Présentation : Mon ami Alain Algudo, Français d’Algérie , vient de me faire parvenir l’article que je reproduis ci-dessous avec son accord. Je partage son indignation et sa révolte et j’estime qu’aucun commentaire de ma part n’est nécessaire pour vous faire partager notre réprobation face à de tels actes de vandalisme.
TOUTE HONTE BUE
Les gouvernements successifs de notre pays qui, par le mensonge, la calomnie et le silence ont fait d’une trahison une victoire, sont entrés dans le processus qui les mènera inexorablement devant le tribunal de l’histoire
Comment qualifier les agissements de ceux qui, à travers la France, s’attaquent aux sépultures ? Evidemment les qualificatifs ne manquent pas et les indignations de ceux qui assistent impuissants à de tels actes de lâcheté, ne peuvent que réunir tous ceux qui, normalement constitués, expriment leur réprobation.
Alors les actes récents de vandalisme dégradant les tombes des cimetières musulmans puis chrétiens ces derniers jours font partie de cette comptabilité macabre que le monde civilisé est obligé de tenir face à cette forme de démence.
Les protestations unanimes de toute la Nation sont émouvantes et tellement justifiées que nous sentons en nous revenir l’espoir que ces criminelles dégradations, destructions et odieuses profanations dont nos morts sont toujours l’objet en Algérie, soient dénoncées et surtout obtiennent le même soutien médiatique.
Nous tenons tout d’abord à dire à ceux qui sont révoltés, outrés, scandalisés, offusqués, révulsés par de tels agissements, qu’ils ont notre soutien total. Mais nous voudrions en retour qu’ils nous fassent part de leur sentiment alors que la majorité des nécropoles abritant des sépultures civiles françaises connaissent des outrages quasi-quotidiens d’une extrême gravité sans le moindre lien avec les dégradations progressives imputables au temps et ce, dans l’indifférence générale.
S’ils persistaient dans leur silence, nous aurions alors la confirmation que le mépris dont nous sommes victimes depuis plusieurs décennies atteint aussi nos morts dans leurs lieux de repos profanés.
Tous ceux qui retournent au pays et se rendent naturellement sur les lieux de sépulture de leurs parents en reviennent bouleversés.
Nous possédons des témoignages, des photos qui n’apparaîtront jamais dans les médias de métropole alors que systématiquement se poursuivent aujourd’hui les entreprises de dévastation. Face à ce problème, la passivité de certaines autorités locales est atterrante, alors que d’autres, déplorant cet état de faits, sont impuissantes par manque de moyens. Je peux affirmer qu’une volonté existe : des hommes intègres sont sur place. Mais ils sont complètement démunis et désarmés face au peu d’intérêt et de moyens dont font preuve les décideurs, des deux côté de la Méditerranée.
L’arrêté du 7 décembre 2004 relatif au regroupement des sépultures civiles françaises en Algérie concernant les cimetières les plus dégradés et éloignés a amplifié le processus de destruction en cours, les dégradations devenant excuse de récupération des terrains pour certaines municipalités sans scrupules, en mal d’emplacements pour leur communauté.
La France, « grande et généreuse », dans sa grande mansuétude précisait dans son arrêté :
« Les familles, qui le souhaitent, ont jusqu’au 14 mai 2005 pour faire part de leur souhait de transférer en France, à leurs frais, les dépouilles de leurs défunts. »
Alors non seulement incapable de protéger en son temps les vivants, voilà que l’Etat s’attaque à nos morts : vous les dégagez ou nous le faisons nous même….. Rompez !
Alors nous en appelons aux « révoltés » !
Nous leur demandons quel degré d’ignominie ce pays va-t-il encore atteindre ?
Alors n’attendons surtout pas de manifestations de réprobation pour la disparition, programmée officiellement maintenant, de nombreux lieux de repos de nos défunts.
Les autorités de tutelle en place vont prendre progressivement le relais des pillards : nous leur demandons : que faîtes-vous des centaines de sépultures de « morts pour la France », morts pour sauver ceux sans qui, vous ne seriez pas là aujourd’hui, Messieurs les décideurs profanateurs officiels actuels.
ILS SONT A LA CHARGE DE LA NATION POUR LAQUELLE ILS ONT DONNE LEUR VIE. IL EN VA DE L’HONNEUR DE LA FRANCE !
Oui, vous profanez des concessions à perpétuité en violation des droits de l’homme, DU DROIT tout court, sans l’ombre d’un remords !
Alors, puisque ces inacceptables actes de vandalisme perpétrés en France nous permettent d’ouvrir ce dossier Algérien et d’informer, l’évocation qui va suivre si elle n’est pas frappée du sceau de la perfection elle l’est de celui de la vérité, à partir d’un témoignage direct sur le terrain d’un désastre qui perdure.
Nous détenons un document concernant les propositions faîtes par une association de sauvegarde (sic) qui préconise :
« Dans les cimetières évacués, procéder à la destruction de toutes les infrastructures, rendre le terrain plat à l’aide d’un bulldozer, en conservant si possible les arbres s’y trouvant.
VEILLER A CE QU’IL NE RESTE AUCUN OSSEMENT VISIBLE.
Rendre les terrains aux autorités locales. »
Ce n’est pas fini, pour les cimetières juifs :
« Pour les cimetières juifs irrécupérables, un apport de terre suffisamment important, avec édification d’une stèle appropriée (l’incinération étant interdite, ainsi que le déplacement des dépouilles, sauf vers Israël). »
Nous posons la question : A qui a-t-on demandé l’avis avant de recommander cet « effacement » ?
Un petit mot de compassion Messieurs les « outrés » ?
Dans une lettre adressée par un Ministre des Affaires étrangères en réponse aux interrogations et aux inquiétudes exprimées par une de nos compatriotes, celui-ci a indiqué :
« Pendant prés de 10 ans il a été impossible d’intervenir dans la quasi-totalité des cimetières en Algérie… »
Comme on peut immédiatement s’en apercevoir, d’emblée la survenue d’évènements graves est évoquée pour tenter d’atténuer ou de dégager la responsabilité de l’Etat. L’inaction en cette période de recrudescence des exactions des islamistes se surajoute à l’incurie quasi-permanente des services consulaires en ce domaine.
Dés 1983, dans l’indifférence générale, le sort de la plupart des cimetières était déjà scellé : ils avaient subi d’irréparables atteintes qui se sont par la suite aggravées jusqu’à aujourd’hui.
Dans l’Ouest Algérien à cette époque les efforts consentis pour l’entretien des sépultures et la surveillance émanaient principalement de bonnes volontés de compatriotes en place avec l’aide de citoyens Algériens qui ont toujours réprouvé ces exactions, qui nous aident toujours et que nous ne remercierons jamais assez ; il font honneur à leur pays. Merci à Monsieur l’ancien Maire d’ORAN, homme admirable qui bien que manquant cruellement de place, a refusé, dans le courant du second trimestre 1992, l’amputation d’une partie du cimetière Chrétien proposée par …une association de sauvegarde accompagnée du Consul. Il nous avait informés de la teneur de sa réponse et du trouble profond que cette démarche avait provoqué en lui.
Il faut donc constater qu’ineptie, inertie et passivité ont parfaitement caractérisé l’attitude de l’administration consulaire.
A titre d’illustration en 1985 et 1986, le consulat s’est déchargé sur l’ANIFOM d’outre-mer du soin de recenser les nécropoles et les sépultures civiles françaises, opération préparatoire aux regroupements en cours aujourd’hui.
La seule réalisation à inscrire à l’actif des services consulaires se situe entre 1968 et 1971, après un programme de regroupement de 43.000 tombes, 8.000 tombes seulement furent regroupées dans 11 Columbariums, l’absence de « souffle » et de crédits interdisant de poursuivre.
Par ailleurs, toujours pour l’ouest Algérien, comment des cimetières comme ceux de
CACHEROU, BOU-HANIFIA, DIDEROT, EL BORDJ etc.. ont-ils pu disparaître complètement sans que le Consulat et l’Ambassade aient élevé la moindre protestation ?
A toutes les questions que posaient ceux qui vivaient douloureusement ces exactions, les réponses manifestaient implicitement plus de mépris que de compassion et de volonté réelle de mettre fin à ces situations intolérables.
Il ne s’agissait pas que de passivité récurrente, hautement condamnable, mais d’ignominie.
Déjà en 1985 dans le seul ouest algérien, 65 cimetières avaient été classés dans la catégorie « EN TRES MAUVAIS ETAT ».
Pour savoir ce que recouvrent ces termes il faut se référer à un exemple concret, celui du cimetière d’ORAN considéré comme se trouvant dans un ETAT MOYEN qui peut être traduit ainsi qu’il suit : des milliers de sépultures profanées, partiellement ou totalement béantes dans les carrés pillés ou dévastés du sud, sud-ouest, centre ouest, et après l’édification d’immeubles à l’est du cimetière et l’écroulement d’une partie du mur d’enceinte, dans les carrés du sud-est et du centre est.
Où êtes-vous, Messieurs les « scandalisés » ?
Monsieur le Président, Monsieur le Premier Ministre et tous ceux qui s’indignent quand des détraqués donnent un coup de pinceau sur une tombe musulmane ou casse une croix dans un cimetière de métropole, ayez le courage de venir constater ce spectacle cataclysmique, cauchemardesque, offert par les cimetières classés en TRES MAUVAIS ETAT ! Chercher et trouver une seule croix debout relève des coulisses de l’exploit. Des compatriotes entrant dans les nécropoles dévastées, ont assisté à des scènes dépassant l’entendement que l’horreur et la décence nous interdisent de décrire !
Etes-vous toujours là, Messieurs les offusqués ?
Et vous, Monsieur le Recteur de la mosquée de Paris qui savez si bien vous poser en donneur de leçon, qui savez si bien, contre l’évidence même, raconter n’importe quoi et déverser votre fiel sur les liens qui unissaient les populations de l’Algérie Française ? Vous a-t-on entendu dénoncer la violation quotidienne des sépultures Chrétiennes dans votre pays ? Ce pays que aimez tellement….de loin, bien à l’abri chez l’affreux colonisateur ?
La réponse est non évidemment, vous êtes bien intégré dans ce coupable désintéressement national qui a plongé la plupart de nos cimetières dans le chaos et la déréliction la plus totale.
Alors parce que la bassesse est devenue une institution nationale, que le mépris dont nous sommes victimes se lit à travers des mesures tape à l’œil et que les dimensions du problème requièrent d’autres solutions par la mise en œuvre de moyens exceptionnels, voici le témoignage le plus récent, (quelques semaines), d’un de nos compatriotes qui nous écrit :
« Au cimetière Tamasouhet d’ORAN je me recueille régulièrement sur la tombe de ma mère et chacune de mes visites me bouleverse. Dans ce cimetière, chaque jour, et en dépit de la présence de deux à quatre gardiens, des groupes d’adolescents déambulent.
Selon leur humeur, ils vous ignorent ou vous lapident ou bien encore profèrent des bordées d’injures à l’endroit de la France. Mais, par-dessus tout, à des heures qui ne sont pas celles d’ouverture des lieux au public, ils poursuivent systématiquement leur entreprise de profanation, de dégradation, de destruction des sépultures. »
Intervenez Messieurs les « révulsés » !
Face à ce problème la passivité des autorités locales est pareillement atterrante.
Les gardiens affirment très lucidement que la situation est devenue incontrôlable.
Depuis ce témoignage le consulat de France à « rouvert » ses portes à ORAN ; si le Consul semble accorder un intérêt plus soutenu au devenir de sépultures civiles françaises, le projet scélérat de regroupement de la moitié sud du cimetière Tamasouhet est réactivé et connaîtra même un début de réalisation dès juillet 2008.
Qualifier ce projet de scélérat n’est nullement exagéré ; loin d’assumer le repos de nos ancêtres, il tend essentiellement à effacer les effets de 47 ans d’incurie criminelle et aboutit plus sûrement à l’anonymat définitif et à l’oubli éternel de plusieurs dizaines de milliers de nos ascendants.
Par le jugement de l’histoire nous avons été privés de nos racines, par votre silence, messieurs les outrés à sens unique, vous espérez sans doute nous priver aussi de mémoire.
Ne vous faîtes aucune illusion, nous refusons d’être condamnés à l’oubli !
Nous n’attendons rien de vous car nous vous savons incapables de gestes forts et désintéressés. Nous souhaitions simplement informer les profanes pour qu’ils ne puissent pas dire un jour « NUL NE SAVAIT ».
Alors vous allez certainement nous rétorquer : « la critique est aisée mais l’art est difficile ».
Nous vous répondrons qu’il existe une vingtaine de pays au monde où sont situés des cimetières Français. Aucun ne présente les particularités de l’Algérie composée jadis de départements Français peuplés d’un million d’Européens susceptibles d’être inhumés dans plus de 500 cimetières systématiquement profanés.
Ces particularités imposaient d’y consacrer plus de moyens et, en ce domaine, comme en d’autres, les conséquences des choix politiques ayant conduit l’Algérie à l’indépendance n’ont pas été assumées.
Compte tenu de ce qui précède, les crédits employés à la sauvegarde des 523 nécropoles et leur 210.000 tombes, peuvent être considérés comme dérisoire ; à titre d’exemple :
- 1988 : 540.000 frs
- 1989 : 390.000 frs
- 1990 : 285.000 frs
- 1991 : 402.000 frs
Ces sommes ont varié à la baisse pour les années suivantes.
Donc si nos calculs sont bons en quatre années, 0.015 frs par tombe !!!!!
De qui se moque-t-on ?
Quant aux « regroupement » mis en place, nous souhaiterions être éclairés officiellement sur les points suivants dont nous n’avons jamais été informés depuis l’arrêté du 7 décembre 2004 (qui aurait pu nous faire la grâce de bénéficier des anciens noms des villages où les cimetières sont « regroupés ») donc, :
- Montant de l’enveloppe budgétaire prévue à cet effet côté français et côté algérien ? ;
- Composition des équipes qui exécutent cette mission ?;
- Quels sont les groupements associés à ces opérations ?;
- Comment a été arrêtée la liste des entreprises prestataires des services attendus ?;
- Un calendrier des opérations a-t-il été mis en place ? Si oui, dans quel organe ?
- Si la présence sur le terrain d’un représentant de l’administration française n’est pas prévue, de quel recours disposent les familles concernées par ces opérations pour tenter d’en modifier le cours ?
- Un contrôle sur place des prestations fournies est-il envisagé ? Par qui est-il assumé ?
- Enfin les noms et le nombre, par cimetière, des dépouilles mortelles ainsi transférées seront-ils communiqués ?
Il faut savoir que nombre de lieux de repos cités ont été rayés de la carte longtemps avant même cet arrêté ! Aurons-nous donc droit pour eux à une poignée de terre en guise de « regroupement » !
Pour nous, le souvenir de nos disparus est gravé dans les cœurs et quoique vous fassiez vous ne pourrez jamais empêcher que nous y « trouverons toujours leur poussière et les traces de leur vertu »
Alors Messieurs, les outrés, révoltés, scandalisés, offusqués, révulsés, si votre indignation s’avérait être à sens unique, votre silence méprisant serait à la hauteur de notre dégoût !
Il serait votre aveu de culpabilité, TOUTE HONTE BUE !