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Grand "raout" politique franco-allemand hier à l’Élysée, Conseil des Ministres franco-allemand, discours, conférence de presse ..toutes les questions que le couple-franco allemand voudrait voir aboutir et mettre en œuvre avant les élections européennes de Mai ont été évoquées certaine passées au crible en conférence de presse conjointe, des décisions ont aussi été prise pour intervenir dans la situation Ukrainienne, nous ferons le bilan de leurs prétentions d'ici 4 mois environ.
Déclaration conjointe à l'issue du Conseil des Ministres franco-Allemand
Déclaration conjointe à l'issue du Conseil des Ministres franco-Allemand
Vidéo de la conférence de presse conjointe suivie des textes :
Conférence de presse conjointe avec Mme Angela MERKEL,chancelière de la République Fédérale d'Allemagne
LE PRESIDENT :
Mesdames, Messieurs,
Cette réunion des gouvernements franco-allemands est particulière.
D’abord parce que madame MERKEL et moi-même nous sommes assis ! Ensuite
parce que c’est la première fois que nous nous réunissons avec le
nouveau gouvernement allemand, issu des élections, et qui est au
travail, et va l’être pendant presque autant de temps que l’action que
je conduis pour la France,
ce qui nous oblige à être à la hauteur de ce que nos prédécesseurs ont
fait pour l’amitié franco-allemande, et aussi à la hauteur de ce qui
nous est demandé en Europe et dans le monde, c'est-à-dire d’avoir une
relation forte entre nos deux pays pour animer le débat européen et
peser sur la scène mondiale.
Cette rencontre est également particulière, même exceptionnelle, par
son contexte, et je veux commencer par là. Il se produit en Ukraine des
actes inqualifiables, inadmissibles, intolérables, une violence, une
brutalité, une répression, et la chancelière et moi-même, avec nos deux
gouvernements, je salue ici le Premier ministre, nous avons condamné
tous ces actes et la répression venant du pouvoir. Notre premier appel
c’est que ça cesse, et que le calme, la sérénité, l’apaisement, puissent
être de retour.
Mais, ceux qui ont commis des actes, ceux qui se préparent à en
commettre d’autres, doivent savoir qu’ils seront sanctionnés, et demain
il y aura une réunion des ministres des Affaires étrangères de l’Europe,
et cette question des sanctions, de leur graduation, de leur ciblage,
cette question-là sera posée. Enfin, nous voulons, l’Allemagne et la France,
mais nous sommes conscients que tous les pays européens sont animés de
la même volonté, permettre à l’Ukraine de connaître sa transition
politique vers de nouvelles élections et un rassemblement. Nous
rappelons que l’Europe est toujours disponible pour l’accord
d’association qui avait été proposé à Vilnius.
Voilà ce qui a été le thème qui à lui seul justifiait notre
mobilisation aujourd’hui, mais nous en avons abordé beaucoup d’autres.
Notamment sur les questions de politique étrangère et de Défense il y a
une harmonie et il y a aussi une volonté. L’harmonie c’est de nous
retrouver sur chaque grands sujets, en totale convergence, que ce soit
par rapport à l’Ukraine, je viens d’en parler, ou à l’Europe orientale,
que ce soit également par rapport à la Syrie, l’Iran, et l’Afrique.
A cet égard des décisions importantes ont été prises à l’occasion de cette réunion de nos gouvernements puisque la Brigade franco-allemande, et c’est plus qu’un symbole - c’est un symbole d’abord de l’amitié entre la France
et l’Allemagne, mais c’est un symbole aussi de l’amitié entre l’Europe
et l’Afrique - cette Brigade franco-allemande sera donc présente au
Mali, dans le cadre de l’opération européenne de formation,
d’encadrement, d’accompagnement, pour faire en sorte que la sécurité
soit définitivement rétablie au Mali.
De la même manière j’ai salué la chancelière pour l’action qu’elle
avait souhaité mener pour la Centrafrique, à la fois sur le plan
humanitaire, des équipes médicales, mais également des aides logistiques
qui pourront être apportées, je rappelle qu’il y a eu là aussi une
opération européenne. Nos ministres des Affaires étrangères, nos
ministres de la Défense,
vont travailler en étroite coopération, et d’ailleurs, même, se
rendront, pour certains d’entre eux, au Mali, pour d’autres devant les
commissions parlementaires respectives du Bundestag, de l’Assemblée
nationale, du Sénat, je pense que là aussi c’est une bonne démarche.
Nous avons également abordé les questions de croissance et plus
largement de compétitivité, d’emploi. Notre objectif dans cette période
de reprise c’est de pouvoir nous donner toutes les conditions, à nos
deux pays, mais aussi à l’Europe, pour connaître une croissance plus
vigoureuse, ce qui suppose davantage de compétitivité, davantage aussi
de soutien, lorsque c’est possible, de la demande intérieure, et c’est
cette offre compétitive et ce soutien à la demande intérieure qui
permettront à l’Europe et à nos deux pays de connaître plus de
croissance.
Nous avons également travaillé sur l’harmonisation fiscale, que nous
voulons établir et surtout poursuivre, et notamment sur l’impôt sur les
sociétés, en fixant une trajectoire. Il y a eu, sur la taxe sur les
transactions financières qui nous avait d’ailleurs unis depuis le
départ, la volonté d’aboutir avant les élections européennes. Sur les
questions d’emploi, vous vous souvenez de l’engagement de la chancelière
pour l’emploi des jeunes, pour cette garantie des jeunes, nous aurons à
la traduire encore davantage dans les prochains mois. Nous sommes
revenus aussi sur le SMIC, dont nous voulons dire qu’il doit être un
élément pour l’harmonisation sociale, mais aussi pour l’emploi.
Et puis nous avons abordé le grand sujet de la transition
énergétique. Nous n’avons pas les mêmes situations en France et en
Allemagne, nous n’avons pas nécessairement fait les mêmes choix depuis
des années, et pourtant nous sommes en total accord pour mener une
transition énergétique avec ambition, et au plan de la relation entre
nos deux pays, comme je l’avais moi-même précisé à travers un symbole
qui n’avait pas vocation à se retrouver dans une entreprise, mais dans
une plateforme qui puisse accélérer l’efficacité énergétique, amplifier
encore l’effort pour les énergies renouvelables, et stocker l’énergie.
Nous allons justement donner une traduction à cette ambition.
Nous avons aussi à préparer la conférence sur le climat qui va se
tenir l’année prochaine à Paris, et là encore Allemagne et France auront
à prendre leurs responsabilités au cours du Conseil européen du mois de
mars, pour ensuite déboucher sur un cadre européen, d’ici la fin de
l’année, qui nous permettra d’avoir la meilleure position pour trouver
un accord final lors de la conférence sur le climat.
Enfin j’ai été particulièrement sensible au fait que la chancelière ait accepté de venir pour le 6 juin 2014, 70ème
anniversaire du débarquement, je pense que c’est un beau message et qui
correspond à l’esprit de l’amitié franco-allemande que nous allons, la
chancelière et moi-même, célébrer particulièrement l’année prochaine -
mais finalement qui ne tient pas à une année et a vocation à se
poursuivre. Merci.
Angela MERKEL :
Merci beaucoup cher François, Monsieur le Président, au nom de tous
les membres du nouveau gouvernement allemand, je voudrais exprimer ma
gratitude pour l’hospitalité qui nous est accordée et pour l’excellente
préparation de cette rencontre de nos deux gouvernements, mais du fait
de l’actualité je voudrais commencer par parler de l’Ukraine. Les images
que nous recevons d’Ukraine depuis hier sont des images choquantes et
nous sommes aux côtés des hommes et des femmes qui souffrent de la
violence sur la place Maïdan et ailleurs. Nous sommes aux côtés de
toutes les victimes de la violence et nous lançons un appel et nous
ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour qu’un dialogue politique
puisse être réamorcé, parce que seul le dialogue politique peut
véritablement produire des progrès.
Dans le dialogue politique, c’est la question d’un gouvernement de transition, c’est la question d’élections libres, là où la France
et l’Allemagne pourront intervenir, là où l’Union européenne pourra
apporter son concours, nous le ferons et naturellement nous discuterons
tout autant avec les partis d’opposition qu’avec les représentants du
gouvernement, nous chercherons à avoir des discussions avec le président
ukrainien pour autant qu’il y soit disposé.
C’est le rôle d’un gouvernement d’empêcher le recours à la violence
et nous espérons qu’il sera rapidement possible d’arrêter la violence,
mais lorsque demain les ministres des Affaires étrangères se
rencontreront, il faudra discuter, le cas échéant, des sanctions
spécifiques qui devront être prises pour montrer clairement qu’il est
pour nous de la plus grande importance que le processus politique
recommence et qu’on ne peut pas accepter ce qui se produit.
Ensuite, nous avons parlé du programme que nous nous sommes fixés il y
a déjà un certain temps, ce qui est important c’est que nous œuvrions
ensemble, à la veille des élections européennes, que nous œuvrions
ensemble pour l’approfondissement de l’Europe, pour la capacité
opérationnelle de l’Europe. Nous pensons que pour qu’il y ait une Union
monétaire efficace il faut aussi une Union économique forte, et de
nombreuses activités, notamment de nos ministres des Finances, montrent
bien que nous cherchons des coopérations pour rendre possible cette
harmonisation de la politique économique, c’est travailler dans le
domaine fiscal, c’est la taxe sur les transactions financières.
Je serais pleine de gratitude à l’égard des ministres des Finances si
l’on arrivait à un résultat dans ce domaine avant l’élection
européenne, et ce serait un signal très important pour les hommes et les
femmes d’Europe parce qu’ils comprendraient, ils verraient, que les
acteurs financiers ont une responsabilité dans le modèle économique et
social de l’économie sociale de marché.
Par ailleurs, nous avons également beaucoup échangé sur nos façons de
maîtriser la transition énergétique, c’est un problème urgent en
Allemagne mais il y a beaucoup de convergences avec la France,
donc il faut essayer d’exploiter ces convergences que nous offre le
marché intérieur. Je me félicite de la création d’une plateforme, je me
félicite de la coopération des agences de l’énergie que nous allons
avoir et je me félicite aussi que nous puissions coopérer dans le
domaine des capacités, des marchés de capacités. C’est quelque chose de
relativement nouveau qui n’est pas encore très développé et dans ce
domaine la France et l’Allemagne en faisant la transition vers plus d’énergies renouvelables la France et l’Allemagne pourront être des pionniers.
Nous allons également présenter notre position devant la Commission européenne en ce qui concerne l’efficacité, la compétitivité de nos entreprises. Nous sommes d’accord avec la Commission pour que la part de l’industrie dans nos pays progresse, la Commission
parle de 20% en 2020 d’industries dans le PIB mais cela suppose que les
industries électro-intensives puissent survivre en concurrence avec des
pays comme les Etats-Unis par exemple. Et c’est là-dessus que doivent
être orientées les mesures que la Commission
européenne veut engager et nous allons tout faire pour que cela se
fasse. Ce soir, nous aurons une rencontre avec des entreprises
européennes au palais de l’Elysée, c’est pour nous un souci majeur parce
que sinon il est inutile de commencer seulement à parler de l’emploi.
Nous coopérons étroitement également en ce qui concerne les marchés
de l’emploi, c’est de la responsabilité des ministres des Affaires
sociales dans le domaine de la politique intérieure, de la justice,
également sur le terrain de la politique étrangère. Je me félicite que
les ministres des Affaires étrangères et de la Défense
fassent des déplacements communs. Cher Monsieur le Président, Cher
François, il faut voir où nous pourrions faire un déplacement ensemble,
un déplacement commun.
Mais il est clair qu’il faut que nos contributions au sommet UE
Afrique devront être préparées ensemble. Ce sommet début avril sera une
grande chance pour tracer les contours d’une politique africaine depuis
les politiques migratoires jusqu’à l’aide au développement, etc. Et dans
ce domaine il y a beaucoup à faire dans la coopération entre nos
gouvernements et je crois que la France
et l’Allemagne peuvent donner une impulsion réelle car nous avons eu un
dernier sommet UE Afrique nous avons une plateforme de coopération,
maintenant il s’agit de donner une substance à cette démarche et là il y
a encore beaucoup à faire.
Un siècle après le début de la Première Guerre
mondiale, on verra pour la première fois une brigade franco-allemande
déployée à l’étranger. Pour moi, cela a une forte valeur symbolique.
Cette année et dans nos pays, nous connaissons des personnes
centenaires, si nous les félicitons pour leur anniversaire, si nous
songeons à l’année où ils sont nés et si nous songeons à ce que sont nos
projets aujourd’hui.
Souvent on a tendance à dire tout ce qui ne marche pas, eh bien je
crois que cette année notre travail continuera d’être animé par le fait
que nous sommes aujourd’hui confrontés à d’autres problèmes que nous
pouvons les résoudre ensemble dans notre responsabilité globale et je
voudrais dire vivement ms remerciements notamment pour cette invitation à
me rendre en Normandie à la commémoration du Débarquement. Oui, lorsque
nous avions dit aux 50 ans du traité de Tome, nous avons dit en Europe
nous avons la chance d’être unis, nous voulons utiliser cette chance
nous gouvernements français et allemand.
Merci beaucoup.
QUESTION :
Madame la Chancelière,
concernant l’Ukraine vous avez dit que seul le dialogue politique peut
apporter un progrès mais maintenant vous parlez de sanctions
spécifiques. Quelle peut être la forme de ces sanctions spécifiques ?
Ensuite, y aura-t-il une initiative franco-allemande sur cette
question ? Et troisièmement, comment est-ce que la Russie sera associée à ce dialogue ?
Angela MERKEL :
Il y a une totale concordance franco-allemande pour ce qui est de la
position à l’égard de l’Ukraine et le message qui est le nôtre
aujourd’hui le traduit bien. Les ministres des Affaires étrangères vont
se réunir demain à Bruxelles et aujourd’hui il s’agit d’envisager des
sanctions qui visent précisément les fauteurs de violences. Voilà
pourquoi ces sanctions doivent être spécifiques. A mon sens, il est
inutile de prononcer des sanctions qui frappent la population civile en
dernier ressort. Non, il faut qu’il s’agisse de sanctions qui ciblent
ceux qui sont responsables de violences.
Mais les sanctions ne suffisent pas, c’est ce que nous considérons
l’un et l’autre et il faut relancer le processus politique parce que
seul le processus politique pourra contribuer au rétablissement de la
paix. Et nous cherchons tous les contacts possibles notamment en
direction de la Russie,
ces contacts sont en cours au moment où je vous parle, il continuera
d’y en avoir. Et je crois donc aussi bien les ministres des Affaires
étrangères qu’à notre niveau de responsabilité, nous ne relâcherons pas
l’effort. Et je voudrais également dire que si l’on veut un processus
politique d’un côté il est important d’apporter son soutien à
l’opposition. En Allemagne, nous avons reçu les représentants des partis
d’opposition en Allemagne mais il est tout aussi important d’échanger
avec l’autre partie parce que sinon il ne sera pas possible d’arriver à
une solution politique.
LE PRESIDENT :
Trois objectifs. Un, faire cesser le plus rapidement possible les
violences. Deuxième objectif, définir des sanctions ciblées, spécifiques
et graduelles pour peser sur le processus. Troisièmement, ouvrir un
dialogue politique en Ukraine et avec également tous les pays concernés
par la question ukrainienne de manière à ce que là encore chacun ait à
prendre sa responsabilité. La France
et l’Allemagne mais nous ne sommes pas seuls, il se trouve que nous
nous retrouvons aujourd’hui dans ce contexte et que nos ministres des
Affaires étrangères y ont déjà travaillé beaucoup et vont continuer à le
faire.
Mais l’Europe a été présente, présente pour faire une proposition,
c’était l’accord d’association, mais présente encore ces derniers jours
et ces dernières semaines avec madame ASHTON qui s’y est rendue
plusieurs fois. Il y a eu des contacts avec tous ceux qui voulaient bien
accepter de les prendre et notamment l’opposition. Donc nous sommes
disponibles et nous agirons et ça doit se faire au niveau européen dès
jeudi avec la réunion du Conseil des ministres. Mais on ne peut pas
rester passifs par rapport à ce qui se passe en Ukraine. L’Ukraine n’est
pas dans l’Europe mais l’Ukraine est en Europe.
Et à partir de là, mais ce n’est pas la seule raison, nous sommes
encore plus mobilisés mais, je l’ai dit, nous sommes également mobilisés
pour d’autres continents et ce qu’a dit la chancelière est très
important par rapport à l’Afrique. Il va y avoir une réunion au début du
mois d’avril entre l’Union européenne et l’Afrique à la fois pour le
développement et pour l’économie et pour la sécurité. Je pense que là
aussi ça fait partie de ce que l’Europe doit faire à l’échelle du monde.
QUESTION :
Bonjour, Hervé ASQUIN, de l’AFP. Une question pour la chancelière et
vous-même, Monsieur le Président, vous avez évoqué la poursuite des
discussions avec l’opposition ukrainienne mais aussi avec le président
IANOUKOVITCH. Est-ce que vous souhaitez que les sanctions envisagées
visent monsieur IANOUKOVITCH lui-même ? Est-ce que vous souhaitez
qu’elles visent les principaux responsables ukrainiens ? Cela fait
semble-t-il l’objet de discussions en ce moment même à Bruxelles. Et
d’autre part sur le principe même de ces sanctions il semble qu’il y ait
un certain nombre d’oppositions ou du moins de réticences d’un certain
nombre de pays voisins ou méditerranéens, comment entendez-vous les
convaincre d’accepter le principe de ces sanctions ? Merci.
Angela MERKEL :
Tant au niveau de la haute représentante Catherine ASHTON qu’au
niveau d’Herman Van ROMPUY il y a des discussions en cours. Ce matin,
moi-même également, le président de la République
nous nous sommes entretenus avec le Premier ministre polonais, il y a
donc de multiples contacts. Nous devons réfléchir attentivement où nous
pouvons agir, voilà pourquoi les ambassadeurs se sont réunis aujourd’hui
à Bruxelles, demain les ministres des Affaires étrangères précisant
contre qui seront prises, quelles sanctions ciblées, graduelles puisque
le président évoquait une cascade possible. On ne peut pas dire a priori
que tel ou tel est exonéré de toutes responsabilités mais nous y
réfléchirons très attentivement. Et puis ces sanctions sont également un
moyen de dire que nous attachons le plus grand sérieux à la défense des
droits démocratiques.
Mais il est également tout aussi important à nos yeux de relancer le
processus politique et les discussions. Mais la tactique dilatoire,
délibérée du gouvernement ukrainien des derniers jours n’a fait que
dégrader la situation et maintenant il faut arrêter cette politique
d’essayer de gagner du temps parce que vouloir gagner du temps cela veut
dire mettre des vies en danger tant du côté des manifestants que du
côté des forces de l’ordre et ça un gouvernement n’a pas le droit de
l’accepter passivement.
Nous discutons avec tous, je le répète. Compte tenu de la nouvelle
nature de la situation, la sanction est importante mais une sanction
n’est pas une fin en soi, la sanction ne va pas résoudre le problème à
elle seule, donc il faut poursuivre la démarche de façon parallèle.
LE PRESIDENT :
Monsieur Van ROMPUY, qui d’ailleurs est en ce moment même dans le
Sahel au nom du Conseil européen, a pris une position qui déjà nous
rassemble sur la manière de réagir aux événements tragiques qui se
produisent en Ukraine. Et je ne doute pas que demain les ministres des
Affaires étrangères qui seront autour de la table auront la même
attitude, la même conscience de l’urgence de la situation. Après, c’est à
partir des enquêtes que les sanctions pourront être précisées. Mais les
sanctions c’est un moyen de pression, ça ne peut pas être en soi la
seule réponse.
Ce que nous devons comme l’a dit Angela MERKEL, ce que nous devons
faire c’est trouver une solution politique avec un calendrier, avec une
méthode et avec une issue et toujours en restant en contact avec les
pays voisins. Et je crois que c’est la démarche que nous avons eue
depuis le début, il ne s’agit pas de faire pression sur l’Ukraine pour
qu’elle se détache d’autres, il s’agit tout simplement de permettre aux
Ukrainiens d’avoir la liberté de choisir, de décider de leur avenir et
de leur gouvernement.
QUESTION :
Monsieur le président l’Allemagne étant prête à renforcer son
engagement militaire en Afrique, cela va libérer des soldats au Mali qui
pourraient être envoyés par exemple en République Centrafricaine,
est-ce que cela correspond à un partage des tâches juste, ou est-ce
qu’on pourrait peut-être ajouter quelque chose ? Ou est-ce que
l’Allemagne défend ses intérêts au Mali, est-ce qu’on n’aurait pas pu
envoyer la brigade franco-allemande également en République
Centrafricaine ?
LE PRESIDENT :
La décision que nous avons prise depuis quelques jours et que nous
annonçons aujourd’hui de l’envoi de la brigade franco-allemande montre
bien quel est l’état d’esprit qui nous unit. Sur la lutte contre le
terrorisme, sur la question de la sécurité nous avons le devoir d’agir
et nous le faisons ensemble. Et dans le cadre d’une opération
européenne, parce que la brigade franco-allemande va se déployer dans le
cadre d’une opération européenne, ce n’est pas une initiative
bilatérale, et c’est très important que de le souligner.
Il se trouve que la France
a depuis longtemps des positions en Afrique. Et qu’elle essaye de
traduire avec une nouvelle démarche cette relation particulière liée à
l’histoire. Nous avions donc des troupes qui étaient - comme on dit –
pré-positionnées, près de la Centrafrique. Et la question qui s’est posée à la France et j’allais dire seulement à la France
en tant que pays européen, c’était de savoir si nous laissions faire
les massacres, si nous restions spectateurs alors même que nous avions
des moyens d’agir ?
Donc la France
a considéré que c’était son devoir et c’était aussi parce qu’elle en
avait la capacité d’agir. Ensuite l’Allemagne, d’ailleurs dans le cadre
aussi d’une opération européenne qui vient d’être décidée – nous
confirme que elle va, je remercie tous ceux qui y ont travaillé, envoyer
des équipes médicales, nous en avons absolument besoin. Quand je dis
nous ce sont les Centrafricains. Et également des moyens logistiques. Et
c’est le plus important. Car nous parlons beaucoup d’effectifs en
Centrafrique, et c’est vrai qu’il y a des besoins, mais ce qu’il faut
c’est que les troupes africaines puissent se déployer par tout sur le
territoire centrafricain pour assurer justement la sécurité ; et ce que
va faire l’Europe, et ce que va faire l’Allemagne va permettre d’y
contribuer.
Angela MERKEL :
On voit bien je crois que le cadre historique est différent, pour ce
qui est de la situation en Afrique et de l’engagement de nos deux pays,
mais aussi bien l’exemple du Mali que l’exemple de la République Centrafricaine
montre bien ce que nous pouvons faire ensemble. Par exemple nous avons
émis l’idée ensemble pour que la mission en Centrafrique soit une
mission européenne. C'est très important, pour que l’Europe montre que
dans une telle crise humanitaire d’un pays qui a une autre situation
historique ce n’est pas l’affaire d’un pays mais c'est notre
responsabilité commune.
D’autre part nous avons parlé également de l’équipement des troupes
africaines en République Centrafricaine. Il y a beaucoup de soldats
là-bas. Et ils ne sont pas en mesure de réaliser leur mission. Et donc
là l’Allemagne verra quelle est l’aide qu’elle peut apporter. Ensuite
il s’agit de soutiens logistiques comme nous l’avions déjà fait en son
temps au Mali.
Et quatrièmement il s’agit aussi de formation, il s’agit aussi d’aide
humanitaire, il s’agit également d’une action inscrite dans la durée.
L’Allemagne sera ici un partenaire fiable dans la durée. Parce que si
l’on regarde la formation de l’armée malienne, cela prendra une
certaine durée pour que cette armée malienne puisse défendre la sécurité
de son propre pays. Et puis il faut également voir la responsabilité
commune.
Nous sommes engagés au sein de l’OTAN, au sein de la politique
européenne de défense et de sécurité, l’Allemagne est présente au
Kosovo, l’Allemagne est encore plus présente en Afghanistan, donc de
même que la France
se sent coresponsable de l’évolution dans les Balkans, alors qu’il y a
moins de soldats français que de soldats allemands, là, la France
a plus de soldats en Centrafrique, mais nous éprouvons la même
responsabilité pour le succès de la mission militaire et politique, et
dans ce domaine nous avons une excellente coopération.
QUESTION :
Il y a encore des divergences de vue sur la taxe sur les
transactions financières dont vous souhaitez un accord avant les
élections européennes ? Est-ce qu’on va vers une mise en œuvre
progressive de cette taxe, c'est-à-dire tant qu’il n’y aura pas
d’accord entre vous deux sur quel produit elle doit s’adresser ?
Monsieur le président vous avez dit aux Etats-Unis que la confiance
avait été restaurée sur le dossier de la NSA, je voulais savoir si madame la Chancelière
vous aviez retrouvé la confiance aussi avec les Etats-Unis ? Et juste
une dernière question, vous êtes tous les deux actionnaires d’une grande
entreprise de télécom, DEUTSCH TELEKOM…
LE PRESIDENT :
Pas personnellement…
QUESTION :
L’Etat. Madame la Chancelière
vous appeliez à créer un groupe européen de communications, est-ce que
ce n’est pas justement l’occasion pour vous deux de créer l’Airbus
dont vous avez parlé ?
LE PRESIDENT :
Sur la taxe sur les transactions financières, nous sommes dans une coopération renforcée. Et c’est l’Allemagne et la France,
notamment, qui en ont pris l’initiative. Nous avons convenu aujourd’hui
de mettre en place cette taxe d’ici les élections européennes. Et par
rapport aux produits dérivés nous avons la même approche. Après est-ce
que cette taxe doit être appliquée graduellement ? Les ministres en
décideront.
Le principe c'est qu’elle soit appliquée, parce que si on recherche
le produit parfait, j’en connais qui iront très loin dans le détail pour
que jamais il y ait la taxe sur les transactions financières. Donc je
préfère une taxe encore imparfaite que pas de taxe du tout. Le purisme
peut être aussi une façon d’éviter un moment d’appliquer, purement et
simplement. Voilà la position sur la taxe sur les transactions
financières.
Sur le rapprochement des entreprises de télécommunications, très
franchement nous n’en avons pas parlé et quand j’avais évoqué ce qui
avait été l’histoire d’Airbus sur l’aéronautique et que nous devions
regarder l’avenir, c’était et c’est encore essentiellement sur la
transition énergétique que nous devons rapprocher tout ce qui existe et
c’est ce que nous avons fait aujourd’hui.
Il y a une autre question qui a été, et qui peut être liée à la
vôtre, qui a été traitée au cours de cette réunion des deux
gouvernements, c'est le numérique. La Chancelière
avait pris des positions qui étaient d’ailleurs voisines des nôtres, il
y a quelques jours, pour que nous donnions toute l’ampleur nécessaire à
l’investissement dans le numérique à l’échelle de l’Europe et que nous
puissions créer des ensembles qui puissent être capables d’être leader
pour être compétitifs.
C’est ce que nous essayons de faire dans chacun de nos pays et en
ayant un marché du numérique avec une question que nous avons aussi à
régler, que nous avons évoquée aujourd’hui qui est la protection des
données personnelles. Voilà sur ce sujet.
Sur l’énergie j’y reviens aussi parce que nous avons la volonté
d’être innovants en ces matières. Et l’expérience de l’Allemagne en
matière de renouvelable peut nous être utile, et nous avons aussi
l’enjeu du stockage de l’énergie.
Angela MERKEL :
Merci. Je voudrais également dire un mot sur la taxe sur les
transactions financières. Pour la première fois nous avons, les
ministres des Finances ont envisagé une mesure concrète d’ici l’élection
européenne. Ce n’est pas rien. Il faut d‘abord mettre en route la
coopération renforcée pour la taxe sur les transactions financières,
parce qu’à partir du moment où quelque chose bouge, certains pays
pourraient peut-être perdre leur réticence. Et cela permettrait
peut-être d’aller encore plus loin. Et c’est pourquoi je me réjouis que
ces travaux avancent à un rythme soutenu.
Ensuite, en ce qui concerne la coopération des services de
renseignement, nous avons décidé de donner le bon exemple et dans notre
communiqué vous verrez que le responsable du gouvernement fédéral, le
secrétaire d’Etat FRISCH pour les services de renseignements va coopérer
avec son homologue français pour exploiter les possibilités de
coopération dans ce domaine. Et la France
et l’Allemagne pourraient donner un bon exemple de la façon dont on
peut coopérer par-delà les frontières dans ce domaine, parce que les
Européen ne sont pas forcément le meilleur exemple. Si la coopération
n’est pas très bonne entre nous, de quel droit le demanderions nous à
d’autres ?
Pour ce qui est de l’agenda numérique en général, de la protection
des données, du numérique en général, il y a beaucoup de retard à
rattraper ; nous travaillons au règlement sur la protection des données,
c’est difficile en Europe, nous essayons d’obtenir rapidement un
résultat ambitieux, et puis sinon nous avons beaucoup de pain sur la
planche en Europe, c’est cette Europe du XXème siècle, c'est d’avoir la
capacité industrielle et économique de ne pas être largués sur les
marchés internationaux. C'est la production des puces, le développement
des logiciels, c'est le développement des réseaux numériques ; et voilà
pourquoi le numérique joue un rôle croissant dans notre coopération ; et
les conditions cadres européennes doivent être propices à
l’investissement.
Ce qui inquiète toute nos grandes entreprises aussi bien en France
qu’en Allemagne c’est que la possibilité de rentabiliser des
investissements d’avenir est déterminé par le cadre concurrentiel. Ca ce
n’est pas aussi favorable en Europe que dans d’autres régions du monde.
Il faut que les solutions soient conviviales mais il faut que
l’investissement soit rendu possible. Il y a beaucoup de questions à
examiner et là la France et l’Allemagne ont des positions tout à fait concordantes.
QUESTION :
Nous sommes à un peu plus de trois mois des élections européennes,
vous êtes tous les deux les représentants de ce qu’on a coutume
d’appeler le couple franco-allemand, le moteur franco-allemand, on voit
monter les populismes, l’euroscepticisme, quel est le message que vous
avez envie de donner aux peuples européens pour que le nouveau parlement
ne soit pas un parlement anti-européen ? Merci.
LE PRESIDENT :
Notre responsabilité, elle est historique. Nous sommes deux pays
fondateurs de l’Europe. Deux pays sans lesquels l’Europe n’aurait même
pas pu se concevoir. Nous sommes aussi des symboles de l’Europe. Deux
pays qui se sont affrontés tragiquement tout au long de la première
partie du XXème siècle et qui ont été capables dans la seconde partie du
XXème siècle de faire une union exceptionnelle. L’Europe elle doit
d’abord regarder son histoire si elle veut poser les conditions de son
destin.
Ensuite il y a le présent. Il y a une question que nous devons
regarder en face, c’est la question de notre identité. Chaque peuple est
traversé par cette interrogation. Que peut-il être dans la
mondialisation ? Quelle est sa place ? Quel est son avenir ? Et la
réponse c’est qu’il n’y a pas d’avenir sans l’ouverture, sans la
compréhension du monde ; et qu’un pays comme la France - mais c'est vrai
de l’Allemagne, encore plus vrai d’une Allemagne qui a fait sa
réunification -, que notre avenir doit être celui d’un continent capable
de porter des valeurs.
Si nous nous replions sur nous-mêmes, sur nos égoïsmes, sur nos
peurs, si nous pensons qu’il n’y a plus d’avenir possible en Europe et
même dans le monde, alors c’est le retour à tout ce que nous avons pu
connaître - non pas la barbarie passée, mais les risques de
l’affrontement et de la division.
Est-ce que ça doit nous empêcher de traiter les questions immédiates
qui sont celles du chômage, des inégalités, des reconversions
économiques ? Non ! C’est là qu’on attend l’Europe ! L’Europe, elle doit
être une Europe de croissance, une Europe qui peut être à son niveau.
Je rappelle que l’Europe, c’est la première puissance économique du
monde ! Donc nous devons préparer ensemble l’avenir. Nous venons d’en
parler de l’avenir, de la croissance, de la transition énergétique, de
la compétitivité, des nouvelles industries, du numérique. Voilà ce que
nous avons à faire ! Pas simplement à régler un marché.
Tout à l’heure, Angela MERKEL parlait des industries
électro-intensives. Cela peut paraître secondaire mais c’est majeur si
nous voulons avoir notre indépendance également énergétique,
industrielle, si nous voulons être encore de grands pays avec des
possibilités de développement. Donc nous devons maîtriser également la
question énergétique et c’est ce que nous devons expliquer à nos
concitoyens.
Ceux qui pensent que sans l’euro, ça irait mieux ? Mais sans l’euro,
ce serait aujourd’hui non seulement l’affrontement commercial – il
existe –, la compétition – elle existe –, mais ce serait une suite de
dévaluations. Et où en serait l’Europe s’il n’y avait pas eu cette
solidarité de l’euro ? Nous aurions encore une crise financière qui se
poursuivrait.
Donc, j’assume le débat qui va s’ouvrir mais pas en m’excusant, en
faisant en sorte que je puisse, avec ceux qui ont une responsabilité au
niveau européen et notamment nos amis allemands, être au rendez-vous. Et
être au rendez-vous, c’est pouvoir offrir une perspective à l’Europe et
donc à la France.
Angela MERKEL :
Au début, j’avais fait une référence à l’histoire. Cent ans, ce n’est
pas très long et à l’époque, nul n’aurait imaginé que ce « vivre
ensemble » en Europe soit aujourd’hui possible. C’est une chance
extraordinaire. On parle souvent de ce qui fait nos divergences, de ce
sur quoi on se querelle et nous avons vécu ces interminables Conseils
pour arriver à un communiqué. Beaucoup de gens vont se demander : mais,
grand dieu, que font-ils là-bas ? Nous-mêmes, nous nous demandons
pourquoi ça n’avance pas plus vite parfois.
Mais si, finalement, nous songeons aux points sur lesquels nous ne
nous disputons jamais en Europe, c’est la liberté de voyager, la liberté
d’opinion, la liberté de la presse, toutes les libertés démocratiques
fondamentales ! Et si vous regardez dans le monde combien il y a de
régions, combien il y a de pays où ces droits sont garantis pour tous,
eh bien nous pouvons, nous, être fiers des cinq cents millions d’hommes
et de femmes.
Les plus anciens peuvent nous raconter ce que c’était que d’aller de
France en Allemagne ou d’Allemagne en France. Aujourd’hui, la question
ne se pose même pas ! Un étudiant fait des études dans deux, dans trois
pays. Nous voulons maintenant éteindre, étendre cela à ceux qui font une
formation professionnelle. Cela va devenir une réalité concrète ! On va
pouvoir construire sa vie là où on a envie de la construire.
L’Allemagne est un grand pays. La France
est un grand pays. Mais tous ensemble dans l’Union européenne, nous
réunissons 7 % de la population mondiale ! Alors nous pensons avoir
toujours raison en matière de droits de l’homme, d’économie sociale de
marché. Bien, que pensez-vous que les Allemands et les Français peuvent
faire à eux seuls avec 1 % de la population mondiale ? Il faut à chaque
fois en convaincre cinquante autres qu’ils sont de votre avis.
Si nous voulons être forts, il faut que nous soyons unis dans ce que
nous voulons pour la protection du climat, pour les droits de l’homme,
pour la politique de développement, pour la justice, pour les questions
migratoires, pour tout ce qui nous anime chaque jour.
Enfin une troisième chose – mais c’est quelque chose que je peux
comprendre et François HOLLANDE l’a dit aussi, nous en parlons
souvent –, les hommes et les femmes veulent que l’Europe s’occupe de ce
dont nous venons de parler.
Parfois, les critiques sont fondées lorsqu’on dit que l’Europe met
des bâtons dans les roues. Ce sont parfois des décisions des chefs
d’État et de gouvernement, ce sont parfois des décisions de la Commission. Je
ne voudrais clouer personne au pilori mais, de la même façon qu’on
critique la politique nationale, il ne faut pas qu’une critique d’une
mesure européenne devienne une critique générale contre l’Europe.
Certes, il faut améliorer l’Europe, il faut réduire la bureaucratie,
il faut rapprocher l’Europe des citoyens et il faut écouter les hommes
et les femmes de nos pays qui nous disent : « Eh ben voilà, ceci ou cela
ne marche pas bien. » Mais dans cet esprit, nous allons aborder
positivement l’élection européenne.
LE PRESIDENT :
Merci.
_________________________/
Publié le 19 Février 2014
Consulter le relevé de décisions et les principales décisions
du 16e Conseil des ministres franco-allemand, qui s'est tenu le 19
février 2014, à l'Élysée.
Rubrique : Europe - International, développement et francophonie