main du parquet’’ à qui on va confier les affaires les plus graves. Il n'y aura plus d'affaires économiques ou de santé publique qui pourraient mettre en cause des hommes politiques ou des patrons proches de ces hommes politiques. »**


Ndlr : de nos jours l’indépendance du parquet est de plus en plus sujette à sa soumission au pouvoir politique et la déclaration de Monsieur Christophe Regnard est tout à fait judicieuse.

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Ces derniers mois, Madame Rachida Dati, la ministre de la Justice, avait rappelé à plusieurs reprises qu'elle était « la chef des procureurs »en des termes très directifs : «Les procureurs sont aux ordres du pouvoir exécutif. Ça revient à confier les enquêtes au pouvoir exécutif", avait-t-elle expliqué, très autoritaire, ce qui avait fortement déplu au monde judiciaire et lui avait attiré de la part de Monsieur Christophe Regnard une réponse pour le moins cinglante : "Le juge d'instruction a eu le tort de s'attaquer à tout le monde dans les années 80", a affirmé Christophe Régnard. "Si la volonté politique est de supprimer l'autorité judiciaire, qu'elle le dise clairement sans utiliser de faux-semblant".


Un juge d’instruction antiterroriste , Monsieur Gilbert Thiel, a déclaré qu’ "On n'a jamais autant lancé de réformes à la fois sans réfléchir à celles qui iraient jusqu'au bout", en rappelant que cette suppression du juge d'instruction au profit d'un juge de l'instruction avait été avancée en 1990 par la commission présidée par Mireille Delmas-Marty, avec comme préalable indispensable l'indépendance du parquet du pouvoir politique. Monsieur Gérard Thiel a de plus souligné : "La justice n'a pas été avare de dysfonctionnements mais tous ne sont pas du seul fait du juge d'instruction", et il s'interroge sur le système des comparutions immédiates où chaque cas est traité en une dizaine de minutes.


Mardi le porte-parole du gouvernement, Monsieur Luc Chatel, lors des questions à l'Assemblée nationale s’est plut a rappeler à ce sujet que le Président de la République avait été élu pour mettre en œuvre des réformes ( on le savait déjà, bis repetita ) mais Monsieur Frank Louvrier chargé de communication de l'Elysée, n'a pas confirmé mardi l'information. "Pas de cela avant le discours", en affirmant que "le discours n'est pas encore fait".

La présidente du Syndicat de la magistrature, Madame Emmanuelle Perreux ne désarme pas et a affirmé que « Si cette mesure se confirme « c’est la mort d’une justice indépendante »


Les réactions des leaders des partis politiques de l’opposition sont assez modérées, ils attendent d’en savoir plus pour se prononcer. Certains d’entre eux pensent peut-être, qu’à la faveur d’une accession au pouvoir de leurs leaders, cette innovation leur sera favorable, si l’on tient compte de la déclaration de Monsieur Christophe Regnard **


André Vallini, député PS a estimé que la suppression du juge d'instruction serait "vraiment une atteinte très grave à l'indépendance de la justice» et il a précisé sur RTL "On confierait l'instruction au pouvoir exécutif" ......."Pour faire court c'est le gouvernement qui déciderait de poursuivre ou de ne pas poursuivre", a-t-il déclaré, ajoutant que le gouvernement aurait "toute latitude" face à des ennemis, ou des affaires embarrassantes.


Monsieur Jean-Marc Ayrault, Président du groupe socialiste à l’Assemblée Nationale, considère que ce projet " ..... met en cause l'indépendance de la justice" et assure que "d'une conception sécuritaire, l'État Sarkozy est en train de glisser à une tentation autoritaire qui touche à tous les domaines".


Jean-François Copé, président du groupe UMP à l’Assemblée Nationale, a louvoyé, comme à son habitude, en estimant qu'on "ne peut pas résumer la réforme de la procédure d'instruction à cette seule question", avant de rappeler que c'était un "des grands sujets" de la campagne présidentielle de 2007.

ooOoo


Nous serons fixés en soirée de ce qui se sera passé lors de l’audience de rentrée de la Cour de Cassation.


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