La Turquie dans la tourmente

En partant du principe selon lequel l’ennemi de mon ennemi est mon ami, on comprendrait mal l’attitude de l’armée turque qui mène des attaques lourdes aussi bien contre l’Etat Islamique que contre les Kurdes qui luttent militairement contre Daech. Or, à quelques jours du délai constitutionnel pour la composition d’un gouvernement selon le résultat des dernières législatives, la position du Président Erdogan est très compliquée.

Si la Turquie avait soutenu l’émergence des Islamistes, sur commande occidentale pour déstabiliser la Syrie , elle l’avait fait en croyant pouvoir faire renaître le Califat sunnite qui a disparu à l’issue de la Première guerre mondiale. Or ce rêve est dissipé en raison de la proclamation de Baghdadi comme Calife, prenant sa légitimité de sa descendance du Prophète. Par ailleurs, les Etats-Unis, après avoir créé ce « monstre », ont décidé de lui couper les ailes. Ils ont sommé Erdogan de s’y associer. Ce dernier a obtempéré en ouvrant, récemment, son espace aérien aux forces occidentales et en attaquant les positions de Daech.

Mais la situation interne reste très difficile pour Erdogan en raison de la faiblesse de l’AKP et de la concurrence que lui fait Fethullah Gülen, résidant aux Etats – Unis et stipendié par la CIA. Il doit également affronter la rébellion kurde du PKK, menaçant une sécession au sein de son pays, malgré la trêve qu’il avait établie avec les Kurdes en 2012. Les Américains, à qui profite la déstabilisation actuelle du Proche et du Moyen avec Israël, ont promis à ces derniers, en contre partie de leur engagement contre Daech, la création d’un Etat.

Enfin, l’accord conclu entre la Turquie et la Russie relativement à la construction du gazoduc Turkish Stream et l’ébauche d’une normalisation entre Ankara, Damas et l’Arabie saoudite (qui s’est également rapprochée de la Russie à l’issue de son aventure au Yémen), sous les auspices de Moscou, ont précipité cette situation qui risque de conduire la Turquie vers une guerre civile.