Présentation
1 - Alice au pays des merveilles
2 - La mise à feu manquée de la planète
3 - Ah !les enfants
4 - L'avènement des férocités démocratiques
5 - Que sait votre classe dirigeante
?
6 - Que savait M. Sarkozy?
7 - Que sait M. Hollande ?
8 - La nouvelle stratégie d'Israël
9 - L'accusation de trahison d'Israël
10 - Le sionisme de demain
11 - La géodomie de Jahvé
12 - Le contre-feu
13 - Les ailes de cire de la Liberté
Présentation
Il est devenu
impossible de rendre compte de l'histoire du dernier semestre
de l'an 2013 si les véritables acteurs de l'histoire du
monde ne sont pas identifiés. L'heure
est venue d'adresser aux enfants en bas âge du XXIe siècle
une lettre circonstanciée, afin de leur raconter les évènements
que les autels du mythe démocratique permettent d'occulter.
Mais ensuite, il faudra se résoudre à quitter le genre épistolaire
et à préciser la nature et l'enjeu planétaires de la conquête
systématique de la Palestine par Israël. Or, le récit de
cette conquête sous le drapeau de la démocratie sacrificielle
se révèle hors de la portée des Thucydide et des Tacite
qui n'étaient pas des théologiens de la Liberté. La narration
messianisée ne devient intelligible en profondeur qu'à la
lumière de l'histoire de la bête depuis l'offrande d'Iphigénie
au dieu Eole.
Il faut une vision
eschatologique des évènements pour s'indigner de la partialité
des Européens, qui prétendent non seulement accorder les
mêmes droits et la même légitimité internationale au conquérant
et à ses victimes et qui soutiennent en outre qu'un accord
préalable aurait été signé en secret entre les négociateurs,
selon lequel Israël cesserait de progresser sur le terrain
du moins au cours des pourparlers.
Je défie la science
historique actuelle d'expliquer des faits pourtant dûment
constatés par les huissiers d'une sotériologie qu'on appelle
maintenant des chroniqueurs et des mémorialistes et qui
enregistrent des déclarations effectivement prononcées par
le chef de la diplomatie du salut d'Israël; car si vous
n'avez pas une connaissance anthropologique des mondes oniriques
qui servent de casques cérébraux à l'humanité, comment ouvririez-vous
les yeux des générations futures sur "l'hypocrisie des
Européens", qui n'hésitent pas à "provoquer des tensions
diplomatiques à cause de la construction de quelques maisons"
et qui, dans leur "partialité constante" donnent
le sentiment de "chercher à faire peser la faute sur
Israël"?
Mes deux textes
des 24 et 31 janvier illustreront une étape nouvelle de
ma lecture anthropologique de l'histoire évènementielle,
mais nullement en raison d'une mutation de ma méthode d'analyse
et de pesée des circonstances, mais d'une modification en
profondeur du paysage inconsciemment théologique qu'occupe
la géopolitique contemporaine. Aujourd'hui, comme hier,
il s'agit de tirer les conséquences logiques de l'évolution
de la boîte osseuse d'une espèce dont les neurones ne sauraient
à la fois se trouver en route et arrivés à bon port. Mais
seule la levée de cette contradiction permettra à la science
historique de demain d'observer, non point seulement d'un
millénaire à l'autre, mais de siècle en siècle les étapes
de la connaissance et de la réflexion que la boîte osseuse
de cet animal a parcourues dans une durée mémorisée de ses
syllogismes inachevés.
L'encéphale
d'un contemporain d'Homère n'est pas le même que celui des
encyclopédistes français du XVIIIe siècle, le Moyen Age
géocentrique et rédempteur n'habitait pas la même caverne
cérébrale que la relativité générale d'Einstein, qui met
l'espace et le temps hors de la portée des équations des
ancêtres et qui réduit le calculable au mutisme. La méthode
historique et la pensée philosophique doivent désormais
fonder l'objectivité du savoir des modernes sur une distanciation
en avance sur la subjectivité mal décodée de l'époque dans
laquelle leur discipline se trouve immergée.
Je convie mes
lecteurs à débarquer dans le pays des cuirasses mentales
qui, depuis l'éjection erratique de notre espèce de la zoologie,
ont rendu l'histoire du monde schizoïde, je leur demande
de poursuivre à mes côtés la construction de la balance
à peser l'animalité théologisée de l'histoire.
*
1
- Alice au pays des merveilles
Sachez
que, le plus souvent, des évènement qui pourraient aussi
bien ne pas survenir viennent tirer la corde du sonneur
au clocher de l'histoire: cent vingt ans après l'affaire
Dreyfus, qui envoya, en 1895, un innocent à l'île du Diable,
l'arrière petit-neveu de la plus célèbre victime de l'antisémitisme
du XIXe siècle, M. Bernard Stirn, juge unique et souverain
de cette cause nationale et président de la 7e sous-section
au contentieux au Conseil d'Etat a décidé de faire carillonner
le campanile de son autorité au beffroi de la liberté d'expression
et d'opinion des citoyens.
La
finalité, sur le long terme, de cette sonnerie d'un bourdon
solitaire est de ne pas entraver l'expansion territoriale
du clocheton d'Israël au Moyen Orient par des contestations
locales de nature à ternir l'image morale d'Israël aux yeux
de la sacristie du monde qu'on appelle la démocratie; mais
la signification anthropologique de cette décision d'une
portée internationale réside dans l'interprétation des motivations
classiques alléguées par tous les Etats sur la scène de
la mappemonde, à savoir, primo, la défense traditionnelle
des "idéaux de la République", à savoir, secundo,
la sauvegarde coutumière de la "dignité humaine"
censée se trouver soudainement menacée sur tout le territoire
d'une nation par des profanateurs, à savoir, tertio,
la "protection patriotique de l'ordre public", à savoir,
quarto, le sauvetage vertueux de la "cohésion
nationale", donc de l'unité cérébrale du peuple gaulois
.
Que
tous les enfants de chœur de l'histoire de la France se
réjouissent: ce jugement des bedeaux du tricolore les délivre
de l'antisémitisme primaire, remâché et ressassé de grand-papa,
ce jugement de Clochemerle de la géopolitique contribuera
à faire entrer dans l'âge adulte la jeunesse sous-informée
du pays, ce jugement flamboyant de sottise la contraindra
à ouvrir un œil plus averti sur l'histoire véritable de
notre astéroïde.
Finies
les gambades, les dérobades et les gamineries: les Machiavel
et les Talleyrand vous appellent à retirer le bandeau des
idéalités vaporeuses ou le voile de gaze qu'Alice vous contraignait
à vous mettre sur les yeux au pays des auréoles verbales
de la démocratie.
2
- La mise à feu manquée de la planète
Voulez-vous
que je vous raconte l'histoire véritable des tiares du langage
dont notre astéroïde se couronne? Sachez que la guerre entre
Israël et le reste de la planète a été déclarée en juin
2013 et qu'elle bat son plein depuis plus de six mois sans
que personne vous en ait jamais pipé mot, sachez que Tel
Aviv a échoué in extremis à déclencher une guerre mondiale
en Syrie, alors qu'une intense accélération de la conquête
armée du "grand Israël", inaugurée en 1948, était devenue
nécessaire à l'heure où la Palestine accédait au rang spirituel
d'un Vatican de la démocratie mondiale, sachez, de surcroît,
qu'il s'agissait de rendre irréversible l'interdiction fermement
signifiée à Téhéran depuis de nombreuses années de jamais
se doter à son tour de l'arme nucléaire obsolète dont Israël
entend conserver l'exclusivité dans la région, sachez enfin,
que la résistance à cette gigantesque entreprise guerrière
a soudainement jailli d'Angleterre, où la chambre des Communes,
actuellement dominée par le parti conservateur, ainsi que
la Chambre des Lords unanime, aidées, dans une circonstance
aussi extraordinaire, par une vingtaine de députés du parti
majoritaire, ont mis soudainement le chef du gouvernement
tory, M. Cameron, dans l'impossibilité diplomatique et au
grand dépit d'Israël de précipiter le royaume de sa gracieuse
majesté dans le piège d'une guerre universelle.
3 - Ah !les enfants
Ah
!les enfants, que de secrets d'Etat bien gardés, que d'évènements
conjurés de justesse, que de drames évités par miracle!
Jamais vous n'auriez pu connaître ces mystères si le Conseil
d'Etat ne me contraignait à vous les raconter au risque
de vous faire quitter précipitamment un hexagone en bas
âge et de porter tout soudainement vos regards encore apeurés
sur le globe terrestre des adultes. Apprenez que quatre-vingts
représentants du peuple américain au Congrès ont également
osé défier Israël, apprenez sans trembler que, dans le sillage
des députés intrépides du bord de la Tamise, ces députés
ont eu l'audace d'avertir crûment le Président des Etats-Unis,
M. Barack Obama, qu'ils engageraient rien moins qu'une procédure
de destitution sauvage contre lui s'il persévérait à servir
d'otage épouvanté à une puissance étrangère et s'il s'obstinait
à céder, dans l'effroi, aux ambitions guerrières des prétendus
descendants du roi David.
Que
vous dire encore? Apprenez que la Russie et la Chine, plus
étroitement alliées que jamais, ont servi de boucliers de
la paix à une planète placée au bord du gouffre par les
matamores d'Israël, apprenez que les missiles de longue
et de moyenne portée de Moscou et de Pékin ont préservé
Damas des dégâts qu'une fantastique canonnade aurait provoqués
en Syrie et du massacre des habitants qui en serait résulté
sur tout le territoire du pays. Une puissante flotte de
guerre américaine se trouvait concentrée en Méditerranée,
prête à déclencher la tuerie réclamée par Israël à cor et
à cris. Mais le pape François a réussi à alerter la conscience
morale d'un milliard et demi de chrétiens, tant catholiques
que protestants; et ces croisés de la démocratie mondiale
ont aidé le monde à étouffer dans l'œuf la guerre titanesque
dont le renvoi sine die a fait enrager Israël sur toutes
les ondes en France et en Europe.
4 - L'avènement des férocités démocratiques
Prenez
une longue vue et observez de sang froid la signification
morale et la nouveauté méthodologique de la science anthropologique
d'avant-garde dont on vous cache les preuves et les démonstrations:
pour la première fois dans l'histoire du monde, le Saint
Siège a lancé sur le front d'une guerre secrète et sans
merci contre Israël quatre-vingts de ses ambassadeurs accrédités
dans toutes les grandes capitales; et l'on a vu un Vatican
hors jeu sur la scène internationale depuis le XVIIIe siècle
débarquer à nouveau sur les planches du vaste théâtre qu'on
appelle l'histoire universelle. Du coup, il est devenu loisible
à Moscou, à Pékin et à une Maison Blanche aux abois de desserrer
quelque peu l'étau des sanctions économiques que la planète
de la sainteté démocratique exerçait sur l'Iran; et Téhéran
a quelque peu échappé à l'asphyxie, au grand dam de la diplomatie
française, dirigée par un fou furieux, un certain Laurent
Fabius.
Cette
mutation en profondeur de l'éthique d'un monde ensauvagé
par son vocabulaire de la Liberté amorce un tournant décisif
et en profondeur de l'histoire du XXIe siècle; car, depuis
la tentative de blocus de l'Angleterre par Napoléon 1er,
deux siècles de la morale internationale de type démocratique
avaient fait courir l'humanité en direction d'une férocité
nouvelle des Etats, celle qui dotait le sceptre du jus
gentium du pouvoir hallucinant d'affamer des peuples
et des nations de cent millions d'habitants. Le Vatican
a réussi à ressusciter l'éthique évangélique antérieure
à l'alliance de Washington et de Tel Aviv avec le meurtre
idéalisé et au règne du séraphisme carnassier des idéalités
carnassières dont ces deux Etats ont fait leur drapeau au
paradis des abstractions.
Comment
se fait-il que vous n'ayez rien su du pain bénit des démocraties,
comment se fait-il que l'histoire réelle des lions rugissants
dans les cages du dieu Liberté se trouve entièrement soustraite
à vos regards d'enfants domptés dès le berceau? La cause
en est parareligieuse et catéchétique: on vous contraint
à lire le bréviaire du salut qui vous raconte les aventures
angéliques d'Alice dans un royaume enchanté, on vous contraint
de vous agenouiller sur le prie-Dieu d'Alice au pays des
hosties du langage dont le credo a succédé à celui de feu
la civilisation du sang des ciboires.
5 - Que sait votre classe dirigeante
?
Mais
croyez-vous vraiment que vos gouvernements ignorent autant
que vous-mêmes l'identité des maîtres du jeu du monde et
les cartes majeures qu'Israël et l'Amérique tiennent entre
leurs mains? Pensez-vous vraiment que les hautes fonctions
des dirigeants que vous avez élus sans seulement connaître
leurs attaches doctrinales demeurent dans une ignorance
et une sottise puériles et que les vrais ressorts de la
politique des idéalités confessionnelles de 1789 demeurent
cachés à leurs yeux d'enfants? Dans ce cas, qui dispose
du pouvoir fabuleux de contraindre les marmots qui règnent
sur vos têtes à lire le gentil livre d'images qu'Israël
enseigne à la planète? M. Sarkozy a réussi, cinq ans durant,
à brandir jusque dans le bureau ovale de la Maison Blanche
le mythe de la menace nucléaire que l'Iran était censé exercer
sur tout le globe terrestre. Dix ans plus tôt, en 2003,
M. Anthony Blair s'était illustré aux côtés du célèbre roi
des magiciens, le général Powell, à agiter à son tour la
fiole ensorcelée d'Israël sous les yeux de tout le genre
humain, celle d'une apocalypse imaginaire dont Saddam Hussein
aurait découvert la formule dans les sables du désert.
Croyez-vous
que ces fabricants de vos horloges savent ce qu'ils se racontent?
Sachez que M. Sarkozy s'imaginait avoir toute sa tête quand,
comme il rappelé plus haut, il avertissait sans relâche
M. Obama du prétendu péril qu'une bombe nucléaire iranienne
- aussi inutilisable que toutes ses consœurs - ferait courir
à Israël? S'il s'est fait aussitôt rappeler vertement à
sa pendule par le Conseil représentatif des institutions
juives de France (CRIF) pour avoir commis l'inexplicable
imprudence de confier un instant les chronomètres du Quai
d'Orsay à M. Védrine, c'est qu'il ignorait sincèrement l'évidence
que l'arme nucléaire n'est pas une arme de terrain et qu'il
s'agit seulement de l'affichage international d'un cadran
métaphorique dont Israël contraint les Présidents de la
République française à mouvoir les aiguilles.
6
- Que savait M. Sarkozy?
Mais
quel était le sérieux de l'information diplomatique et le
degré de savoir de M. Nicolas Sarkozy quand, à l'occasion
solennelle du défilé du 14 juillet 2008 sur les Champs Elysées,
il a installé le Président Bachar Al Assad à ses côtés?
Cet hôte d'honneur de la France faisait-il de la Syrie l'alliée
réelle de l'Amérique et de l'Europe? Le Président de la
République de l'époque se savait le serviteur de Washington:
il s'agissait de détourner Damas du soutien à l'Iran et
au Hezbollah. Mais savait-il, pour autant, que le combat
du monde entier contre Téhéran n'était que l'expression
de la volonté commune au Conseil représentatif des institutions
juives de France (CRIF) et au Comité israélo-américain
des affaires internationales (AIPAC), dont la politique
extérieure de Washington est largement tributaire?
Sachez,
les enfants, que le recul intellectuel des chefs d'Etat
de la religion mondiale de la Liberté est fort limité. M.
Sarkozy était piloté par un totem verbal à l'usage des enfants
de la politique, "l'équilibre dans la région", mais
sa réflexion sur le concept d'équilibre demeurait d'une
pauvreté politologique atterrante : il ne se disait en rien
que tout "équilibre" n'est jamais que l'expression
du rapport des forces entre tels Etats à tel moment et à
tel endroit de la planète et que "l'équilibre au Moyen
Orient" assurait provisoirement à Israël un statut dominant
au détriment non moins provisoire de Téhéran. M. Sarkozy
ne pesait nullement le vocabulaire de la précarité qui fait
le tissu des jours, alors que les grands hommes d'Etat savent
où le char de l'histoire conduit le langage des nations
et des civilisations. Inutile de citer à la barre du tribunal
du temps des figurants qui ne connaissent ni l'auteur, ni
le sujet de la pièce, ni les planches du théâtre sur lequel
le drame se déroule d'acte en acte.
7
- Que sait M. Hollande ?
Vous
me direz que M. Hollande, lui, avait parfaitement compris
le décompte du temps que Tel-Aviv adresse à la montre de
poche des Gaulois d'aujourd'hui et qu'il s'est hâté, avant
même de se trouver élu par le peuple français, d'appeler
M. Laurent Fabius à tirer avant l'heure de son gousset le
même chronomètre de la politique extérieure du pays qui
avait conduit M. Kouchner à faire échouer au profit d'Israël
le projet d'union des pays riverains de la Méditerranée.
Sachez que votre classe dirigeante ne feint pas d'ignorer,
mais qu'elle ignore réellement les véritables rouages de
la géopolitique et que les bras lui en tombent d'apprendre
quelquefois et tout soudainement le nom de ses maîtres.
La
preuve? Si M. François Hollande était un connaisseur des
arcanes de la scène internationale, il n'aurait pas, une
fois de plus et dans son allocution solennelle du 31 décembre
2013 aux Français, fait allusion au prétendu gaz sarin qui
a failli déclencher une guerre pour rien en Syrie; car il
aurait lu le rapport de Theodor Postol, professeur à la
haute école de technologie de l'Institut du Massassuchett
et de M. Richard Loyd, ancien inspecteur de l'armement à
l'Organisation des Nations Unies, qui ont ouvert les yeux
au Président Obama il y a plus d'un mois de cela et qui
lui ont démontré, preuves à l'appui, que les services secrets
américains avaient été trompés par Israël et par l'Arabie
saoudite; et il saurait que la déclaration de guerre des
Etats-Unis à la Syrie via le Congrès date du 12 décembre
2003. On y lit déjà que la Syrie acquerrait "des armes
de destruction massive qui menaceraient la sécurité au Moyen
Orient et les intérêts de la sécurité nationale des Etats-Unis".
8 - La nouvelle stratégie d'Israël
Mais
le verdict d'un Conseil d'Etat décidément mieux informé
que l'Elysée fait prendre un retard non moins involontaire
que le précédent à une classe dirigeante française dont
la candeur politique garantit l'innocence. Car la perte
de la naïveté infantile conduit nécessairement à une complicité
voulue. Si l'élite au timon des affaires de la France devait
demeurer en bas âge et persévérer à ignorer qu'Israël s'engage
maintenant dans une stratégie de la dévotion astucieusement
adaptée à la situation, elle ne comprendrait goutte au déplacement
subit et imprévu des pièces du jeu sur l'échiquier du monde
auquel nous assistons, et l'on verrait une République française
noyautée du haut en bas de son appareil d'Etat ignorer comment
Tel-Aviv raisonne sur la scène internationale d'aujourd'hui.
Comment
le Quai d'Orsay apprendrait-il jamais que Washington continuera
d'exercer sa domination sans partage sur une Europe vigoureusement
vassalisée sous le sceptre de l'OTAN dès lors que la découverte
de la surveillance téléphonique minutieuse de tous les dirigeants
européens par les services secrets des Etats-Unis n'a pas
suffi à rendre le spectacle de la vassalisation d'un Continent
et d'une civilisation entière plus visible qu'auparavant?
Aucun parti politique d'aucune nation de l'Europe n'a décidé,
pour autant, de s'armer d'un embryon de regard sur l'occupation
militaire qui, depuis soixante-dix ans, met le berceau de
la pensée critique sous tutelle et prive un demi milliard
de simianthropes des armes de la souveraineté; et pourtant,
la donne a quelque peu changé, parce que Washington déclare
maintenant - et le plus officiellement du monde - que la
surveillance des conversations privées et publiques des
chefs d'Etat étrangers serait suspendue, mais que le principe
des écoutes demeurait légitime, parce que "nécessaire
à la sécurité des Etats-Unis".
Comment
plier dorénavant l'échine sous le soleil de l'histoire sans
que la docilité commence de s'étaler au grand jour? De plus,
les ressources financières des empires ne sont pas illimitées.
La dévalorisation accélérée des montagnes de dollars en
papier doré que Washington ne cesse de déverser sur un monde
solidement enchaîné à ses ambitions fondent comme neige,
ce qui interdira bientôt au nouvel empire romain de payer
le coût vertigineux du maintien sur pied de guerre d'une
armée immense - un million et demi de légionnaires répartis
entre plus de mille garnisons sur toute la terre habitée
, dont deux cents armées jusqu'aux dents en Allemagne et
cent trente sept en Italie. Elle ne durera que quelques
années encore, la domination dispendieuse de la flotte de
guerre américaine sur toutes les mers du globe. Comment
Israël répond-il d'ores et déjà à cette situation nouvelle?
9
- L'accusation de trahison d'Israël
Sachez, les enfants, que, dans un contexte aussi précaire,
les stratèges du messianisme politique songent subitement
à se rapprocher de l'Europe de demain, mais le plus prudemment
possible et seulement à petits pas, parce que, dans le même
temps, Tel-Aviv veillera, pour longtemps encore à garder
les deux fers au feu. Comment Ménélas hâterait-il la prise
de Troie si l'histoire de la planète entière vire soudainement
de bord? Dans combien de temps Eole soufflera-t-il de nouveau
dans la bonne direction? Et l'Achéen se dit: "Le moment
est propice pour un coup de main. Emparons-nous sans coup
férir de la vallée du Jourdain et arrachons en hâte au Congrès
américain un triplement de son soutien financier au titre
des dommages et intérêts immenses qui nous sont dus à la
suite du comportement hostile à nos intérêts de la Maison
Blanche en Syrie et en Iran."
Mais
Israël se le tient-il si peu pour dit qu'il est revenu sans
tarder et spectaculairement à la charge. On sait, j'y reviens,
que le Comité des Affaires Internationales Americano-Israéliennes
est le plus puissant géant diplomatique de la planète et
qu'il s'agit de rien moins que d'un Etat dans l'Etat. Son
contrôle de l'exécutif, du législatif et du judiciaire américains
dépasse de loin ceux de son allié européen, le Conseil
représentatif des institutions juives de France. L'objectif
actuel de l'assaut de l'Aipac est de biffer purement et
simplement les clauses de l'accord diplomatique solennellement
conclu entre le monde entier et l'Iran. Pour cela, il lui
faut contourner la légitimité même du veto absolu que la
Constitution des Etats-Unis a placé entre les mains du Président
afin de l'armer, au besoin, contre toute tentative partisane
de ruiner de l'intérieur la confiance des nations du monde
entier en la fiabilité et le sérieux des traités signés
par l'Etat américain avec tous ses partenaires sur la scène
internationale.
Mais
il existe également une commission parlementaire expressément
appelée à s'opposer, en cas de nécessité extrême, à l'autorité
constitutionnelle d'un Président qui trahirait le pays et
le livrerait pieds et poings liés à une puissance étrangère.
Certes, cette commission de salut public se trouve prudemment
entravée du fait qu'elle doit rallier les deux tiers de
ses membres, c'est-à-dire soixante sept représentants et
sénateurs patriotes, qui infirmeront le veto d'un traître
à la patrie. Le crime est-il suffisamment criant?
La bataille fait rage. Le Titan sioniste a déjà acheté cinquante
deux voix. Il ne lui en manque que quinze pour renverser
l'accusation et pour livrer le pays à une puissance étrangère
sous couvert d'assurer son salut. Il ne reste au Président
insulté par ces soupçons qu'à jouer la montre contre un
groupe de pression d'une puissance sans équivalent dans
le monde et seul en mesure d'accuser froidement de trahison
la tête de l'exécutif d'une grande nation.
Quelles
sont les chances d'Israël de prendre une revanche, glorieuse
à ses yeux, sur tous les autres pays démocratiques du globe
terrestre - alors que le pape François a aussitôt compris
l'immensité de l'enjeu et déclare qu'il se rangeait résolument
du côté de Téhéran? Certes, quand M. Biden, vice-Président
des Etats-Unis ou M. Kerry, chef du Département d'Etat,
tentent sans relâche et dans un va-et-vient incessant entre
Washington et Tel Aviv, de retarder la colonisation guerrière
de la Cisjordanie, le monde entier s'esclaffe au spectacle
du hochet ridicule que les hautes fonctions de ces deux
hommes les a réduits à brandir dans le vide. Certes encore,
le monde entier les observe repartir et revenir avec, sur
les bras, une décision tranquille de plus de Tel-Aviv de
poursuivre la construction de milliers de logements nouveaux
en Palestine.
Mais MM. Kerry et Biden ne savent pas encore, semble-t-il,
que le Sénat et la Chambre des représentants sont entièrement
tombés entre les mains d'Israël et que les décisions du
Congrès de financer ce pays à fonds perdus sont payées depuis
belle lurette sur les sommes astronomiques que le contribuable
américain verse aveuglément à Israël. MM. Kerry et Biden
n'ont-ils pas d'yeux pour les cahots de la calèche américaine
sur la route de Montreux, ne savent-ils pas que le même
président qui avait conclu, trois mois plus tôt, un accord
avec Téhéran a fait revenir M. Ban-Ki-Moon sur son invitation
de l'Iran à Montreux et que M. Kerry a fait machine arrière
sur les bords du Léman. Qui tient les brides? Le
carrosse à deux cochers basculera-t-il dans l'ornière ?
10
- Le sionisme de demain
Sachez
que, six mois seulement après le revers spectaculaire d'Israël
en Syrie et en Iran, le sionisme a trouvé son second souffle
à l'échelle du monde, parce que les cartes du jeu obéissent
maintenant à un nouvel équilibre des forces au sein de tous
les Etats-enfants: car, d'un côté, le capitalisme bourgeois
brinqueballe sur un échiquier international en perdition,
de l'autre, une nouvelle classe dirigeante forge ses armes
à toute allure sur l'enclume titanesque d'un sionisme en
acier trempé - la capitale en sera un Hercule. Quand Jérusalem
aura été reconquise maison par maison, cette ville se placera
au centre de la toile.
La
revanche posthume de Karl Marx se dessine sur le cadran
des diagnostics de Chronos; si le capitalisme résiste à
l'évangélisme médicamenteux qu'on appelle l'utopie, le naufrage
de ce système économique n'en sera que retardé de quelques
décennies . Comment le sursaut du moribond sous l'égide
de la production massive de biens à bas prix en provenance
de la Chine guérirait-elle une maladie incurable ? L'avenir
politique d'Israël réside dans le no man's land économique
qu'ouvrira le second trépas mondial d'un univers industriel
et commercial broyé dans les mâchoires d'un étau : le machinisme
n'échappera pas à la double denture de la surproduction
et de la sous-consommation des masses .
11 - La géodomie de Jahvé
Sachez, les enfants, que les anthropologues de génie dont
dispose Israël ont approfondi la science psychobiologique
balbutiante d'un genre humain encore privé de recul intellectuel
digne de ce nom. Sachez que les laboratoires de psycho-biologie
de cet Etat viennent de mettre en pleine lumière la dichotomie
native qui caractérise le cerveau embryonnaire de cette
malheureuse espèce depuis l'apparition de ses dieux schizoïdes.
Si vous plongez dans la boue du temporel l'animal branché
depuis le paléolithique sur des mondes merveilleux, mais
imaginaires, il périt d'asphyxie au ras du sol, mais si
vous lui administrez l'antidote du fantastique religieux
biphasé qui l'habite, il tombe dans le délire. C'est pourquoi,
au XVIIIe siècle, la bête théologique n'a oublié un instant
la démence de ses rêves sacrés que pour leur substituer
un nouvel empire des songes diviseurs, celui du rêve démocratico-républicain.
Mais l'engloutissement actuel de cette ultime fantasmagorie
politico-religieuse livre l'humanité aux mythes artificiels
que sécrète désormais le fabuleux chimique de la drogue.
Dans
ce contexte, seul Israël a conservé intacte la double face
de la vie onirique simiohumaine des origines, celle qui
s'enracine à la fois dans un territoire arpentable et dans
les nues. C'est cela qu'ignorent les sciences humaines sans
recul d'aujourd'hui et c'est cela qui permet à Israël d'enraciner
la topologie de son "Connais-toi" distancié dans l'arrière-monde
d'un sionisme bicéphale. Les deux autres monothéismes schizoïdes,
le chrétien et le musulman, mettent en scène des dieux qui
s'avouent méta-territoriaux, donc ouvertement scissipares,
tandis qu'Israël transporte partout un dieu autarcique et
indélocalisable.
Jahvé
est né à tel endroit précis du globe terrestre et il a planté
à jamais sa tente dans un sol avec lequel il fait corps
depuis l'enregistrement de son acte de naissance dans le
livre de la Genèse. Le fidèle bipolarisé par
ce dieu-là depuis trois millénaires s'agrippe à son jardin
et y cultive ses légumes et ses fleurs, mais avec une ténacité
et un acharnement que rien ne saurait terrasser. Un peuple
capable de véhiculer ses hectares célestes dans sa tête
se reconstruit en tous lieux la demeure autochtone d'un
dieu géodome, celui dont la spécificité théologique ne se
trouvera décryptée que le jour où le diagnostic de la schizoïdie
viscérale qui frappe les premiers évadés de la zoologie
connaîtra les causes chromosomiques de la guerre entre les
dieux polychtoniens et le dieu chtonien de la Judée. Telle
est la source semi-animale de l'élan nouveau qu'Israël a
pris sur la planète d'Eole.
12 - Le contre-feu
Mais
voici le contre-feu: si l'Iran ne rencontre plus d'obstacles
à livrer au Hezbollah les armes les plus modernes, puisque
le territoire de la Syrie a été libéré, si le Brésil, la
Russie, la Chine, l'Inde et l'Afrique du Sud déplacent progressivement,
mais irrésistiblement le centre de gravité de la planète
en direction de l'Asie, si l'Occident civilisé, mais décérébralisé,
n' a plus d'autres armes de la pensée civilisatrice que
la Liberté de délivrer des escrocs russes à leurs geôles
au nom du droit d'escroquer, que la Liberté de glorifier
les exploits urinaires des pisseuses russes dans les églises
au nom du droit de pisser sur les autels, que la Liberté
de chanter le mariage sodomite ou saphique au nom des droits
universels de l'humanité, que la Liberté de convoler
à titre fictif au nom du droit à de justes noces, de quel
côté croyez-vous que la pensée rationnelle va porter la
hotte du monde? Ne voyez-vous pas que la raison commence
d'ouvrir les yeux sur les pérégrinations mentales de l'évadé
des forêts, ne voyez-vous pas que la décision du Conseil
d'Etat de la France jette un voile sur les véritables rouages
du globe terrestre?
Apprenez donc, les enfants, à lire, avec des yeux dessillés
les aventures d'Alice au pays des enchantements vocaux d'une
démocratie mondiale miraculée par son vocabulaire. Que fait
d'autre M. Valls, Ministre de l'intérieur de la France quand,
d'un claquement des doigts, il convoque le Conseil d'Etat
et lui fait infirmer en moins de temps qu'il ne faut pour
le dire un jugement rendu par le tribunal administratif
de Nantes, auquel la France ne reproche que le blasphème
d'avoir été prononcé au détriment des intérêts territoriaux
d'Israël en Palestine, que fait-il d'autre, dis-je, que
d'élargir la définition du sacrilège dans le Littré
et de l'étendre arbitrairement à la profanation de l'omnipotence
et de l'omniprésence du peuple de Jahvé en Palestine? Prenez-vous
vraiment M. Valls pour une tête brûlée, croyez-vous vraiment
qu'il se serait rué les yeux fermés dans le risque de voir
son orthodoxie réfutée de nouveau? Sachez que ce lecteur
assidu de Lewis Carroll sait fort bien que le fantastique
démocratique est un conte rédigé à l'usage des enfants d'un
monde à catéchiser de la tête aux pieds et que le royaume
des abstractions miraculées et hissées dans le ciel du langage
ne sert qu'à masquer le spectacle du noyautage confessionnel
des Etats par les agents du surnaturel pseudo démocratique
israélien.
13
- Les ailes de cire de la Liberté
Pour la première fois, un juge siégeant au Conseil d'Etat
détient le pouvoir fabuleux de dicter à toute la justice
administrative de la nation et au nom de la plus haute juridiction
du pays les sentiers sur lesquels la liberté des citoyens
de juger la politique de leurs dirigeants se trouvera restreinte
chaque fois que les conquêtes d'Israël en Judée se révèleront
menacées de délégitimation aux yeux des Etats démocratiques
- ce qui renverse le fondement même des Républiques. Car,
disait Montesquieu, toute décision du pouvoir exécutif qui
s'impose de force à l'ordre législatif et à l'ordre judiciaire
leur retire, en fait, leurs compétences constitutionnelles
propres - et cela sous les prétextes angéliques à souhait
dont le despotisme use depuis le fond des âges, à savoir
la feinte protection de l'ordre public et la défense simulée
d'une liberté aux ailes de cire.
Il
y a deux ans, M. Régis Debray et d'autres intellectuels
de renom ont tenté de débattre à l'Ecole Normale supérieure
de la rue d'Ulm du blocus aux yeux de la terre entière d'une
ville d'un million sept cent mille habitants ; et l'on a
vu le même juge du Conseil d'Etat interdire ce débat à la
plus prestigieuse de nos grandes écoles et cela, une fois
de plus, au nom des relations étroites que ce creuset des
agrégés de Lettres et de philosophie entretient avec le
seul affranchi des règles du droit international
de la planète.
J'approfondirai la semaine prochaine la signification
anthropologique de mes allusions énigmatiques aux embarras
de la flotte des Achéens devant les murs de Troie et aux
efforts de Ménélas de se rendre le dieu Eole favorable.
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