Il
suffirait à une poignée d'hommes politiques européens de quelques mots bien
assénés pour renseigner le suffrage universel du Vieux Continent des
raisons simples et évidentes pour lesquelles l'empire américain tente de
dresser le Vieux Monde contre la patrie de Tolstoï et de Dostoïevski.
Voici les
clés de cette énigme: sept nations se trouvent officiellement détentrices
de la foudre nucléaire, les Etats-Unis, la France, l'Angleterre, la Russie,
la Chine, l'Inde et le Pakistan. Mais il ne suffit pas de disposer de
l'arme apocalyptique pour exercer une hégémonie de type biblique. La Chine
court en tête des nations proches d'insuffler à la terreur une âme
économique, l'Inde suit Pékin avec un retard de quelques enjambées - mais
l'essentiel est de se trouver sur la piste d'envol. Deux Etats,
l'Angleterre et la France, ayant perdu leur empire colonial, se sont
retirées de l'arène où d'autres puissances jouent au pilotage du globe
terrestre. Le Pakistan, géant prématuré, piétine sur le seuil dans
l'attente d'une audience internationale qui répondrait à sa fierté de
détenir une arme inutilisable.
Mais seule
la Russie avance résolument sur la voie appienne des armes para-nucléaires
de demain. La progression technologique de l'ex-empire des Tsars repose sur
le perfectionnement à l'infini de l'armement classique. A l'heure de
l'informatique et des logiciels, un Etat inventif prend rapidement une
avance et qui condamne le sceptre nucléaire à un rapide vieillissement de
son arsenal et de ses canonnades.
D'ores et
déjà, l'issue de cette confrontation ne fait plus de doute. La puissance
militaire mondiale des Etats-Unis repose sur un adage vieux de deux
millénaires, selon lequel la domination des mers serait la clé de la
suprématie invincible d'une nation sur toutes ses consœurs. Cette fixation
des esprits sur l'hégémonie navale d'autrefois est décédée dans les
dernières années du XXe siècle, quand les monstres d'acier à propulsion
nucléaire qui avaient succédé aux caravelles de Charles Quint ou de
Guillaume le Conquérant sont devenues pulvérisables en haute mer et à des
milliers de kilomètres des côtes du viseur qui les prend pour cibles: des
missiles tirés du rivage et enfouis à cinquante mètres sous la terre ne
laissent aucune chance de surnager aux tortues porteuses d'aéronefs sur
leur carapace d'acier.
L'avance
technologique des armes téléguidées de la Russie et sa maîtrise des
missiles miniaturisés ont convaincu l'empire américain d'achever en toute
hâte la vassalisation économique et militaire du Vieux Monde et de tenter
de lancer précipitamment le continent de Copernic à l'assaut, par
procuration, de l'ex-empire des Tsars. Une telle stratégie n'est évidemment
possible qu'en raison de la sous-information et de la pauvreté de la
réflexion stratégique d'un continent fatigué et dont la connaissance de
l'histoire et de la politique s'arrête aux portes de la science des armes
modernes. Il faut avoir passé par Saint-Cyr ou par l'Ecole de guerre, comme
le Général de Gaulle ou Jacques Chirac, pour porter sur les Etats et sur le
cerveau de la classe dirigeante élue au suffrage universel un regard
instruit à l'école des conquérants qui, depuis des siècles, ont démontré
que la clé de la politique est dans la science de la guerre.
C'est
pourquoi on voit des enfants de chœur comme Mme Merkel ou François Hollande
monter sur la scène du monde en tenue de majordomes décorés d'un mythe de
la Liberté écrit sous la dictée d'un maître.
Monsieur le
Député,
1 - Le retard intellectuel des classes dirigeantes
A
l'origine, le pouvoir populaire direct, donc encore petitement localisé,
voyait les adultes de sexe masculin se rassembler plusieurs fois dans
l'année et souvent en armes sur la place publique de leurs cités aux fins
d'y trancher sans barguigner des affaires publiques à la majorité de mains levées.
Mais sitôt que cette forme expéditive du gouvernement citadin s'est exercée
sur un territoire relativement étendu et comportant plusieurs villes et de
nombreux villages, la minusculité d'un pouvoir physiquement présent sur
quelques lopins est évidemment devenue inapplicable aux casus belli
les plus cruciaux.
De plus,
Athènes a rapidement démontré l'incapacité naturelle des peuples de ce bas
monde, tant citadins que ruraux, de diriger une nation à l'échelle du monde
pourtant restreint et lent de leur époque et de mettre occasionnellement et
pour quelques heures seulement le siècle de leur temps à l'écoute des
enseignements simplistes et sporadiques de la vie champêtre. Périclès
lui-même était rapidement devenu l'otage de la place publique où un pouvoir
seulement corporel courait dans le vide et la bride sur le cou.
La
désastreuse expédition de Sicile a tout de suite démontré aux chefs d'Etat
que les démocraties à mi-temps ont besoin de sécréter une classe de
transfuges permanents et qui mettront à quia la petitesse originelle des
nations livrées à l'incompétence et à l'amateurisme populaires. Mais cette
première élite d'une vie publique héritée du pouvoir de type corporel des
origines ne saurait se montrer tout de suite suffisamment instruite et
réfléchie pour élever aussi instantanément que spontanément une science de
l'histoire au-dessus de la gestion des tracasseries de villages.
2 - Comment instruire des élites vouées à l'éphémère ?
Et
pourtant, M. le Député, les démocraties devenues trans-municipales
demeurent nécessairement condamnées à se nourrir leur vie durant de la
fiction qui a donné naissance à leur vicariat originel, celui d'une
collaboration censée étroite et naturelle entre les peuples et leurs
dirigeants d'un moment, donc d'une interdépendance harmonieuse entre la
tête microscopique et les jambes provisoires d'un seul et même corps
électoral artificiellement unifié.
Mais alors,
un pouvoir politique précaire, parce que soumis à des réélections
rapprochées et livré à une autorité éphémère par nature et par définition
ne présente-t-il que l'avantage indirect d'empêcher du moins qu'un abîme
grandissant ne s'ouvre entre le peuple et ses dirigeants d'un moment, mais
seulement, hélas, faute qu'une classe dirigeante d'un grand génie trouve le
temps de s'éduquer? Car la brièveté du pouvoir le prive du socle de toute
légitimité solide. Si Néron avait dû demander tous les trois ou quatre ans
aux Romains : "Voulez-vous continuer avec moi?", il n'y
aurait plus de tyrannie, mais plus de légitimité réelle non plus, tellement
l'autorité véritable se fondera toujours sur la durée dans l'esprit du
genre humain.
C'est
pourquoi l'inaptitude des classes dirigeantes rudimentaires des démocraties
modernes à conquérir rapidement la hauteur de vues et les savoirs
nécessaires à leur fonction et à leur vocation s'est inévitablement révélée
aux premiers anthropologues de la politique, ce qui n'a cessé de poser aux
cités la question la plus fondamentale de toutes, celle à laquelle l'audace
de votre initiative a donné une acuité appelée à révéler rapidement sa
portée internationale.
Car le
spectacle de la médiocrité des élites dirigeantes élues par un peuple
encore sous-informé de la nature de l'échiquier du monde a bien vite
débarqué dans l'histoire tragique et sanglante des démocraties modernes:
souvenez-vous de la mise en scène atterrante du désarçonnement des Etats
européens entre 1919 et 1940, à l'heure où il s'est révélé impossible
d'instruire la caste inexpérimentée hissée au pouvoir par le peuple et de
l'informer de la nature de l'alliance du socialisme messianisé classique
avec le nationalisme spartiate du IIIe Reich - puis, entre 1945 et 1989,
quand les cerveaux dirigeants, donc censés pensants, n'ont pas réussi à
conquérir une connaissance anthropologique de l'eschatologie
politico-religieuse des marxistes et, en général, de la nature
viscéralement onirique de l'encéphale des évadés de la zoologie.
M. le
Député de l'intelligence de la France, cette question darwinienne aurait dû
se poser aux sciences humaines dès le XVIIIe siècle, puisqu'elle résultait
de l'avènement, deux millénaires auparavant, d'une mythologie du salut
universel et de l'ubiquité d'une délivrance miraculée du genre humain. Ces
phantasmes politiques avaient conduit le fabuleux chrétien non seulement à
abolir purement et simplement la propriété privée, mais à la démence
d'éradiquer de surcroît les neurones et les chromosomes qui pilotent le
fantastique cérébral dont ce malheureux animal se trouve habité de
naissance. Si vous ne faites pas débarquer une psychobiologie, même
élémentaire, dans la politologie mondiale d'aujourd'hui, la connaissance du
genre humain dont témoignera votre parti en demeurera au siècle de
Voltaire, qui rêvait de remplacer le Dieu des marmites infernales par un
Dieu de bonté.
3 - De la nature des grands Etats
De nos
jours, l'alliance de principe de l'utopie politique des premiers chrétiens
avec les restes de la mystique dialectisée de Karl Marx - ce pacte se
fondait sur l'espérance du débarquement, supposé imminent, mais au forceps,
d'un succédané plus satisfaisant que le précédent du royaume sanglant des
cieux sur le globe terrestre - cette alliance cruelle et carnassière,
dis-je, du paradis et de l'enfer a cessé de se révéler périlleuse, du moins
dans l'immédiat, et n'appelle plus en rien le fervent apostolat d'une
pensée rationnelle résolument d'avant-garde.
En revanche
une anthropologie nouvelle est appelée à monter en première ligne: car il
s'agit d'éduquer la prochaine élite politique de la démocratie mondiale,
dont la pensée sera appelée à combattre une ignorance inconnue jusqu'à
présent, celle dont souffrent désormais les Républiques fondées sur le
dogme planétaire de l'infaillibilité d'un suffrage universel
mystérieusement inspiré à sa propre écoute. A ce titre, cette autorité
collective méconnaît les fondements tout humains des axiomes et des
postulats réputés salvateurs qu'affiche la démocratie mondiale messianisée
d'aujourd'hui. "Dieu" a passé la main: il a cessé de s'adresser
seulement aux quelques chantres de sa grandeur qu'il était censé avoir
triés sur le volet. Il y a gagné une audience nouvelle - celle des masses
grisées par le mythe de la Liberté. Mais la passivité dévote des
démocraties et leur docilité rivalisent désormais avec l'obédience
religieuse des masses d'autrefois.
Cette
ignorance des secrets anthropologiques de la piété est mal inspirée. Elle
s'offrira demain à la pesée d'une France mieux informée des sommeils et des
réveils ravageurs du sacré. Observez les paramètres de la pseudo réflexion
contemporaine concernant les léthargies et les sursauts eschatologiques des
empires démocratiques - car le monde moderne s'est construit sur le songe
de l'indépendance innée et de la souveraineté naturelle des masses.
Celles-ci sont censées donner un souffle politique bénéfique par définition
à un suffrage universel rédempteur. Croyez-vous, M. le Député, que les
"Républicains" pourront se permettre d'ignorer longtemps
encore les entrailles et le cerveau du nouveau guide suprême du genre
humain - ceux du dieu Liberté ?
On a pu
observer tout récemment le type d'ignorance finaliste et d'incompétence
scolastique propres à toute la classe dirigeante européenne d'aujourd'hui:
souvenez-vous du comportement d'enfant rusé de Mme Merkel face à un
Vladimir Poutine sagement réaliste. Aussi longtemps qu'il aura suffi à la
Chancelière de s'affairer autour d'une nation des lessives et des confitures
et de bien gérer le ménage d'après guerre des Germains mis à la rude école
d'un empire étranger et domestiqués pour longtemps, aussi longtemps,
dis-je, que cette ménagère aura paru armée d'une connaissance suffisante
des fourneaux et de la gastronomie réservées aux chefs des démocraties
actuelles, elle a semblé faire l'affaire. Mais sitôt que la planète des
décérébrés retrouvera son allure transculinaire, il apparaîtra que cette
Egérie des marmites ne comprend goutte au train des Etats vivants et des
empires en mouvement.
M. le
Député, vous avez pris rendez-vous avec l'histoire réelle des Etats - mais
c'est le monde entier qui attend une science anthropologique de la
politique. Les "Républicains" sont-ils plus informés de la
découverte de l'évolutionnisme en 1859 et de la psychanalyse en 1900 que
les chrétiens du XVIIe siècle de l'astronomie de Copernic ?
4 - Les Cathares du marxisme
G.K.
Chesterton (1874-1936) prophétisait que le monde serait dirigé par des
ménagères. C'est dans un esprit d'institutrice-modèle et d'élève
compénétrée d'évangélisme scolaire que Mme Merkel a vivement reproché au
successeur des Tsars d'avoir violé un ordre international censé immobilisé
pour l'éternité, puisque le mur de Berlin était tombé sur le modèle de la
chute des murs de Jéricho. La Chancelière se présente en pédagogue d'une
démocratie mise à l'abri des enseignements de l'histoire réelle des Etats.
C'est à ce titre, et à l'instar d'un Barack Obama, qu'elle affecte
d'ignorer qu'un gouvernement russe digne de ce nom ne saurait renoncer à
l'ambition de toutes les grandes nations de conquérir les frontières que
requièrent l'étendue de leur territoire et la masse de leur population. On
ne dirige pas davantage la Russie à l'échelle du Lichtenstein que la France
à l'échelle du Montenegro. M. le Président du Cercle Nation et République,
que pensez-vous de la postérité à donner au traité de Westphalie de 1648,
qui avait interdit aux Etats civilisés de se mêler de la politique
intérieure des autres Etats?
Quand bien
même l'ex-empire des tsars aurait été vaincu en toute loyauté sur le champ
de bataille, donc par la seule force du glaive d'un Alexandre invincible,
aucun dirigeant russe d'envergure ne saurait délégitimer la vocation
naturelle et propre à cette nation depuis plus de trois siècles de s'ouvrir
- et l'épée à la main au besoin - le libre accès à la Mer Noire et à la
Méditerranée. Tout chef d'Etat de ce pays qui renierait l'esprit de la
politique de Pierre le grand et de la grande Catherine se verrait reprocher
sa pleutrerie et n'éviterait le gibet qu'en raison de l'instauration,
depuis 1996, d'un moratoire sur les exécutions en Russie.
M. le
Député, quelles sont votre politique et votre pesée de l'avenir de la nation
française? Quelle est votre philosophie des frontières? Près de trois cent
soixante dix ans après le traité de Westphalie, laisserez-vous un empire
étranger entraîner toute l'Europe dans le sillage de son messianisme
anti-russe ou bien armerez-vous la géopolitique d'aujourd'hui d'une
réflexion de fond sur le droit international actuel ?
Car, comme
il est rappelé plus haut, la Russie soviétique ne s'est pas effondrée à la
suite d'une guerre perdue, mais seulement pour avoir assisté à la
répétition générale d'un théâtre eschatologique atterrant. Qu'en est-il du
grotesque planétaire d'un mythe démocratique dûment calqué sur celui du
christianisme originel? Si la démence inouïe d'un messianisme politique
avait tenté de remettre en marche l'épopée ahurissante des Cathares du XIIe
siècle, dont la folie rêvait de convertir tout le genre humain au saint
devoir de sauver le joyau de la chasteté jusque sur le lit conjugal, un
péril politique de ce calibre aurait été rapidement circonscrit et
efficacement combattu, tellement un programme de la rédemption fondé sur le
dépérissement sacré et l'extinction sanctifiée du désir sexuel, donc sur
une planification de l'extermination salvifique de l'espèce pécheresse
ressortissait à une hérésie dont il était inutile de combattre la stupidité
à l'école des bûchers de l'Inquisition: il n'est pas besoin d'une science
anthropologique de la folie humaine pour savoir que ce genre de dérangement
cérébral s'éteindra parmi les fuyards de leurs forêts par la simple
contre-offensive de l'instinct de conservation de tous les êtres vivants.
5 - De l'utopie à la mystique
En
revanche, la glorification religieuse de la pauvreté et le rêve ahurissant
d'abolir la propriété privée ne sont pas seulement d'origine chrétienne:
leur source s'est révélée d'ordre psychobiologique. De plus, ce songe ne
s'est montré congénital à un évangélisme d'origine biologique qu'à partir
de la tradition ascétique de la philosophie stoïcienne et en réaction à une
dépravation universelle et pathologique des mœurs. Mais, au XIXe siècle,
une mutation aussi soudaine que peu banale du modèle de production
capitaliste a subitement ensauvagé ce système économique: il n'était pas
prévisible que des mécaniques motorisées et automatisées se substitueraient
soudainement à la lenteur et à la maladresse du travail individuel. Cette
accélération abassourdissante et cette massification à la fois
catastrophique et comique du labeur des masses ont enfanté un esclavage
d'un type inconnu et incroyable, celui de la robotisation des travailleurs
systématiquement mécanisés. Dès 1936, Charlie Chaplin filmera cette
gigantesque galéjade dans Les Temps modernes.
De plus, la
crédibilité de l'abolition - dans un bain de sang rédempteur - de
l'instinct de propriété inscrit dans nos gènes depuis Cro-Magnon a pu se
nourrir de la conversion de quatre-vingts pour cent de l'intelligentsia
mondiale aux bienfaits d'une utopie politique. Mais jamais cette théologie
pour asile d'aliénés n'aurait égaré le peuple le plus réaliste et le plus
ancien de la terre, le peuple chinois, si la mécanisation effrénée des
multitudes au profit d'un capitalisme d'esclavagistes n'avait pas présenté
un péril plus réel pour la survie des fuyards du règne animal que le rêve
d'enfermer une espèce sexuée dans la maison de fous de la chasteté
universelle.
Quoi qu'il
en soit, une politologie qui châtierait à jamais la Russie en raison du
naufrage d'un délire politique tellement passager que le christianisme
originel l'avait terrassé en une seule génération ressortit à une forme de
démence collective fort significative de la carence intellectuelle et
philosophique qui frappe aujourd'hui de plein fouet les élites dirigeantes
de type démocratique. Car Mme Angela Merkel, j'y reviens, semble ignorer
l'origine messianique d'une mythologie politique imposée de l'extérieur à
l'Europe et au seul bénéfice d'un empire mondial du salut par la démocratie
[Voir Introduction]. Or, l'expansion foudroyante du mythe de la
Liberté politique s'est précisément construite sur la voracité du
capitalisme messianisé, lequel s'était déchaîné à l'échelle du monde entier
depuis le XIXe siècle.
L'idée de
mettre la massue d'un maître de l'onirisme politique actuel entre les mains
des vassaux de ce songe impérieux - et cela à seule fin de frapper la
Russie à coups de gourdin - n'a d'autre finalité géopolitique que d'assurer
la prospérité des marchés financiers ficelés à l'empire du dollar par les
accords de Bretton Wood. C'est pourquoi la trique des sanctions économiques
prises sous la férule d'un empire réputé rédempteur ont aussitôt fait
progresser à tout va les exportations de l'Amérique … en direction de la
Russie.
M. le
Député de la nation, serez-vous le déclencheur de l'Europe d'une lucidité
triplice: religieuse, politique et militaire? Serez-vous l'éveilleur qui
dira aux Français qu'il n'y a pas de politique internationale qui puisse
passer au large d'une science historique experte à peser ensemble et sur la
même balance le poids des armes et celui des songes.
6 - Psychobiologie de la vassalité parareligieuse
Que dit le
baromètre de la sottise politique - celui qui indique la température des
mondes imaginaires dont l'histoire de la planète se nourrit ? Il faut
expliciter les raisons psychobiologiques qui colloquent désormais le monde
dans la postérité de l'évolutionnisme de Darwin et de l'inconscient de
Freud. Car l'esclavage de type démocratique n'a pas livré les ultimes
secrets de son Graal. Seule une décérébration brutale des élites et une
infantilisation subite de toute la classe dirigeante européenne a pu
engendrer une carence des cervelles perméables à ce type de domptage: la
nouvelle épidémie de la folie sacrée est devenue celle de la chute
précipitée des civilisations développées dans un type de puérilité
spécifique et propre seulement à un mythe de la Liberté tombé dans la
folie.
C'est cette
puérilité politique qui a conduit Mme Merkel jusqu'à soumettre les services
secrets de son propre pays à la surveillance et au contrôle d'un empire
étranger - et cela au point de leur ordonner le plus naïvement du monde
d'espionner Airbus au profit de son concurrent, le géant américain Boeing.
Seule une candeur pathologique peut rendre crédible un angélisme de ce
calibre. Admettez-vous, M. le Député, ou bien que Mme Merkel ne sait pas un
traître mot de la politique internationale et de l'histoire réelle de ce
bas monde et qu'elle est demeurée aussi étrangère à ce domaine que Mallarmé
ou saint François d'Assise, ou bien pensez-vous qu'elle devrait passer aux
assises ?
Mais,
encore une fois, où sont les psychiatres de la feinte innocence du mythe de
la Liberté quand le vainqueur de 1945 en tient le sceptre d'une main ferme ?
7 - Le cerveau actuel des dirigeants européens 
Que la
vassalisation cérébrale du monde d'aujourd'hui soit à l'école du mythe
politique de la Liberté démocratique semble incroyable au premier abord;
mais savez-vous que le Salvador s'est vu contraint de vendre trois cents
tonnes d'or afin de payer une gigantesque amende que l'Amérique lui a
infligée? Or, ce petit pays a été condamné précisément par le type de
tribunaux qui permettra demain aux entreprises du Nouveau Monde de citer les
Etats européens à comparaître, l'échine basse, devant des instances
judiciaires composées de marchands américains. L'accusation dira que Paris,
Londres ou Rome auront violé le saint principe de la liberté mondiale du
commerce. On demandera aux malheureux Européens de ne s'opposer en rien à
l'implantation vertueuse des entreprises d'outre Atlantique sur leur
territoire ! La liberté démocratique est messianique ou n'est pas.
M. le
Député, vos collègues de l'Assemblée nationale ont-ils pris conscience de
ce qu'après soixante-dix ans de présence de ses légions sur notre
continent, le Nouveau Monde ne lâchera pas prise de sitôt et que seule une
longue guerre de reconquête des apanages politiques propres aux Etats
souverains leur redonnera leur autorité et leur influence d'antan? Mais
sans doute avez-vous compté sur vos doigts ceux de vos compagnons de route
qui ont vraiment compris cette situation. Aurez-vous la force de prendre la
tête d'une France et d'une Europe à dévassaliser à l'écoute des leçons
d'une connaissance anthropologique de l'histoire du monde? Dans ce cas,
vous n'aurez aucune chance d'y parvenir si notre politologie biphasée et
nos sciences humaines schizoïdes demeuraient obsolètes en raison de leur
méconnaissance de la nosologie qui a rendu onirique de naissance l'
encéphale dichotomisé de notre espèce. La politique ne se laisse plus
comprendre seulement à moitié : si l'on ne va pas au fond des choses, on
reste dehors.
8 - Un animal masqué par son langage
J'insiste
sur ce point décisif. Car le gouffre qui s'est ouvert sous les pas de la
classe dirigeante de la démocratie mondiale est d'une nature fort
différente de celui qui s'était ouvert sous l'agora au cinquième siècle
avant notre ère: cette fois-ci, seule la connaissance des ressorts qui
commandent l'évolution des neurones d'un animal encore suspendu entre ciel
et terre pourra armer la classe dirigeante européenne de demain d'une
connaissance anthropologique de son inconscient cérébral; et seule une
science de l'imagination humaine permettra de déclencher le divorce
progressif des élites d'avant-garde d'avec un corps électoral mal instruit
de la nature des verdicts que prononce un suffrage universel mythifié à
l'école de son propre langage et à l'écoute de sa propre voix.
Il serait
stérilement piétinant, M. le Député, de constater seulement que l'homme
n'est pas encore un transfuge parachevé du règne animal: car c'est de la
spécificité auto-béatifiante de l'animalité humaine qu'il faut tenter de
cerner le séraphisme. Or, cet angélisme est viscéral, et cela non point
exclusivement parce qu'il porte toujours le masque d'un monde imaginaire,
mais parce qu'il se révèle substantifié, si je puis dire, par la parole
sacralisante des mythes collectifs. C'est le discours lui-même qui donne le
change, c'est le discours lui-même qui métamorphose le réel à le
transporter dans l'abstrait, c'est le discours lui-même qui chapeaute le
monde et le couronne des guirlandes d'un vocabulaire pseudo ascensionnel.
L'animalité humaine n'a pas d'équivalent dans le monde animal, parce que la
domestication politique des peuples et des nations n'est pas un domptage de
cirque, mais une tiare. La servitude des Etats européens n'est pas la
vassalité des fauves terrifiés, mais celle d'une valetaille porteuse des
pancartes de la vertu démocratique sur lesquelles leur maître a gravé le
sceau de dela Liberté.
L'empire
américain n'est pas encore identifié dans ses prérogatives pseudo
sanctifiantes, celles d'un César salvifique, mais seulement au titre d'une
dérive "unipolaire" marginale de la politique classique.
On s'imagine que l'animalité proprement humaine ne serait pas
psychobiologique par nature sous le prétexte qu'elle ne broie pas les
malades et les vieillards sous ses crocs - tout au contraire, elle leur
"assure une fin de vie dans la dignité et dans l'apaisement"
- ceux d'un humanisme saintement démocratisé.
Quand, en
2013, le pape François mobilise un milliard et demi de catholiques contre
la guerre en Syrie et, en 2015, la même multitude contre la pestifération
de Vladimir Poutine, le devoir de la pensée rationnelle mondiale est de se
dire que ce pape est un anthropologue à sa manière et qu'il a pris quelque
avance dans la spectrographie des idéalités carnassières dont les fauves
s'auréolent.
Que dit le
Jésuite déguisé en Franciscain - ou l'inverse - qui dirige l'Eglise? Que
l'homme est un sanctificateur voué à glorifier sa bestialité masquée et qui
met ses mâchoires à l'écoute de l'ange de la Liberté qu'il est devenu à ses
yeux. Cet animal-là "fait l'ange", disait Pascal; et c'est
viscéralement qu'il rentre ses griffes pour jouer au séraphin. M. le
Député, la semaine prochaine, je me demanderai si vous ne vous seriez pas
avancé sur un champ de mines, celui d'une révolution parallèle des sciences
humaines et du droit international.
Le 26 juin 2015
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