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31 août 2007

MON ALGERIE A MOI


AUTEUR : Lucienne Magalie PONS (Mars 2006)


Je suis née le 1er juin 1934 dans une propriété dénommée "Le Domaine des Ruines Romaines" toute proche du célèbre Tombeau de la Chrétienne dont image ci-dessus. Je n'ai vécu que deux ans cette propriété que mes parents ont ensuite quittée pour une autre région d'Algérie. J'ai quitté l'Algérie le 27 Juin 1962 pour me rapatrier en France à Paris où je demeure toujours depuis -




Mon Algérie à Moi,

Beaucoup de Français rapatriés d’Algérie retournent en Algérie en visite retrouver les paysages, les villes et villages où ils ont vécu, leurs souvenirs d’autrefois et se recueillir à la mémoire de leurs ancêtres morts et enterrés dans ce pays. Certains Français de France et Français Rapatriés me demandent quelques fois « Vous n’êtes jamais retournée en Algérie … ou … là-bas … ? » Et je réponds invariablement « Non je n’y retournerai jamais ». Assez curieusement je dois avoir un ton définitif dans cette réponse car personne jamais n’a demandé « Pourquoi ? »

Ce « pourquoi » m’appartient, il pourrait demeurer secret, mais j’estime le moment venu d’expliquer pourquoi je n’y retournerai jamais, ne serait-ce que pour ceux qui me connaisse bien et pour lesquels je me dois d’être « transparente » selon une expression consacrée.

Tout d’abord parce que en quittant ce pays le 27 Juin 1962 j’avais décidé de tourner une page pour toujours, ensuite parce que je ne suis pas une adepte des lamentations et enfin parce que je ne regrette rien comme dans la chanson d’Edith Piaf qui avait été reprise par les paras lors de leur départ d’Algérie comme un hymne d’honneur.

Ensuite parce que l’Algérie d’aujourd’hui n’est pas celle d’hier, ce n’est plus « mon Algérie à moi », ses paysages ont été modifiés, des arbres, des vignes ont été arrachés à notre départ, de nouvelles constructions se sont édifiées, des cimetières sont tombés dans l’oubli et la ruine, ma maison est certainement détruite ou habitée par des inconnus, meublée à leur goût et à leur façon, tout cet environnement ne me concerne plus. L’Algérie n’est plus Française et je suis persuadée que mes souvenirs ne sont plus inscrits sur son sol.

Mon Algérie à moi se trouve à l’abri dans ma mémoire et dans mes pensées, intacte comme un diamant dans son écrin, ses souvenirs revivent en moi toujours présents, vifs, animés et avec un peu d’imagination selon les lieux et les circonstances évoquées j’en ressens encore les sons, les bruits et les parfums, la tendresse ou le désespoir.

Mon Algérie, ses paysages, ses villes, ses villages, les personnages que j’ai connus et aimés je les porte en moi et il n’est pas question que j’aille les dénaturer sur place plus de quarante ans après mon retour en France. Mon diamant doit rester d’eau pure.

A chacun son Algérie, à moi ma belle Algérie Française dans mon cœur et mes souvenirs, à eux l’Algérie Algérienne : rendons à César ce qui appartient à César et à mon âme ce qui lui appartient indéfectiblement.

Je trouve lamentable d’aller s’attendrir sur les cendres des feux qu’ils ont allumés pour nous faire partir et même périr.

Maintenant Chers Amis Français d’Algérie ne me croyez pas intolérante : je comprends que vous recherchiez dans ces voyages un apaisement à vos souffrances, à vos interrogations, parce que vous êtes des bons, des doux, prêts à tendre la main pour la réconciliation. Vous l’a-t-on saisie ? … Peut-être … je veux bien croire que oui. Ou bien passez vous sur ce pays comme des touristes anonymes ? Ou bien encore vous obligez-vous à engager un dialogue amical ? Mais comment trouver des mots pour ne pas blesser et pour ne pas trahir nos blessures toujours ouvertes au fond de nous ? Passer l’éponge, effacer tout, sommes nous prêts de part et d’autre ? Franchement et sans rancœur ? Il faut pouvoir le faire totalement avec sincérité et ne pas se contenter des apparences … Certains le peuvent certainement, mais pour moi c’est trop dur.

Mais je n’ai aucun droit à critiquer ou à tenir rigueur à ceux qui plus bons que moi sont animés de compassion, mais pour moi voyez-vous ce n’est pas dans mon caractère, je suis trop fière et c’est mon très grand défaut et peut être ma très grande faute, et en plus je ne suis pas adepte des mea culpa qu’il s’agisse des miens ou de ceux de la partie adverses. Quand on s’est bien battu et défendu à quoi bon se lécher les babines ensuite ? … Et user sa salive ? la vie continue et je n’ai pas de temps à perdre en vains salamalecs de circonstances.

Et quand un musulman en France me dit : « Vous auriez dû rester chez nous en Algérie », je me permets de lui répondre « Monsieur quand on a été un juste maître, on ne peut risquer de devenir un esclave chez les autres, je suis Française, ma place était et est ici en France, mon Algérie existe dans mes souvenirs, elle y tient sa place, votre Algérie n’est pas la mienne c’est à vous d’y retourner si cela vous convient bien sûr »

Je sais que je vais passer pour une sale colonialiste raciste. Je ne le suis pas rassurez-vous, mais je respecte mes valeurs et celles des autres, sans éprouver le besoin d’en faire une salade, au fond personne n’est parfait en ce bas monde et c’est pourquoi je m’accommode de ne pas l’être et de rester sur mes positions.

2 commentaires:

Zéphyr a dit…

" Si la vie est misérable, elle est pénible à supporter ; si elle est heureuse, il est horrible de la perdre. L'un revient à l'autre." disait Jean de La Bruyère !

Votre lettre ouverte est un véritable feu de détresse. Comme les Spartiates, vous êtes dure envers vous-même et vous jugez les autres trop sévèrement.
autres.

Dans un conflit, il n'y a que des victimes.Il n' y a ni vainqueurs, ni vaincus. Ne cherchez donc pas qui a tord ou raison.

Venez vous ressourcer dans votre terre natale, l'Algérie.

Je terminerai par cette pensée touarègue : " Fait de ta plainte un chant d'amour pour ne plus savoir que tu souffres."

Lucienne Magalie Pons a dit…

Bonjour Zéphyr,
En plus du commentaire qui figure ci-dessus, vous m’avez aussi adressé un mail personnel où vous me faites part plus largement de vos réflexions.
Je vous réponds ci-dessous à la fois à votre commentaire et à votre mail dont je ne reprends pas le texte par souci de confidentialité.

Je vois que vous avez des lettres ! Mais la littérature n'a rien à voir avec la réalité !

Vous dites DANS VOTRE MAIL PERSONNEL qu'il n'y a ni vainqueurs ni vaincus dans un conflit, qu'il n'y a que des victimes, cet argument est valable mais il reste du domaine de l'argumentation philosophique ou l'on peut tout dire le vrai et son contraire sous le feu de la cogitation métaphysique.

Moi au contraire je considère et soutiens que dans un conflit il y a surtout des victimes civiles innocentes abandonnées aux mains d'assassins que l'on promeut au rang de vainqueurs parce que ça arrange les politiques et la que la victoire octroyée est factice.



Enfin votre imagination personnelle considère que ma lettre ouverte est un véritable "feu de détresse" et là encore c'est une inspiration poétique qui vous anime.

Rassurez vous je n'ai jamais ressenti de détresse même dans les pires moments, parce que quand on est dans l'action on ne se lamente pas, on prend sa part d'honneur même si la victoire vous a été volée et la défaite imposée par les vôtres, comme ce fut le cas par le Général de Gaulle.

Et je vous apprendrai encore que je ne suis pas une adepte des lamentations, ce n’est pas dans ma culture, ce n'est pas moi que vous verrez un jour allez laisser couler des larmes de crocodiles en Algérie sur les lieux de mon vécu, sous le regard ironique de populations qui ne sont pas celles de ma génération, qui ne nous connaisse plus qu’au travers d’une propagande mensongère, et qui se foutent royalement de la culture des Français et bien souvent les méprise ouvertement. Je laisse la cohorte des pleureurs et professionnels des lamentations à leurs mœurs et coutumes exhibitionnistes, c'est une honte d'aller se montrer la bas devant des personnes qui au fond les méprise.

Je n'ai absolument pas besoin d'aller me ressourcer dans un pays devenu étranger, le pays de mes ancêtres est la France en premier lieu, et d'autres pays voisins d'Europe aussi, et c'est là que j'ai renoué avec mes sources et je m'en trouve le mieux possible et en plein accord avec moi même.

Votre pensée touarègue est inadaptée à des circonstances politiques mais elle est d'une grande valeur existentielle et poétique.Je connais bien le Sahara, j'étais jeune et travaillant dans les pétroles, j'ai souvent visité Hassi Messaoud et Hassi R'Mel entre 1954 et 1957

Enfin je n'ai aucune critique à vous faire personnellement, vos pensées sont les vôtres et je défends la liberté de penser de tous quand elle ne heurte pas la bienséance
J'ai visité votre blog et je vous félicite pour la qualité de vos articles et informations

Cordialement