Discours de M. le Président de la République - Hommage
aux soldats tombés en Afghanistan
DISCOURS DE M. LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE
Hommage aux soldats tombés en
Afghanistan
Hôtel National des Invalides -
Jeudi 14 juin 2012
Messieurs les anciens Présidents
de la République,
Monsieur le Premier ministre,
Monsieur le Président du Sénat,
Monsieur le Président de
l'Assemblée nationale,
Mesdames et Messieurs les
Ministres,
Madame et Messieurs les anciens
Premiers ministres,
Mesdames et Messieurs les parlementaires
et les élus,
Messieurs les officiers généraux,
Messieurs les officiers,
sous-officiers et soldats,
Mesdames, Messieurs,
C'est la Nation tout entière qui est
représentée ici ce matin. La
Nation tout entière est rassemblée pour honorer quatre militaires
français tombés en Afghanistan, le samedi 9 juin, lors d'une attaque suicide
dans la province de Kapisa. Je n'oublie pas les deux interprètes afghans.
Chef de l'Etat et Chef des
Armées, je veux leur rendre un hommage solennel de la République.
Ils sont morts en soldats.
Le métier des armes n'est pas un
métier comme les autres. Il est fait du sens du devoir, de l'amour de la Patrie, de l'esprit de
sacrifice. Il appelle de la discipline et du courage. Il comporte l'acceptation
du risque.
La France doit à son armée une
part éminente de sa grandeur, de son indépendance, de son rayonnement dans le
monde aussi.
Elle lui doit d'être restée la France, une Nation libre,
et de pouvoir défendre l'idée qu'elle se fait de la dignité de l'Homme.
Elle lui doit de pouvoir veiller
sur son idéal.
Tel était l'engagement de ces
hommes.
Ils sont morts pour des valeurs
justes et hautes.
Celle de la paix.
Celle de la liberté.
Celle de la démocratie.
Celle de la souveraineté des
peuples.
Celles de la France.
Notre armée s'est engagée sur le
sol afghan il y a onze ans, en 2001, au lendemain des attentats qui ont
cruellement frappé les Etats-Unis d'Amérique. Au nom de ces valeurs et dans le
cadre de la légalité internationale, elle a combattu et contenu le terrorisme ;
elle a évité que l'Afghanistan n'en devienne le sanctuaire.
Grâce aux femmes et aux hommes
qui la servent, grâce à leur patience, à leur persévérance, grâce à leur
performance, notre armée a permis, associée aux forces de la coalition
internationale, à l'Afghanistan de se relever et de se remettre en marche.
Elle prépare désormais la
transition, appelée de leurs vœux par les Afghans eux-mêmes, et qui entendent
prendre leur destinée en main, ainsi que me l'a confirmé encore ces derniers
jours le Président KARZAI. Déjà des secteurs ont été transférés aux autorités
afghanes. Ce mouvement se poursuivra et nos troupes combattantes entameront
leur départ du sol afghan dans les prochaines semaines. Il s'achèvera à la fin
de l'année. Il n'est pas sans danger. Ce retrait se fera dans l'ordre et dans
la sécurité. J'y veillerai et je m'y engage.
Lutter contre le fanatisme et la
haine aveugle ; aider fraternellement un peuple à retrouver le chemin de sa
souveraineté : telle était la noble mission de nos quatre compatriotes.
Je m'incline avec respect et
émotion devant chacun d'eux. Je veux leur dire, au nom de la France, notre gratitude.
Aux Invalides, dans ce haut lieu
de notre histoire militaire, ces cercueils recouverts du drapeau tricolore nous
ramènent à l'essentiel.
Aux raisons de vivre et de
mourir.
A l'histoire de notre pays,
construite de génération en génération par ceux qui croyaient, qui croient
encore, en quelque chose de plus grand que le destin de chacun d'entre nous.
87 soldats français ont donné
leur vie dans le conflit afghan.
Ces hommes de toutes origines, de
toutes conditions, de toutes confessions, sont morts pour la France.
Mourir pour la France, c'est vivre à
jamais dans le cœur des Français.
Nous ne les oublierons pas.
Chacun avait un nom, un visage, une histoire, une famille.
Major Thierry SERRAT,
Voilà 28 ans que vous serviez
notre drapeau. Vous veniez de vous rendre pour la troisième fois en Afghanistan
dans le cadre du groupement interarmées des actions civiles-militaires. Votre
sens de l'effort, vos remarquables qualités humaines et votre professionnalisme
ont, dans toutes vos missions, été salués et admirés. Vous aimiez le terrain,
l'action, vous aimiez faire partager votre expérience. Vous étiez, et vous
resterez pour vos hommes, une référence incontestée. Je pense, en cet instant,
à vos deux enfants. Je voudrais qu'à leur chagrin se mêle aujourd'hui l'immense
fierté d'avoir eu un père tel que vous.
Adjudant Stéphane PRUDHOM,
Vous vous étiez engagé il y a
treize ans au sein du 2ème Régiment de Hussards, avec lequel vous aviez pris
part à de nombreuses opérations extérieures, dans l'ex-Yougoslavie, au Kosovo,
en Côte d'Ivoire ou au Tchad. Vous étiez pour la seconde fois en Afghanistan,
avec le 40ème Régiment d'Artillerie. Tous ceux qui vous ont connu ont souligné
vos exceptionnels talents de meneur d'hommes. Vous leur manquerez à tous, comme
vous manquez déjà à la
Nation. Vos enfants ont un an et trois ans. Ils grandiront
auprès de votre compagne avec au cœur une absence irréparable, mais avec votre
exemple pour éclairer leur chemin.
Maréchal des logis-chef
Pierre-Olivier LUMINEAU,
Vous vous étiez engagé à l'Ecole
nationale des sous-officiers d'active il y a deux ans. Deux ans seulement. Mais
vous aviez l'expérience de vos parents militaires eux-mêmes. Vous aviez intégré
la Batterie
de renseignement de brigade de Suippes. Puis vous avez rejoint l'Afghanistan
dans une équipe tactique et d'opérations militaires d'influence. C'était votre
première mission extérieure. Ce devait être aussi la dernière : l'ignominie de
la terreur en a décidé ainsi. Vous étiez réputé pour votre joie de vivre, pour
le don que vous aviez de rendre plus simple l'existence de ceux qui vous
entouraient, vous étiez un excellent meneur d'hommes. Votre souvenir ne nous
quittera pas.
Brigadier-chef Yoann MARCILLAN,
Vous étiez également issu du
40ème Régiment d'Artillerie de Suippes. Vous vous étiez distingué il y a trois
ans au Kosovo, où vous aviez rempli une mission exemplaire. Ceux qui vous ont
côtoyé vous décrivaient comme particulièrement prometteur, ayant une haute idée
du métier des armes, minutieux et exigeant avec vous-même. Vous aviez 24 ans. La Nation sera aussi exigeante
avec elle-même dans la fidélité à votre mémoire.
Dans quelques instants,
j'apposerai sur les cercueils de ces hommes morts pour la France les insignes de
chevalier de la Légion
d'Honneur.
Auparavant, je veux m'adresser
aux familles des militaires, qui acceptent une part considérable de
l'engagement.
Elles voient un fils, une fille,
un père, un mari, un conjoint revêtir l'uniforme et partir pour des combats
lointains. C'est un courage discret, silencieux. Mais, parfois si profondément,
si insupportablement douloureux.
Ces familles consentent à vivre
avec l'éloignement, l'inquiétude, et la peur.
Celle de perdre un proche. Mais
celle aussi de le voir revenir blessé.
Mes pensées vont vers nos cinq
hommes blessés dans l'attaque du 9 juin. Elles vont vers nos 700 compatriotes
blessés en Afghanistan. Elles vont aussi vers ceux que j'ai rencontrés il y a
quelques jours à l'hôpital des armées Percy à Clamart et qui ne demandaient
qu'une chose : être rétablis pour rejoindre leur poste. Ma reconnaissance va
vers le Service de santé des armées qui les prend en charge avec une attention
et une générosité sans limite. Je salue les médecins et les personnels.
En cet instant dédié à l'hommage,
me viennent à l'esprit les mots prononcés ici même, aux Invalides, par le
général de GAULLE. Il y évoquait, dans une adresse aux armées « la flamme de la
fierté nationale » : « C'est la même flamme, disait-il, celle qui animait le
pays tout entier, qui rassemblait les populations autour des drapeaux, qui
brûle toujours symboliquement sous l'Arc de triomphe. C'est la même flamme qui
inspirera au long de l'avenir, comme elle le fit au long du passé, l'âme de la France éternelle ».
C'est cette flamme qui animait
les quatre soldats que nous saluons solennellement ce matin.
C'est la flamme de la fidélité
que nous devons régulièrement rallumer.
Fidélité à eux, à leur courage, à
leur dévouement.
Fidélité à l'idée que nous nous
faisons de nous-mêmes. De notre République.
Fidélité à la Patrie.
La France comme une famille
endeuillée se retrouve aujourd'hui autour du cercueil de quatre de ses enfants.
Elle veillera sur leur souvenir.
Elle sera digne de leur mémoire.
Vive la République !
Vive la France !
______________________________________________________________________________
Quelques extraits de la cérémonie :
______________________________________________________________________________
Quelques extraits de la cérémonie :
Hommage de la Nation tout entière aux soldats tués par BFMTV
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire